Dov Maimon

Directeur de recherche au Jewish People Policy Institute (Jérusalem)

UN RÉCIT NARRATIF QUI EMPÊCHE LA RÉSOLUTION DU CONFLIT ISRAÉLO-PALESTINIEN

04 November 2015 | 1617 vue(s)
Catégorie(s) :
Israël

Chronique de Bruno Halioua, diffusée sur Radio J, lundi 12 février à 9h20.

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Conflit israélo palestinien, traitement médiatique, crise de l'information : analyse

Présenter les Palestiniens comme les indigènes et les Juifs comme des Croisés non seulement ne correspond pas au vécu des uns et des autres mais encore justifie une guerre totale pour mettre fin au dernier bastion du colonialisme européen en terre arabe et empêche l'émergence d'une solution politique négociée entre deux peuples qui se perçoivent autochtones.
 
Malgré les violences qui continuent et qui vont encore durer un moment, je reste, dans la durée, profondément optimiste pour l'avenir des relations judéo-arabes. 
 
Dans le souffle des précédents égyptiens et jordaniens, je crois que si l'état d’Israël est suffisamment fort et puissant, et que les arabes sentent que les juifs sont là pour rester, leurs dirigeants se résoudront à chercher d'autres cibles partagées comme ciment identificateur. 
Les réactions pro-israéliennes qu’on commence à entendre chez des personnalités arabes israéliennes, jordaniennes, saoudiennes et koweitiennes abondent dans ce sens. Malgré la rue arabe et les représailles des fondamentalistes qui les menacent, ces personnalités osent s’afficher et dire ce que des millions d’arabes ont toujours su, à savoir que les juifs sont en train de rentrer chez eux et que ce n’est pas avec des couteaux qu’on va les faire partir du seul endroit où ils sont enfin chez eux. 
 
Le récit narratif inventé par les Soviétiques dans les années 50, relayé par les partis communistes européens, et adopté par l’OLP pour piéger les Européens dans un chantage affectif qui les rend responsables du malheur des pauvres palestiniens ne tient tout simplement plus la route. Ce narratif binaire justifie et sustente la guerre totale pour mettre fin au dernier bastion du colonialisme européen en terre arabe. 
 
Présenter les palestiniens comme les indigènes et les juifs comme des croisés ne correspond pas au vécu des uns et des autres. 70% des israéliens ont au moins un grand parent né dans la région et sont chez eux au Moyen Orient. La majorité des familles "palestiniennes" ont émigré dans le pays au début du 20ème siècle. Les études des codes génétiques confirment cette donnée fondamentale. La proximité génétique entre les juifs des différentes diasporas (à l'exception des yéménites et des éthiopiens) est de 99.9% et vient d'ici. Si on replace les mouvements migratoires dans un contexte  non plus israélo-palestinien mais israélo-arabe, on a eu entre 1948 et 1967 un mouvement migratoire dans lequel un million de réfugiés sémites juifs des pays arabes sont venus en Israel et un nombre similaire de sémites arabes est partie de ce pays. Un dramatique mais classique mouvement de vases communicants entre tribus sémitiques qui sont globalement restées dans le même espace géographique. Ce scénario de tribulations inter-ethniques s'est répété à la création de chaque état-nation du continent africain et moyen oriental. La piste de positionner le conflit comme israélo-palestinien est venue d'une bonne volonté mais ne peut pas laisser émerger une solution négociée. 
 
LE RÉCIT NARRATIF CAPABLE DE RENDRE LA PAIX POSSIBLE. 
On est plutôt ici dans un combat entre deux tribus sémites, deux clans, qui se bagarrent pour la souveraineté politique, chaque parcelle de territoire et l’accès aux ressources. Les solidarités ethniques sont primordiales et cela se voit à chaque tentative de poignardage. Les gens sont solidaires, on est dans la survie et clivages ethniques sont très forts. 
Si les européens comprennent qu’on est dans un combat inter-ethnique entre des tribus sémitiques et que le narratif OLP n'est qu'une version tronquée d'une réalité plus complexe, la situation médiatique anti-israélienne peut se renverser - même en Europe - ce qui bien entendu facilitera le retour au calme. C’est possible dans le contexte de la violence islamiste généralisée.
Un peu de perspective historique n'est peut-être pas inutile pour comprendre ce conflit inter-clanique. 
On est sorti du Sinaï, les arabes ont pris ce retrait pour une faiblesse et trois ans plus tard ont déclenché la première intifada. 
On est sorti du Liban on a eu droit à quelques mois plus tard à la seconde intifada. 
On est sorti de Gaza, on a eu droit à la deuxième guerre du Liban et à diverses provocations du Hamas. 
Au Proche Orient, on respecte la force et les vainqueurs. Et en contrepartie, la volonté de concession est perçue comme une faiblesse. C'est lié à "la culture de la honte et de l'honneur", à "la virilité ardente" et à d'autres caractéristiques culturelles héritées des tribus sémitiques.