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Harris trace un parallèle audacieux entre l’exode des protestants irlandais du sud de l’île pendant la période dite des Troubles (1918-1923) qui a abouti à la proclamation de la République d’Irlande, et l’extermination du judaïsme européen par les nazis. Bien sûr, il ne compare pas les deux événements, mais il trouve un soupçon de ressemblance entre les traumatismes dont les deux communautés ont souffert, chacune après sa propre expérience d’après-guerre, et les déclins démographiques qui s’en sont suivis, par émigration ou assimilation. Or, si la situation des protestants de l’Eire s’est stabilisée et si leur communauté « ne cessera d’exister que par leur propre choix », tel ne serait pas le cas du judaïsme européen, assailli qu’il est par la « troisième menace » que font peser sur lui l’immigration musulmane et l’antisémitisme européen que leur rage a réveillé. Ainsi, les descendants des survivants de la Shoah ne se sentent plus en sécurité sur le sol européen. D’où la sombre prédiction dont l’article se fait l’écho, et dont les nombres déclinants de la communauté juive française seraient l’illustration.
J’ignore d’où Harris tient ses chiffres – il y aurait eu 535 000 juifs en France en 1980 et guère plus de 500 000 aujourd’hui ; les statistiques ethno-communautaires sont aléatoires en France, pays qui refuse de compter les hommes en fonction de leur origine. Soit. Ce qui me paraît plus contestable est le pronostic lui-même. Aux arguments que j’opposais à l’article publié dans Haaretz, notamment l’absence en France d’une véritable culture antisémite et la mobilisation des autorités de l’État contre l’antisémitisme, je voudrais en ajouter deux autres, qui valent pour l’Europe entière… Lire la suite.