Tribune
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Publié le 29 Mars 2013

Syrie et Iran : l’urgence

 

Par Yaacov Lappin

 

Loin des caméras et des fanfares, la course au nucléaire de l’Iran et le conflit syrien ont été évoqués par Barack Obama et Benjamin Netanyahu.

 

Le président Barack Obama est arrivé mercredi 20 mars à Jérusalem, mais, à n’en pas douter, Téhéran et Damas se sont également invités dans ses échanges avec le leadership israélien. Des deux, le dossier iranien semble particulièrement urgent. Le calendrier de la visite d’Obama n’a pas été choisi au hasard.

 

Il n’est que de se souvenir de l’intervention du Premier ministre Benjamin Netanyahu, en septembre 2012, à la tribune de l’ONU. Il y annonçait que Téhéran aurait acquis suffisamment d’uranium enrichi pour finaliser une bombe au printemps ou à l’été 2013 au plus tard. Puis Netanyahou avait réaffirmé que cette date constituait la ligne rouge pour l’Etat hébreu, celle qui signerait une intervention militaire.

 

Nous sommes sur le point de la franchir.

 

L’Iran possède un peu moins de 170 kilos d’uranium enrichi à 20 % (selon le rapport de l’AIEA). Et l’heure tourne. Téhéran n’a besoin que de 60 à 90 kilos d’uranium moyennement enrichi supplémentaires, pour être capable de passer très rapidement à la vitesse supérieure, à savoir le transformer en uranium enrichi. La République des Mollahs pourrait alors franchir le Rubicon et développer son armement nucléaire. Il suffirait pour cela que son guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, en donne l’ordre. Et telle semble bien être l’intention de l’Iran : une nouvelle génération de centrifugeuses vient d’être installée sur le site de Natanz, capable de produire de l’uranium enrichi 3 à 5 fois plus vite que les autres.

 

Par ailleurs, on ne peut ignorer l’échec de 4 rounds de négociations entre Téhéran et les puissances occidentales.

 

Ils n’auront servi qu’à faire gagner du temps au régime chiite.

 

Pire encore : lors des derniers pourparlers, au Kazakhstan le mois dernier, la communauté internationale a formulé 2 demandes clés, qui n’ont pas pour l’heure été entendues par le régime iranien. Le démantèlement du site de Fordow, dédié à l’enrichissement de l’uranium, d’une part, et l’abandon de 6 tonnes et demie d’uranium légèrement enrichi en sa possession, d’autre part.

 

Frappera seul ou pas

 

Les sanctions économiques et énergétiques pèsent lourdement sur la vie du pays sans pour autant geler ou infirmer l’inexorable avancée du régime vers le seuil nucléaire. Sans oublier que l’Iran interdit l’accès du site de Parchin aux inspecteurs de l’AIEA. Site sur lequel des missiles nucléaires de longue portée seraient fabriqués.

 

Il n’est pas impossible que le président américain ait fait le voyage pour convaincre Israël de s’abstenir d’une offensive militaire ciblée et unilatérale contre les sites iraniens. Mais pour l’obtenir, il faudrait qu’il expose clairement sa propre ligne rouge sur ce dossier. Si celle-ci se trouve nettement au-delà de celle de Netanyahou, nul doute que ce dernier n’hésitera pas à faire part de sa détermination à agir seul.

 

Car Bibi ne peut trahir l’éthique qui règne au coeur de la doctrine de défense du pays ; le destin du peuple juif ne doit jamais dépendre des autres. Quand bien même il s’agirait de son meilleur allié.

 

En revanche, si les lignes rouges des deux alliés se rejoignent, Netanyahou pourrait encore trouver la patience de laisser Obama donner une dernière chance aux sanctions, dans l’espoir de les voir infléchir la détermination des dirigeants iraniens, avant d’en recourir aux armes. A n’en pas douter cette rencontre au sommet aura été des plus cruciales. A l’heure qu’il est, il devrait être clair pour les deux chefs d’Etat dans quel contexte Israël frappera seul ou en tandem avec son allié américain.

 

Syrie, menace chimique et embrasement régional

 

L’escalade de la terreur en Syrie aura été le second dossier brûlant abordé. Pour preuve, les derniers développements : des rapports non confirmés laissent cependant penser que les armes chimiques ont d’ores et déjà été utilisées dans la région d’Alep. La Syrie est un champ de bataille où s’affrontent des forces gouvernementales et rebelles. Mais ces enjeux dépassent le cadre de la guerre civile pour un conflit plus vaste entre l’Iran chiite et l’islam sunnite.

 

D’un côté de la ligne de front, l’Iran maintient le régime Assad sous perfusion, en injectant des fonds et des armes au régime alaouite et en infiltrant des centaines de combattants du Hezbollah chiite, venus du Liban voisin pour s’inviter sur le théâtre des opérations. En face, les Emirats arabes financent et arment les rebelles.

 

Conséquence : une menace sur le Liban qui risque à tout moment de basculer dans le conflit. Dans cette poudrière, Israël cherche à contenir le chaos et regarde aussi du côté de son allié américain pour obtenir des garanties : en cas d’attaque chimique, et au cas où des armes sophistiquées tomberaient entre les mains du Hezbollah.