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Les explosions de Boston ont ravivé les mauvais souvenirs du 11 septembre 2001. Ressurgissaient aussi les raccourcis sur la menace d'une al-Qaïda globale et les réflexes de la « guerre contre la terreur », à cette nuance près que, cette fois-ci, la piste « domestique » n'était pas complètement écartée...
En France, il y a eu Merah
Les affaires Timothy McVeigh (Oklahoma City - 1995), Anders Breivik (Norvège - 2011) ou Mohamed Merah (Toulouse - 2012) refaisaient surface avec leur imparable constat : les poseurs de bombes sont des poseurs de questions ! Celles-ci s'adressant aux dysfonctionnements de nos sociétés en proie à une déglingue économique, sociale et morale aggravée. Certes, le FBI a rapidement neutralisé les deux auteurs des explosions, identifiés grâce aux vidéos de surveillance. Le profil de ces frères d'origine tchétchène - parfaitement intégrés, selon l'enquête de voisinage - rappelle celui des activistes britanniques d'origine pakistanaise, arrêtés dernièrement alors qu'ils préparaient une série d'attentats. Le profil de ces nouveaux terroristes, baptisés « homegrown », est symptomatique d'une menace interne, qui constitue un phénomène de plus en plus répandu dans nos sociétés. À l'image des serial-killers ou des braqueurs d'école, ces « homegrowns » agissent de manière solitaire, sans soutien d'une mouvance organisée et de relais internationaux. Avec Internet, ils fabriquent leurs armes, choisissent leurs cibles et font leurs repérages en bricolant un sens improbable à leurs projets mortifères.
La hantise de tous les services spéciaux
Même si, pour l'instant en France, cette évolution concerne quelques dizaines de jeunes gens borderline, cette menace interne est devenue la hantise de tous les services spéciaux. Un officier français de renseignement explique : « Jusqu'à la fin de la Guerre froide, nous avons connu une première vague de terrorisme soutenue par des États ; une deuxième vague a correspondu à la mouvance al-Qaïda du début des années 90 jusqu'aux attentats du 11 septembre ; une troisième période a vu une extrême délocalisation de cette nébuleuse jusqu'à ces dernières années, avec la floraison de groupes autoproclamant leur filiation avec une al-Qaïda introuvable. Désormais, nous sommes au seuil d'une quatrième période qui verra la multiplication d'attaques tout aussi spectaculaires. Mais celles-ci ne seront plus revendiquées, ni rattachées à aucun référent idéologique. Difficile alors d'anticiper quoi que ce soit... » Les seules réponses sécuritaires, voire militaires, ne seront plus suffisantes.
Et les armes ?
Enfin, l'autre leçon de Boston, c'est de voir une société à nouveau tétanisée par le terrorisme et la violence, mais qui continue obstinément à ne voir aucun lien entre cette régression sauvage et son attachement à l'acquisition d'armes individuelles, acquisition considérée comme la première des libertés...
Le FBI sous le feu des critiques
Le FBI attendait toujours hier d'interroger le suspect de l'attentat de Boston, Djokhar Tsarnaev, le jeune Américain d'origine tchétchène hospitalisé dans un état grave, à l'issue d'une chasse à l'homme. Tant que Djokhar Tsarnaev n'est pas en état de parler, l'enquête se concentre sur le parcours de son frère Tamerlan, 26 ans, tué jeudi soir lors d'une course-poursuite avec la police. Les enquêteurs s'intéressent notamment aux six mois qu'il a passés l'an dernier au Daguestan et en Tchétchénie. « Il n'a fait que rendre visite à des membres de la famille », selon son père Anzor. En 2012, les autorités russes avaient demandé au FBI de faire des vérifications sur Tamerlan, fondées « sur une information selon laquelle il était un partisan de l'islam radical et un fervent croyant, et qu'il avait drastiquement changé en 2010 », a précisé la police fédérale, qui, faute de trouver des détails compromettants, avait relâché sa vigilance. Le FBI s'est, du coup, retrouvé, hier, sous le feu des critiques pour ne pas avoir continué à surveiller Tamerlan Tsarnaev à son retour à Boston en juillet 2012. « Il y a beaucoup de questions qui méritent des réponses », a tonné le sénateur démocrate Charles Schumer. « Pourquoi n'a-t-il pas été interrogé à son retour ? Et que s'est-il passé en Tchétchénie qui puisse l'avoir radicalisé ? », s'est-il demandé. Hier, les rebelles du Caucase du Nord russe ont nié toute implication dans l'attentat de Boston.