Tribune
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Publié le 12 Avril 2010

Shimon Peres à Paris - où va Israël ?

En attendant la venue en France du président de l’État d’Israël, Shimon Peres, qui sera à Paris demain, notamment pour inaugurer, aux côtés du maire de Paris, Bertrand Delanoë et de Madame Rachida Dati, maire du 7ème arrondissement, la promenade David Ben Gourion, nous poursuivons la publication, en bonnes feuilles, d’ extraits du livre qu’il a écrit en 2003 en collaboration avec Jean-Pierre Allali, Un temps pour la guerre, un temps pour la paix (Éditions Robert Laffont).




Aujourd’hui : où va Israël ?



Où va Israël ? Combien de temps encore attendrons-nous la paix ? Combien de temps encore faudra-t-il que nos enfants combattent, que nos fils et nos filles meurent, que le sang coule et que nos mères pleurent ? Y a-t-il une fatalité à cette lutte sans fin avec nos voisins arabes, avec les Palestiniens ? Finirons-nous par vaincre cette lèpre des temps modernes qu'est le terrorisme ?
De plus en plus, j'ai le sentiment que l'adage qui dit que nous, Juifs, sommes une tribu insomniaque, est vraiment fondé. C'est, je crois, l'Encyclopédie qui, en France, décrivait les Juifs comme le peuple qui a toujours empêché les autres de s'endormir. Aujourd'hui, c'est toute une partie d'Israël et du monde juif qui a du mal à trouver le sommeil.



Je suis inquiet pour mon pays, pour Israël et son avenir et, dans ces moments d'angoisse, je me dis qu'au fond, après cinquante-cinq ans d'existence (1), Israël, contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, n'est pas un pays dont le futur est complètement assuré. La construction, la reconstruction d'un État juif, est encore inachevée. Et le Messie, lui, court toujours. C'est, m'a dit un jour un ami, le plus grand diplomate que les Juifs aient jamais eu. Pour la simple raison qu'on l'attend encore.



Je n'ai jamais été religieux au sens orthodoxe du terme, mais je ne peux m'empêcher, quand je me retrouve seul, de murmurer une prière : « Si Dieu nous écoute, qu'il protège Israël, qu'il fasse que la paix, tant attendue par notre peuple, devienne enfin une réalité. Que vienne le jour où Israël quittera l'uniforme pour revêtir des tenues civiles. » À force de ne voir en nous, sur les écrans télévisés et les photographies diffusées par la presse, que des soldats, on a fini par nous considérer comme un peuple belliqueux composé de guerriers. Rien de plus faux. Nous n'avons pas choisi l'uniforme. Nous n'avons pas choisi le conflit. Nous sommes avides de paix. « Quelle est la différence entre la guerre et la paix ? » demande un sage grec. Sa réponse, hélas, s'applique à la lettre à notre région éprouvée par tant de haine. « En temps de paix ce sont les enfants qui enterrent leurs pères. En temps de guerre, ce sont les pères qui enterrent leurs enfants. »



(1) Ce texte a été écrit, rappelons-le, en 2003.



Photo : D.R.