Tribune
|
Publié le 28 Août 2013

La pédagogie d’une guerre

Par Françoise Fressoz, éditorialiste au monde

 

Il y avait les retraites, le budget, la Sécurité sociale. Autant d’arbitrages impossibles à rendre en cette rentrée où les prélèvements obligatoires explosent les compteurs.

 

Il y a désormais en plus la Syrie. La Syrie qui pourrait devenir la deuxième grande épreuve militaire du quinquennat, mais qui ne se ressemble en rien à la première.

Lorsque, le 11 janvier 2013, le président de la République avait lancé les troupes françaises au Mali pour barrer la route aux djihadistes, il l’avait fait dans un quasi-consensus national.

 

Seules quelques voix, telle celle de Dominique de Villepin, s’étaient élevées pour pointer le risque "d’une guerre à l’aveuglette, sans appui régional solide". Elles s’étaient vite éteintes, au fur et à mesure de la progression des forces françaises.

 

Et François Hollande était sorti renforcé de l’épreuve. Il y avait gagné quelques-uns des attributs présidentiels qui lui avaient jusqu’alors fait défaut : la capacité à décider, à expliquer et à faire régner une discipline quasi militaire au sein du gouvernement.

 

Cette fois, ce sera beaucoup plus compliqué. À peine le président de la République a-t-il déclaré que « la France est prête à punir ceux qui ont pris la décision infâme de gazer des innocents", que les mises en garde pleuvent. De toutes parts.

 

De Jean-Luc Mélenchon, qui qualifie "d’erreur gigantesque" une éventuelle intervention militaire de la France derrière les États-Unis ; des communistes qui, hostiles eux aussi à la guerre, réclament vite un débat parlementaire ;

 

De l’extrême droite, qui dénonce une "diplomatie de cowboys", du souverainiste Nicolas Dupont-Aignan, qui invoque le précédent irakien et souligne que "partout où les Occidentaux ont tenté d'imposer par la force leur démocratie, cela s'est terminé en fiasco".

 

Elles viennent aussi du centriste François Bayrou, qui lance "un appel pressant à la prudence". La monstruosité de l’attaque chimique qui aurait fait plus d’un millier de morts à Damas le 21 août ne suffit pas à le convaincre. Comme beaucoup d’autres, le président du Modem redoute l’escalade et la déstabilisation de toute la région.

 

La guerre en Syrie est tout sauf une fabrique à consensus. C’est pour François Hollande une vraie prise de risque, une nouvelle peur à traiter et à surmonter au moment où le président  clame sa confiance dans le  retour la croissance.

 

Alors que les Bourses s’effondrent par crainte du conflit,  la vérité apparaît toute crue : la France n’est pas seule au monde. Début d'une grande pédagogie ?