Blog du Crif - "Les adieux au Général" de Judith Cohen Solal et Jonathan Hayoun, ou quand le temps se fige

09 November 2020 | 193 vue(s)
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Opinion

Comme chaque été, de nombreux juifs ont décidé de quitter la France pour s’installer en Israël. On parle de 8000 à 10 000 pour l’ensemble de l’année 2015. J’ai moi-même fait ce choix en 2013  et pourtant j’ai, plus que jamais, envie de parler de ceux qui restent. 

Dov Maimon rejoint les auteurs du Blog du Crif !

Ce dernier détaille ici les multiples racines de l’antisémitisme, qui a explosé en France à partir de l’année 2000 et la première « intifada ». Et qui s’est fortement aggravé tout au long de l’année dernière. Marc Knobel évoque notamment l’origine idéologique – soulignée et étudiée par le philosophe et chercheur Pierre-André Tagguief – d’un antisémitisme qui découle d’un antisionisme extrême, lui-même alimenté depuis longtemps par les tenants de l’islamisme radical. Extrême gauche et extrême droite française en passant par « Dieudonné and Co » sont aussi, historiquement et actuellement, parmi les premiers diffuseurs de la haine antisémite en France. Description et analyse en huit points.

Partout en France, des crayons, des stylos et des feutres ont été brandis, les seules armes du courage et de la liberté contre d'autres armes qui tuent, qui souillent, qui meurtrissent à tout jamais.

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"Les adieux au Général" de Judith Cohen Solal et Jonathan Hayoun, ou quand  le temps se fige  

 

Les « baby boomers » savent où ils étaient et ce qu’ils faisaient quand ils ont appris que l’homme avait marché sur la lune, , ou bien, avec les plus jeunes , quand ils ont su que les « twin towers » étaient attaquées. L’annonce de la mort du Général de Gaulle , survenue le 9 novembre 1970 et connue le lendemain, a provoqué la même sidération tant chez les puissants d’alors que dans l’opinion publique. Non que l’événement ait pu être considéré comme une surprise : Charles de Gaulle avait 80 ans lorsqu’il est décédé, un bel âge à l’époque pour un homme recru d’épreuves. Néanmoins, même retiré du pouvoir depuis 18 mois, « le Général » semblait immortel et appelé à jouer éternellement la statue du Commandeur . Il avait beau avoir déclaré lors d’une conférence de presse « Rassurez-vous, je finirai bien par mourir » , on finissait par ne plus y croire. 

 Sa disparition, à la suite d’une rupture d’anévrisme, donne lieu à une série de réactions que décrivent très finement Judith Cohen Solal et Jonathan Hayoun.

Si la famille, Yvonne de Gaulle en tête, met immédiatement en branle les dernières volontés du Général, celles-ci se heurtent au désir de Georges Pompidou, nouveau président de la République, d’organiser des obsèques nationales. Les relations devenues difficiles entre de Gaulle et son successeur depuis mai 1968 n’arrangent rien, et le livre décrit bien les frictions incessantes entre l’Elysee et les proches du grand disparu. L’ouvrage nous révèle aussi bien les réactions attristées et émues des Français que celle des grands de ce monde, de la Reine Elisabeth au Président Richard Nixon en passant par David Ben Gourion. On découvre également les réactions quelques peu alambiquées du Parti Communiste, les larmes de Romain Gary, l’attitude respectueuse des habitants de Colombey avec qui le Général avait finalement peu de relations, ou les émotions des Compagnons de la Libération venus à plus de 300 au cimetière du petit village. Le contraste avec la cérémonie à Notre-Dame, tenue sans la famille mais en présence de 80 chefs d’Etats ou de gouvernements, est saisissant . Les deux auteurs rendent très bien compte de tout ce qui passe entre le 9 et le 12 novembre 1970, et on a , sous les yeux, les réactions, à la fois très humaines et fort différentes, d’un Malraux , d’un Michel Debre ou d’un Maurice Couve de Murville. Une belle plongée, bien écrite, dans une Histoire encore proche et déjà lointaine.

 
Gérard Unger 

« Les adieux au Général » , de Judith Cohen Solal et Jonathan Hayoun, chez Robert Laffont.