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Il fallait être hier soir au Trocadéro, parmi la foule, afin de vibrer avec elle et percevoir ce souffle dont nous avons tant besoin afin de nous relever et ne plus accepter l'inacceptable.
Il fallait être hier soir au Trocadéro, parmi la foule, afin de mettre des mots sur une souffrance qu'on ne savait plus nommer, pour espérer enfin malgré l'inquiétude.
Selon Woody Allen, même les paranoïaques peuvent avoir des ennemis. Aux autres aussi, il arrive de s'inquiéter, quand tous les faits mis bout à bout s'accumulent et qu'ainsi, l'évidence s'impose.
François d'Orcival, dans Le Figaro magazine du 31 janvier, titrait sur l'inquiétude des Juifs de France qui causait une migration vers Israël et l'hebdomadaire Actualité juive soulignait de même dans son numéro du 12 décembre dernier l'augmentation de ces départs de plus de 50% en 2013. Les raisons sont multiples, de la créativité du pays aux raisons spirituelles, de la vitalité économique à l'ensoleillement, de la joie de vivre à la sécurité. Oui, des Juifs ne se sentent plus en sécurité en France, et les assassinats de Toulouse y sont pour beaucoup, mais nombreux sont ceux qui se posent de sérieuses questions qu'il serait imprudent de balayer d'un revers de main. Il y a un sentiment de vulnérabilité qui inquiète et qui obère toute idée sereine d'avenir.
Ainsi, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, qui heureusement n'est pas le Conseil lui-même, s'obstine par une résolution à inviter ses États membres à prévenir les "violations de l'intégrité physique des enfants". La circoncision est explicitement visée, car elle violerait les droits de l'enfant par la pratique d'un tel acte pour une raison religieuse à un âge où tout consentement est impossible. La résolution appelait plus précisément, et de manière quelque peu incohérente, les États membres à "définir clairement les conditions médicales, sanitaires et autres à respecter s'agissant des pratiques qui sont aujourd'hui largement répandues dans certaines communautés religieuses, telles que la circoncision médicalement non justifiée des jeunes garçons".
Cet appel est autant un défi aux fondements de la raison qu'à ceux de la foi.
Un défi à la raison, tout d'abord, car dans cette pseudo-logique, pourquoi s'en tenir à la seule circoncision ? Quelle est la vocation des parents, dans tous les domaines et pas seulement dans celui de la foi, sinon celle d'éduquer ou de guider l'éducation de leurs enfants, depuis leur plus jeune âge ? Qui peut s'y substituer ? Et pire, peut-on imaginer qu'avant l'âge de raison, l'enfant doive rester une page blanche, aveugle, sourde et muette, pour que nulle influence prématurée ne viole ses droits ? Pourquoi plonger le nourrisson dans un bain linguistique donné, et lui imposer le choix d'un idiome et de ce fait, de tout l'appareil culturel que chacun véhicule : jetons le bébé avec la langue du bain ! Jusqu'à quel âge interdire toute parole, écoute, école, lecture et toute forme de pratique culturelle ou religieuse ? Pour les enfants, pas de catéchisme, de medersa ou de Talmud Torah, et pas d'avantage de laïcité ? Juste rien, puis, la raison advenue, par l'opération d'un esprit sanctifié par sa vacuité même, l'édifice de la conscience s'érigera spontanément sur des fondations inexistantes ? Quelle culture pourrait être ainsi transmise ? De plus, passons sur la trouble confusion créée entre circoncisions, tatouages, piercing et excision pour plutôt m'étonner d'un argument de ceux qui défendent l'acte de la circoncision en expliquant que ce geste est bon pour la lutte contre les MST ou le sida. Mais c'est nier la possibilité d'un geste purement religieux, sans avantage collatéral, c'est interdire la foi qui ne serait pas soumise à la raison. Ce n'est pas une posture respectueuse de la foi, car ce n'est pas une posture laïque. Si un croyant, quelle que soit sa religion, pose un acte, il doit pouvoir se suffire de sa volonté de respecter ce qu'il pense être la parole divine sans avoir à justifier aux yeux de la société d'un bienfait pour elle. Et quand bien même la circoncision serait pratiquée à une grande échelle, comme aux États-Unis, et quand bien même aurait-elle des avantages médicaux reconnus, c'est la volonté de chacun, pour les raisons qui sont les siennes, religieuses ou non, qui doit faire sens… Lire la suite.