Tribune
|
Publié le 11 Janvier 2013

Les outils juridiques foisonnent pour sanctionner les Crimes de l’Iran

 

Manfred Gerstenfeld interviewe Irwin Cotler (photo)

 

« L’Iran d’Ahmadinejad – j’emploie ce terme pour le distinguer du peuple et des différents publics de l’Iran, qui sont les cibles d’une répression intérieure massive – représente un danger évident et constant contre la paix internationale et la sécurité, la stabilité régionale et du Moyen-Orient, et de plus en plus et de façon alarmante, pour son propre peuple.

 

 

Nous sommes les témoins, en ce qui concerne l’Iran d’Ahmadinedjad, de la convergence toxique de quatre types de menaces distincts, mais pourtant inter reliés : nucléaire, incitatif au génocide, terrorisme et de violations massives des droits de l’homme ».

 

Le Professeur Irwin Cotler est membre du Parlement canadien, représentant du Parti Libéral, Professeur émérite de Droit à l’Université Mc Gill, ancien ministre de la Justice et Procureur général du Canada. Il est coprésident du Groupe interparlementaire pour les Droits de l’Homme en Iran.

 

Cotler déclare : « L’Iran est en violation constante de toutes les interdictions relatives aux lois internationales, eu égard à son programme d’armement nucléaire. L’Iran soutient les meurtres en série, contre son propre peuple, de la part de Bashar al Assad. C’est aussi l’État parrain du terrorisme le plus influent au monde, qui assassine des innocents d’Argentine au Liban, en Afghanistan, jusqu’en Syrie. Qui plus est, il a le plus fort taux par habitant en matière d’exécutions sommaires de mineurs, à travers le monde entier.

En particulier, l’incitation à la haine et au génocide promulguée par l’état est persistante, très largement répandue et pernicieuse, et pourtant, on a prêté très peu d’attention à l’impératif d’y remédier sur le plan judiciaire. Un site internet affilié au Guide suprême Ali Khamenei a déclaré, en février, que l’Iran aurait raison de tuer tous les Juifs israéliens. Ce que les missiles de longue portée de Téhéran pourraient accomplir en neuf minutes, se vantait ce site internet. Khamenei, pour sa part, a désigné Israël comme « une tumeur cancéreuse qui doit être éradiquée ». Il a aussi déclaré qu’il existe une « Justification à tuer tous les Juifs et à annihiler Israël, et que c’est l’Iran qui doit en prendre la tête ». Comme en a conclu un rapport transpartisan du Parlement canadien, l’Iran a déjà commis le crime d’incitation au génocide condamné par les lois internationales.

 

Pourtant, toute une gamme de mesures est disponible si on veut combattre ce fléau. Les États membres signataires de la Convention de l’ONU sur le Génocide devraient logiquement porter plainte contre l’Iran – qui est aussi membre de la Convention- devant la Cour Pénale internationale. Les États membres devraient recourir du Conseil de Sécurité de l’ONU qu’il vote une résolution condamnant l’incitation de l’Iran au génocide et transmette le dossier devant la Cour Pénale Internationale, qui peut inculper Khamenei, Ahmadinedjad et leurs collaborateurs, comme ce fut le cas pour le Président soudanais Omar El-Béchir. Cette menace de poursuite devrait venir s’ajouter aux pressions diplomatiques et économiques préexistantes, destinées à dissuader le terrorisme et le développement d’armes nucléaires par Téhéran.

 

Dans la lutte iranienne contre la vague de terrorisme d’État, la Communauté internationale devrait tenir leurs auteurs pour comptables de ces actes. Sans quoi, une culture d’impunité continue à encourager le terrorisme lui-même. Tous les États ont la responsabilité d’employer tous les instruments à leur disposition pour faire face à l’agression terroriste iranienne. Ils comprennent, par exemple, l’accroissement des sanctions diplomatiques et économiques multilatérales ; la mobilisation des pressions politiques visant à isoler le régime iranien comme un paria parmi les nations ; la nomination et la mise au pilori des commanditaires iraniens et de leurs affidés du Hezbollah, afin de combattre le déni iranien de sa culpabilité et de traîner ces auteurs en justice.

 

Pour ne mentionner que quelques-unes parmi ces nombreuses autres mesures : les États devraient établir la liste des membres du Corps des Gardiens de la Révolution, une organisation qui est l’avant-garde, en tant qu’entité terroriste, de la campagne de terrorisme d’état, de la part de la République islamique. Une décision judiciaire argentine a conduit à l’émission de mandats d’arrêt par Interpol contre les auteurs et commanditaires des meurtres de beaucoup de diplomates israéliens et de Juifs à Buenos Aires. Ces mandats d’arrêt devraient être mis en application. Qui plus est, des poursuites civiles devraient être instruites, lorsqu’appropriées, contre l’Iran et ses agents terroristes, pour leur perpétration d’actes de terrorisme. Le principe de la juridiction universelle devrait être invoqué pour tenir les dirigeants de l’Iran comptables –sous l’inculpation de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.

 

En matière d’agressions systématiques et très répandues contre les droits de l’homme de son propre peuple, par l’Iran, les gouvernements, les parlementaires, les médias, les ONG, les chefs des Églises, les syndicats, les universitaires et tant d’autres, devraient révéler, démasquer et tenir l’Iran pour responsables de sa répression intérieure massive. À cet égard, le Sénateur américain Mark Kirk et moi avons instauré un groupe interparlementaire pour les Droits de l’homme en Iran. Notre groupe a initié le Programme global de Défense des Intérêts du Prisonnier politique iranien, appelant les députés internationaux à « adopter » un prisonnier politique et à créer une masse critique de défense des intérêts, au nom de ces prisonniers de conscience.

 

De plus, tous les états devraient faire des efforts importants pour soutenir directement les dissidents en finançant des programmes pour aider les activistes à mobiliser et contourner les censures électroniques. En supplément, nous devons mettre la pression sur les compagnies satellitaires qui diffusent la télévision d’état iranienne, alors que les autorités iraniennes utilisent leurs ondes, non seulement pour répandre leur propagande, mais pour télédiffuser autant des aveux obtenus sous la torture et montrer des procès truqués ».

 

Cotler conclut : « Ce n’est pas faute de remèdes – certains sont politiques et d’autres sont diplomatiques. D’autres encore sont d’ordre économique et judiciaire. Nous devons internationaliser les formes de défenses d’intérêts, et invoquer une masse critique de solutions intégrées pour lutter contre la masse critique de menaces inter- agissantes. Le silence et l’indifférence ne sont pas une option. Le moment d’agir, c’est maintenant ! ».

 

Le Dr. Manfred Gerstenfeld est membre du Conseil d’Administration du Centre des Affaires Publiques de Jérusalem, qu’il a présidé pendant 12 ans. Il a publié 20 ouvrages. Plusieurs d’entre eux traitent d’anti-israélisme et d’antisémitisme.

 

Adaptation : Marc Brzustowski.