- English
- Français
Dans le difficile dialogue que conduisent entre eux les deux premiers termes de notre triptyque républicain, l’aspiration à l’égalité heurte souvent l’aspiration à la réalisation matérielle. C’est là, Tocqueville s’en est inquiété, l’aporie essentielle de la société en quête démocratique. La conciliation de ces deux exigences peut s’effectuer sous l’ersatz d’une égalité purement juridique et ne correspondant pas à la réalité déséquilibrée des conditions sociales de certaines parties de la population générale.
Ce compromis peut donc être qualifié d’hypocrite et n’est pas satisfaisant. Sans de meilleures perspectives, le ressentiment risque d’emporter ceux qui sont écartés des avenirs de prestige du fait de leur milieu social d’origine. La question est donc de préserver l’égalité des chances sans ethniciser les individus ou communautariser la société.
La méthode des quotas choque nos habitudes centralisatrices et unificatrices qui remontent à bien plus longtemps que la révolution jacobine, et par-delà Colbert, s’observent dans la politique des Capétiens tout au long du Moyen Age. Les auteurs de cette étude nous conduisent dans le dédale compliqué des chemins entrepris par les pouvoirs publics dans ce domaine, sans masquer leurs fréquents échecs.
Pourquoi un regard juif sur cette question ? Au-delà du concept, qui risque de devenir un cliché confortable, de « réparation du monde » (Tikoun olam), il y a la solidarité des anciens discriminés envers les nouveaux discriminés. Il y a aussi le constat que dans cette France où l’ascenseur social est en panne, où les perspectives d’emploi sont si sombres, un horizon totalement bouché garantit une explosion sociétale.
Bien entendu, cela ne signifie pas que le CRIF fait forcément siennes les conclusions de ce rapport. Ce n’est pas son rôle. Mais ceux qui y travaillent et qui le soutiennent ont bien comme citoyens engagés vocation à réfléchir sur la marche de notre société.
Richard Prasquier, président d’honneur du CRIF.