Du mauvais usage du "copier-coller" amalgamant Juifs, Chrétiens et Musulmans, par Marc Eisenberg

 
Par Marc Eisenberg, publié dans le Blog du Huffington Post le 17 octobre 2016
 
Etre accusé d'"islamophobie" est une crainte que partagent tous nos politiques quelle que soit leur inclination, surtout en période électorale.
 
Alors, quand ils ne peuvent plus se taire ni nier l'évidence, et qu'il leur faut condamner fermement le fanatisme islamiste, ils s'abritent pour faire bonne mesure derrière le bon vieux procédé du "copier-coller" en critiquant de manière comparable l'une des deux autres religions monothéistes (voire les deux), et le tour est joué!
 
Un problème de voile à l'école? Et voilà que l'on interdit avec lui la kippa – mais qui a été dupe? – ainsi que la croix portée au cou par nos jeunes têtes blondes.
 
Les conditions parfois barbares de l'abattage de moutons lors de la célébration de l'Aïd el Kebir choquent les esprits? Et voilà notre Premier ministre de l'époque, François Fillon, déclarant qu'il faudrait également interdire le rituel juif de la "chehita", fondateur des règles de la cacherout depuis 2000 ans.
 
Mais dans une interview donnée au journal Marianne (numéro du 30 septembre 2016) Emmanuel Macron a montré que l'exercice du "copier-coller" n'est pas toujours simple:
 
Notre ancien ministre de l'Economie s'est en effet ému de ces "écoles confessionnelles qui enseignent la haine de la République, professent des enseignements essentiellement en arabe ou ailleurs enseignent la Torah plus que les savoirs fondamentaux".
 
En réalité, Monsieur Macron, bien que choqués par l'ambiguïté de vos propos, nous n'avons jamais vraiment cru que vous pensiez qu'on enseignait la haine de la République dans les écoles juives. Ce serait totalement insensé.
 
Créée en 1860, l'Alliance israélite universelle dirige un réseau d'écoles juives en France et dans le monde, destiné à plus de 50.000 élèves chaque année. Attachée à la République française, l'Alliance, et avec elle la quasi-totalité des écoles juives de France, défend totalement ses valeurs –parmi lesquelles les Droits de l'homme– ainsi qu'un judaïsme authentique et éclairé.
 
Elle y enseigne la prière qui doit être dite chaque semaine dans les synagogues à l'occasion de l'office du chabbath:
 
"Que les rayons de Ta lumière éclairent ceux qui président aux destinées de l'Etat... Que la France vive heureuse et prospère, qu'elle soit forte et grande par l'Union et la Concorde... Que la France jouisse d'une paix durable et conserve son rang glorieux au milieu des nations."
 
Depuis vous vous êtes expliqué, précisant que vos propos ne visaient que des établissements très minoritaires et avez réaffirmé que l'enseignement juif s'inscrit dans un cadre citoyen et de qualité.
 
Pour marquer votre soutien aux écoles juives, vous vous êtes rendu lundi 10 octobre au groupe scolaire de l'Alliance israélite universelle des Pavillons-Sous-Bois (93), en présence du Grand Rabbin de France, Haïm Korsia. Nous y avons été très sensibles, merci.
 
Profitons de cette polémique, aujourd'hui close, pour faire œuvre de pédagogie puisque ces propos auraient pu être tenus par de nombreux hommes politiques.
 
Par le procédé du "copier-coller", ils auraient pu se laisser aller à la fausse symétrie suivante: dans les écoles islamiques on enseigne la haine de la République, pendant que dans les écoles juives on enseigne plus la Torah que les savoirs fondamentaux.
 
Mais peut-on réellement mettre sur un même plan le fait d'enseigner "plus la Torah que les savoirs fondamentaux" et celui d'enseigner "la haine de la République"?... Lire l'intégralité