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La haute représentante européenne, Catherine Ashton, qui parle au nom des Six, espérait parvenir à une rencontre avec l'officiel iranien, qui aurait pu se tenir à Istanbul, avant le 21 décembre. Les chances de voir ce scénario se réaliser s'amenuisent, car Téhéran n'a toujours pas répondu à l'invitation. Les diplomates parlent désormais d'une relance des pourparlers à la mi-janvier.
En Israël, où des élections législatives sont prévues le 22 janvier, le vice-premier ministre, Moshé Yaalon, a relevé que les efforts diplomatiques étaient "en effet relancés", ajoutant que "des préparatifs, principalement américains pour le moment", se poursuivaient, "pour le cas où la force militaire devrait être employée" un jour.
Attitude de défiance de téhéran
La rhétorique de défiance du pouvoir iranien a repris crescendo, alors que des messages plus conciliants avaient été adressés à l'administration Obama cet automne. Des "durs" du régime se disaient ouverts à l'idée de dialogue bilatéral avec les Etats-Unis, signe qu'un tabou serait levé. Le chef de l'Agence atomique nationale iranienne, Fereydoun Abbasi-Davani, vient cependant de déclarer que l'Iran continuerait de produire "de l'uranium enrichi à 20 % aussi longtemps que cela est requis" –une matière qui rapproche considérablement les scientifiques iraniens des niveaux "militaires" nécessaires à l'éventuelle fabrication d'un engin atomique.
La nouvelle offre des Six ne s'écarte pas, dans ses grandes lignes, de ce qui avait déjà été proposé à l'Iran lors de discussions antérieures, tenues, entre avril et juin, à Istanbul, Bagdad et Moscou. Il s'agit d'une simple "réactualisation", tenant compte de la progression des travaux nucléaires iraniens, indiquent des diplomates. L'Iran se verrait prié de cesser la production d'uranium à 20 %, d'évacuer son stock de cette matière et de fermer son site de Fordow, profondément creusé dans une montagne où seules des bombes ultraperformantes américaines seraient en mesure de le détruire.
En échange, un léger allégement de sanctions serait proposé, "sans toucher au cœur du dispositif" de l'embargo pétrolier ni de l'endiguement financier du pays, précise-t-on de source occidentale. Le groupe des Six s'en tient ainsi à une ligne stricte, sans laisser entrevoir de "créativité" diplomatique particulière.
Diplomaties à géométrie variable
Mais des nuances se glissent aussi entre les chancelleries, semble-t-il. Côté britannique et allemand, certains auraient ainsi suggéré qu'il serait utile de réfléchir à une forme d'acceptation de l'enrichissement d'uranium. Mais sans aller jusqu'à satisfaire la demande iranienne centrale, celle de la "reconnaissance" formelle d'un "droit" à mener cette activité, dont les résolutions de l'ONU demandent depuis 2006 la "suspension complète et vérifiable". L'administration Obama serait d'ailleurs ferme sur ce point, alors que certains de ses partenaires européens l'avaient auparavant sentie plus disposée à des "ouvertures".
La crainte de frappes israéliennes s'étant estompée, du moins jusqu'à l'été 2013, Washington aurait moins l'obsession de brandir une percée diplomatique rapide. La transformation par l'Iran, en septembre, d'environ 100 kg d'uranium enrichi à 20 % en combustible pour un réacteur de recherche, a fait baisser d'un cran la tension.
Avant la partie délicate qui s'annonce, chacun évite de dévoiler ses cartes. L'équipe Obama pourrait peut-être jouer sur la dureté des Six afin de mieux se prévaloir d'une certaine souplesse dans des contacts bilatéraux discrets avec les Iraniens. Les efforts de diplomatie parallèle semblent en tout cas intenses, en attendant qu'une nouvelle équipe de politique étrangère se mette en place à Washington.
Mais parmi les connaisseurs du dossier, rares sont les optimistes. Le calendrier demeure serré. L'Iran entrera, à partir du mois de mars, en campagne électorale pour sa présidentielle, prévue en juin, période peu propice pour dégager un consensus entre les factions qui s'affrontent dans la galaxie du pouvoir.
Chute de "50 %" des revenus du pétrole
La principale mesure incitative pour les Iraniens serait une levée plus franche de certaines sanctions, alors qu'un membre du gouvernement, à Téhéran, a parlé ces jours-ci d'une chute de "50 %" des revenus tirés du pétrole. L'administration Obama fait valoir qu'au plan des sanctions, elle a les mains liées, en raison du contrôle exercé par le Congrès américain. Elle a suggéré discrètement que l'Union européenne aurait, elle, plus de latitude pour atténuer les mesures coercitives, s'il fallait à un moment donné lâcher du lest.
Un accord des Vingt-Sept n'est cependant pas chose acquise. Paris, en particulier, se méfie de tout abandon hâtif de précieux leviers économiques sur les Iraniens.
L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), dont le chef des inspecteurs, Hermann Nackaerts, s'est rendu en Iran le 13 décembre, n'a toujours pas pu accéder au site controversé de Parchine, où des recherches liées à des explosifs de haute intensité, relatifs à une bombe nucléaire, auraient été menées par le passé.
A Téhéran, des diplomates étrangers décrivent le degré de confiance –ou de déni– des responsables iraniens, aux prises avec une montée des pénuries liées aux sanctions, mais "persuadés que l'Occident est faible, et qu'il n'y a aucune raison de faire des concessions".
Ankara appelle Téhéran à faire pression sur la Syrie
Le ministre turc des affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, a appelé, mardi 18 décembre, l'Iran à "envoyer des messages clairs" au régime de Damas pour le pousser à mettre fin aux violences contre sa population. "Au lieu de critiquer le système [de missiles antimissiles Patriot dont la Turquie se dote], l'Iran devrait dire "stop" au régime syrien qui a, de manière continue, opprimé son propre peuple et provoqué la Turquie par des violations de [sa] frontière", a dit M. Davutoglu. "Il est temps, désormais, d'envoyer ces messages clairs au régime syrien", a-t-il ajouté. L'Iran s'est inquiété du déploiement de Patriot sur le territoire turc, dans le cadre de l'OTAN.