Tribune
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Publié le 7 Février 2014

Génocide rwandais: les dérobades d'un capitaine

Analyse de Thierry Oberlé publiée dans le Figaro du 6 février 2014

 

Pascal Simbikangwa, vu comme un baron du régime de l'époque par les organisations internationales de défense des droits de l'homme, comparaît devant la cour d'assises de Paris.

 

Le Président: «On vous appelait capitaine?» Pascal Simbikangwa: «Oui comme on dit capitaine Barril… ou général de Gaulle. Je n'étais plus militaire, mais dans l'armée on garde son grade éternellement, à vie.

- Vous avez été directeur du Service central de renseignement?, relance le Président.

- Je devais être en réalité au niveau d'un 6e directeur peut-être. J'étais un simple agent qui avait un titre de directeur.»

 

Poursuivi devant la cour d'assises de Paris pour complicité de génocide et de crime contre l'humanité, Pascal Simbikangwa esquive. L'étude des jugements rendus par le Tribunal pénal international du Rwanda lui a appris la navigation juridique dans les eaux glauques du génocide commis d'avril à juillet 1994 contre la minorité tutsie du Rwanda.

 

Arrêté en 2007 sur l'île de Mayotte, l'accusé a bien potassé son dossier. Assis dans une chaise roulante, il développe sa stratégie de défense dès l'interrogatoire sur son parcours personnel et professionnel sans attendre l'examen des faits qui lui valent sa place derrière les épaisses vitres du box des prévenus. Son français est précis. Il n'était ni un officier ni un patron d'un service secret.

 

Pour certaines organisations internationales, il aurait pu mettre fin à la violence s'il l'avait souhaité.

 

Il va même, lors du premier jour d'audience, tenter de semer le trouble sur son identité lorsqu'il doit s'expliquer sur le nom d'emprunt de David Safari Senyamuhara qu'il a utilisé pour obtenir des faux papiers. Il n'est pourtant pas encore question des cent jours durant lesquels 800 000 hommes, femmes et enfants ont été massacrés. Durant cette période, il aurait fourni des armes, mais aussi des conseils, des encouragements et des instructions aux assassins qui, à Kigali, la capitale, et dans la région de Gisenyi, ont tué à tour de bras. Ce qu'il nie de manière préventive. «Je n'ai pas participé à la fin de la guerre et au chaos», prévient-il… Lire la suite.