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Publié le 3 Août 2018

BestOf Mémoire - Retour sur la cérémonie nationale commémorant la rafle du Vel d'Hiv

La cérémonie nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites et d'hommage aux Justes de France, commémorant la rafle du Vel’ d’Hiv’ a eu lieu dimanche 22 juillet, en présence du Premier ministre Edouard Philippe.

"Il y a un temps pour tout, un temps pour tuer et un temps pour guérir. Un temps pour pleurer et un temps pour rire" a déclaré hier le Président du Crif, Francis Kalifat rappelant les paroles du Roi Salomon, avant d'ajouter qu'il y avait aussi un temps pour se souvenir.

Dimanche 22 juillet, nous étions des centaines, sur le quai de Grenelle, à nous souvenir. A nous souvenir de ces journées et ces nuits du mois de juillet 1942. A nous souvenir de ces familles parisiennes, réveillées au petit matin par les gendarmes français. A nous souvenir des 3900 enfants apeurés, criant pour rester près de leurs mères.

A l'occasion d'une cérémonie organisée conjointement par le Crif et le Ministère des Armées, la France a rendu hommage aux 13 000 hommes, femmes et enfants, arrêtés au cours de la tristement célèbre rafle du Vel d'Hiv. 

La commémoration a débuté au 10 boulevard de Grenelle, devant la plaque rendant hommage aux victimes du Vel d'Hiv, devant laquelle se sont recueillis Edouard Philippe, Premier ministre et Geneviève Darrieussecq, Secrétaire d’État auprès de la ministre des armées. Ils étaient accompagnés de Madame Olivia Grégoire et Messieurs Francis Kalifat, Serge Klarsfeld, Raphaël Esrail, David de Rothschild.

Ils se sont ensuite rendus dans le Jardin du Souvenir, inauguré l'an dernier par Serge Klarsfeld, avant de se dirigier vers le square des martyrs juifs du vélodrome d'hiver où la cérémonie publique avait lieu.

Après les prières dirigées par le Grand Rabbin Alain Goldmann et le Grand Rabbin Olivier Kaufmann, la Marseillaise a rententi, trouvant un écho particulier dans les coeurs des nombreux anciens déportés présents ce jour-là. Plusieurs dépôts de gerbes de fleurs ont suivi, ajoutant à la solennité du moment. Parmi eux, Monsieur Joël Mergui, Président du Consistoire central et du Consistoire de Paris ; Monsieur Serge Klarsfeld, Président des Fils et Filles des déportés juifs de France ; Monsieur Raphaël Esrail, Président de l’Union des déportés d'Auschwitz ; Monsieur David de Rotschild, Président de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah ; Monsieur Francis Kalifat, Président du Conseil Représentatif de Institutions juives de France (Crif) ; Monsieur Jérémy Redler, Conseiller régional d’Ile de France et Monsieur Edouard Philippe, Premier ministre.

Monsieur Raphaël Esrail a ensuite pris la parole, suivi de Monsieur Serge Klarsfeld.
 
Puis, timidement mais sûrement, Serge Hoffman s'est approché du pupitre et a livré le récit poignant de ce qu'il a vécu ces 16 et 17 juillet 1942. Rappelant le geste de sa mère qui sépare d'elle lui et son frère, il parle de lui comme d'un miraculé. Aujourd'hui encore, il ne peut s'expliquer d'être vivant. Dans un hommage saisissant rendu aux enfants du Vel d'Hiv, Serge Hoffman, tout en pudeur, a convoqué les souvenirs douloureux de ces jours de rafle. 
 
N'ayant pas pu se rendre à la cérémonie, le président du Comité français pour Yad Vashem, Pierre-François Veil, avait tenu à adresser un message, lu par Madame Korenbaum, déléguée régionale du Comité français Yad Vashem. Benjamin Duhamel, descendant de Juste, a ensuite livré un discours très applaudi, rendant hommage à son arrière-grand-père et à son acte heroïque de sauvetage, qui lui vaut d'être reconnu Juste parmi les Nations. 
 
La cérémonie s'est poursuivie par une allocution très attendue du Président du Crif, Francis Kalifat. Au-delà de la question de la mémoire, qui doit désormais être entretenue alors que la plupart des témoins directs de la Shoah ont disparu, il a rappelé, inquiet, le problème des violences antisémites : "les Français juifs représentent moins de 1% de la population et à eux seuls, ils concentrent près de 35% de la totalité des actes racistes commis en France". 
Francis Kalifat a également profité de la cérémonie pour rendre un ultime hommage à Claude Lanzmann et Simone Veil.
Enfin, le Premier ministre Edouard Philippe a livré un discours saisissant, en débutant son allocution par la lecture d'une lettre d'une petite fille à son père : "Cher papa, on nous emmène au Vélodrome d’Hiver, mais faut pas nous écrire maintenant parce que c’est pas sûr qu’on restera là. Je t’embrasse bien fort et maman aussi. Ta petite fille qui pense toujours à toi".
 
Edouard Philippe a souligné la responsabilité de la France dans la rafle du Vel d'hiv de juillet 1942. "Durant ces jours sombres, la France a trahi", a-t-il notamment déclaré.

Le Premier ministre français a également annoncé un renforcement des services dédiés à la restitution aux Juifs des biens culturels spoliés pendant l'Occupation. "Il est un domaine dans lequel nous devons faire mieux, celui de la restitution des biens culturels", a déclaré le chef du gouvernement avant de poursuivre : "J'ai décidé de doter la CIVS (Commission pour l'indemnisation des victimes de spoliations) d'une nouvelle compétence, celle de pouvoir recommander la restitution de ces œuvres, ou à défaut d'indemniser les personnes concernées".

Rappelant son plan de lutte contre le racisme et l'antisémitisme lancé en mars, Edouard Philippe a aussi réitéré sa "volonté absolue de modifier le droit français comme le droit européen pour supprimer les contenus haineux sur Internet, pour en démasquer et en punir les auteurs". Les conclusions d'une mission confiée à l'enseignant franco-algérien Karim Amellal, à la députée LREM Laetitia Avia et au vice-président du Crif Gil Taïeb sont vivement attendues.

A la fin de la cérémonie, chacun a repris sa voiture, le métro ou est rentré chez lui à pieds. Chacun a pu entendre les rires des petits parisiens se fondre dans le murmure de la ville. Chacun avait quelque part dans le coeur les noms d'autres petits parisiens, réveillés à l'aube un matin de juillet et dont il ne reste aujourd'hui que la mémoire tenace.

Crédit photo : Alain Azria

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