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Ils envisagent que la politique étrangère va continuer à se polariser sur une influence américaine qui se raccroche au monde musulman – aussi bien sunnite que chi’ite – l’Iran tirant les wagons, en tant que première puissance nucléaire islamique chi’ite et alors que les Frères Musulmans sont devenus les parrains des nations sunnites arabes qu’ils ont mis sous leur férule. Pour Israël, cette politique se traduit froidement par l’appui américain aux deux pires ennemis idéologiques irréductibles auxquels il ait eu à faire face au cours de ses 63 ans d’existence : l’Iran, dont les dirigeants appellent ouvertement à l’anéantissement d’Israël – même à la tribune de l’ONU – bien que ce but ne soit réalisable qu’à travers une agression nucléaire ; et les Frères Musulmans hostiles.
Il y a seulement quatre jours, un responsable important du Ministère de la Défense, Amos Gilead a désigné le gouvernement égyptien dirigé par les Frères Musulmans comme représentant une « dictature impitoyable ». Après des années de relations étroites avec les dirigeants égyptiens et leurs chefs militaires, Gilead a déclaré : « Il n’y a aucun contact officiel entre les échelons supérieurs de l’Égypte et le gouvernement israélien, et je ne pense pas qu’il y en aura à l’avenir ».
Selon les sources du renseignement militaire de Debkafile, Gilead a juste offert un aperçu sur un horizon encore plus sombre, dont les dirigeants israéliens discutent à huis clos : ils craignent que le second mandat d’Obama n’ouvre toute grande la porte à un Iran chi’ite doté de l’arme nucléaire, savoir-faire qui tomberait très vite entre les mains des Frères Musulmans sunnites, en commençant par l’Égypte, dans une tentative conjointe pour faire disparaître l’État juif.*
Avant de rejeter ce scénario comme une simple exagération paranoïaque, cela vaut la peine de prendre connaissance d’un sondage d’opinion réalisé en Égypte en août dernier de cette année, par l’Institut de Recherche Greenberg, Quinlan & Rosner. Il avait pour objectif de prospecter ce que devenaient les taux de popularité de l’Iran, après la prise de pouvoir des Frères Musulmans au Caire.
Stanley Greenberg, qui est proche des dirigeants du Parti démocrate, a récemment été engagé par le Parti travailliste israélien en tant que stratège de haut vol pour la campagne électorale du 22 janvier 2013.
Ce sondeur américain a trouvé que 61% des Égyptiens interrogés approuvent le programme nucléaire iranien, qu’on peut rapporter aux 30 % qui le désapprouvent. En 2009, les configurations comparables se situaient à 40% pour et 34% contre l’Iran nucléaire.
Le même sondage fait en 2012 trouvait que 65% des Égyptiens sont favorables à la reprise des relations avec Téhéran, réduites depuis de longues années, contre 30% qui s’y opposent.
La discorde non dissimulée entre Barack Obama et Binyamin Netanyahou est habituellement présentée comme résultant de leur brouille au sujet d‘une action militaire visant à faire avorter le programme nucléaire de l’Iran. C’est à la fois simplificateur et trompeur. Leurs différences sont d’une bien plus vaste envergure : Netanyahou et la plupart des autres dirigeants israéliens contestent les objectifs signés de la main d’Obama au Moyen-Orient, consistant à mettre les Frères Musulmans au pouvoir en Égypte, en Tunisie et en Libye – et, au bout du compte, en Syrie – en les présentant comme un mouvement modéré avec lequel l’Amérique peut faire des affaires et conduire une politique moyen-orientale équilibrée.
Ce but a mis le feu aux poudres de la Révolte Arabe – dit : “Le Printemps”- qui s’est déclenchée en décembre 2011. Elle a condamné Israël à devoir vivre dans un environnement islamiste de plus en plus resserré autour de ses frontières, le pire restant à venir : le dernier écart sera comblé lorsque les Frères Musulmans accéderont au pouvoir à Damas et, finiront par poser leur dévolu sur la Jordanie, comme tremplin vers l’Arabie Saoudite.
À chaque fois qu’il est confronté à cette éventualité, Obama réplique invariablement qu’il a fait plus que n’importe quel autre président américain pour la sécurité d’Israël et qu’il a augmenté la coopération militaire et en matière de renseignement entre les États-Unis et Israël à un niveau jamais atteint.
C’est irréfutable, mais, selon le point de vue des experts du renseignement militaire de Debkafile, cela ne correspond qu’à un aspect particulier du tableau global : tout en renforçant militairement Israël, le Président américain a aussi renforcé ses pires ennemis au Moyen-Orient et amélioré leur capacité de frapper aux fondations même de la sécurité nationale d’Israël. La seule émergence d’une République islamique dotée de l’arme atomique, ce qu’Israël pourrait bientôt désespérer d’être en mesure d’empêcher, annulerait toute l’assistance militaire ou en termes de renseignements que l’Administration Obama a transférés à l’État juif, afin de garantir sa survie.
Aucun dirigeant israélien, politique ou militaire, ne souhaite aller plus loin que ne l’a fait Amos Gilead, ni admettre publiquement qu’Israël est pris en étau, par une double contrainte : il est obligé d’envisager des mesures concrètes pour mettre un terme au programme nucléaire iranien, alors qu’au même moment, il doit se tenir prêt à relever le défi égyptien sur le Sinaï, qui a échappé au contrôle du Caire et où la situation se détériore pour devenir un tremplin terroriste sans foi ni loi, prêt à se retourner aussi bien contre n’importe lequel de ces deux pays.
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Adaptation : Marc Brzustowski