Tribune
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Publié le 31 Mars 2014

« Le syndrome du repli nationaliste, avec ses pires relents racistes et antisémites, m’inquiète… »

Un entretien avec Jean-Philippe Moinet, fondateur de la Revue civique. Propos recueillis par Marc Knobel, Chercheur et Directeur des Études du CRIF

Jean-Philippe Moinet, vous êtes le fondateur de la Revue Civique. Pourriez-vous nous rappeler qui vous êtes et quelle a été votre carrière ?

Auteur, chargé d’enseignements et conseil éditorial, j’ai fondé la Revue Civique il y a quelques années notamment à partir du constat que « le vivre ensemble » dans les valeurs de la République n’est plus une évidence et qu’il nécessite, en France, une réflexion renouvelée et des actions renforcées.

Je suis né à Oran, en 1961. Fils d’officier – mon père était Saint-cyrien de l’immédiat après-guerre, démissionnaire de l’Armée, en 1962, du fait de l’abandon des Harkis - j’ai passé toute mon enfance et mon adolescence dans le Nord de la France. J’ai été bercé par un double folklore : pied-noir et chti ! J’ai fait des études de Droit Public jusqu’en Maîtrise (Master), j’ai été ensuite diplômé de Sciences Po Paris (section « Politique, Economique et Sociale ») avant d’intégrer pendant quelques mois la « Fondation Communication Demain », section journalisme. J’ai passé une quinzaine d’années ensuite dans les médias : 12 ans (bien plus que ce que je pouvais l’imaginer en y entrant comme simple stagiaire) au Figaro. A l’époque où le premier quotidien national (en tirage) était dirigé par Franz-Olivier Giesbert, qui m’a beaucoup appris sur ce métier de journaliste. Cette rencontre a été déterminante, dans ce journal qui « végétait » un peu. Giesbert s’est appuyé sur quelques jeunes pour tenter de rénover ce titre et le hasard m’a mis sur son chemin. A l’âge de 27 ans, j’ai été nommé « grand reporter ». Même si j’étais malheureusement souvent cantonné au petit espace hexagonal (et trop souvent parisien) de la politique intérieure, j’ai quand même pu couvrir quelques grands événements internationaux, comme la première Guerre du Golfe. Et aller en Afghanistan aussi, à la fin du régime prosoviétique qui se tournait comme une girouette vers l’Occident et la France, au début des années 90, régime et pays tout entier déjà menacé par la folie et la furie des talibans. Quand, bien plus tard, au printemps 2001, j’ai eu le plaisir et l’honneur de rencontrer le Commandant Massoud, en visite à Paris, mes souvenirs de l’Afghanistan et de ses convulsions politico-ethniques étaient encore très présents en moi. Le choc, pour moi, était d’autant plus fort quand, le 9 septembre 2001, le Commandant Massoud a été assassiné dans un attentat commis par des talibans déguisés en cameramen et bien sûr quand, deux jours plus tard, les attentats du 11 septembre ont ébranlé les Etats-Unis et le monde. 

Entre temps, j’étais passé à La Chaîne Parlementaire (LCP) : j’étais de la première équipe, celle qui a lancé, en 2000, cette nouvelle chaîne de télévision, à mission civique s’il en est. J’y étais responsable de plusieurs émissions dont l’une était consacrée aux ouvrages et que j’avais appelées : « Aux livres, Citoyens ! » On ne se refait pas.

Ensuite, début 2002, j’ai amorcé une période de distanciation médiatique, avec quelques années passées dans le secteur institutionnel, qui m’a beaucoup appris aussi sur « la chose publique » : le Médiateur de la République de l’époque, Bernard Stasi, m’a demandé d’être son conseiller, pour une revue - « Médialogue » - de cette institution, publication consacrée aux enjeux de la médiation. A partir de là, j’ai pu voir venir les travaux de la Commission nationale sur la Laïcité, présidée par le même Stasi, mise en place sur décision du Président de la République de l’époque, Jacques Chirac. C’était évidemment passionnant. En 2003, la Présidente du Haut Conseil à l’intégration, la philosophe Blandine Kriegel, m’a demandé de devenir le Secrétaire général de cette instance de conseil consacrée aux enjeux de l’intégration des étrangers en France. Cela m’a occupé plus de trois ans. Pendant lesquels j’ai eu aussi deux missions officielles importantes, l’une (à la demande du Ministre de la Cohésion Sociale de l’époque, Jean-Louis Borloo) sur le problème du racisme et de l’antisémitisme : l’année 2004 voyait, dans une tendance qui remontait à l’année 2000, une hausse inquiétante d’actes et de violences racistes, et antisémites particulièrement ; j’ai alors proposé un « plan d’action civique » composé d’une quarantaine de propositions, dont certains restent malheureusement toujours d’actualité…

En 2006, sur ma proposition, j’ai remis un rapport officiel au Ministre déléguée à la Cohésion sociale (publié par la Documentation française celui-là) sur les cérémonies d’accueil dans la citoyenneté française (la nationalité). Le temps a passé, et les chantiers de l’intégration n’ayant pas été fortement développés ensuite, j’ai quitté le secteur institutionnel et eu deux nouveaux engagements professionnels en 2009 : le premier a été de professionnaliser l’édition et la diffusion de la Revue Civique ; le second a consisté à créer un Master universitaire, « Les métiers de l’information et de la communication », que j’ai lancé et dirigé à la Faculté des Sciences sociales et économiques de l’Institut catholique de Paris. Il m’arrive aussi, professionnellement, de mener une activité de conseil, par exemple pour la conception et/ou de débats publics, ou encore pour des projets d’édition (publications ou livres).

Vous avez notamment publié plusieurs rapports, dont « Célébrer la bienvenue dans la République Française », Documentation Française (site, rubrique «rapports publics»; 2006). De quoi s’agissait-il ?

En 2006, dans la foulée de la fameuse « crise des banlieues », plusieurs choses m’étonnaient concernant les faiblesses des politiques d’intégration républicaine et notamment le fait qu’aucune réflexion, au niveau de l’Etat, ne concernait ce moment pourtant crucial où les étrangers deviennent citoyens Français, par voie de naturalisation (ils sont environ 120 000 par an) ou par voie du mariage. Ce moment symbolique permettant d’accueillir les nouveaux venus dans la Citoyenneté française et de promouvoir activement les principes de la République – et en particulier la Démocratie et la Laïcité – était alors, selon moi, un rendez-vous civique manqué. Il m’apparaissait incroyable même de s’en tenir à une entrée « fortuite » dans la Citoyenneté républicaine française, simplement par voie bureaucratique, en allant au guichet chercher sa carte nationale d’identité comme on va à la Poste ! Pour des dizaines de milliers de nouveaux Français, c’était bien sûr bien décevant. Et pour la République, c’était une occasion de « rencontre » ratée.

J’ai donc évalué les bonnes pratiques en ce domaine, en France à partir d’expériences d’élus locaux (de gauche comme de droite) et, à l’étranger, les pratiques nord américaines notamment (américaines et canadiennes) qui offraient des champs d’expériences utiles. Et j’ai préconisé une généralisation de ces cérémonies, « à la française », alliant convivialité et solennité, message d’accueil et message républicain. On m’a fait comprendre qu’un premier format, minimum, serait préférable plutôt qu’un guide pratique détaillé, que je préconisais pour l’organisation de ces cérémonies partout sur le territoire national. Mais il y a eu un net progrès à cette période : depuis 2006, les cérémonies d’accueil dans la Citoyenneté, qui n’étaient mises en oeuvre auparavant que par des élus ou des Préfets qui le souhaitaient, ont été généralisées dans toute la France, par la voie des Préfets, les élus gardant la faculté d’en faire aussi, en complément dans leur localité.

Question : La Revue civique, c’est quoi au juste ? Un carrefour d’idées et d’expériences ? Et quels sont les thèmes majeurs que vous traitez ?

Oui, c’est une revue « carrefour », d’idées, d’expériences, sur plusieurs enjeux d’actualité et thèmes majeurs. Quatre axes majeurs caractérisent les sujets de la Revue Civique, qui approfondit des questions en contrepoint de l’actualité immédiate, souvent effervescente et qui ne donne pas toujours les bonnes clés de compréhension des phénomènes contemporains. Ces quatre axes majeurs sont :

-le « lien citoyen-vie publique », la rénovation de la démocratie dans une période de « fracture civique », de défiances en tous genres, de protestations récupérées, instrumentalisées même, par les extrémismes. Cet axe renvoie aussi, naturellement, à la promotion des valeurs de la République – Liberté, Egalité, Fraternité, Démocratie et Laïcité – et aussi à la promotion de la « Mémoire collective », qui puise dans l’Histoire sa source, qui nous permet de comprendre le présent et de mieux appréhender l’avenir. C’est l’axe majeur de la Revue Civique, qui a noué, sur ces thèmes-là précisément, des partenariats éditoriaux très positifs, en particulier avec les Etudes du CRIF, et avec le Collège des Bernardins .

-la responsabilité des médias : la Revue Civique apprécie évoquer, avec des acteurs et responsables médiatiques de premier plan, l’enjeu de responsabilité des médias. C’est un thème peu évoqué dans les médias, ceux-ci considérant que leur priorité doit d’abord aller au traitement de l’actualité, et non à la manière dont ce traitement est effectué. Du coup, comme le sujet est d’importance, cela donne aussi à la Revue Civique l’occasion de questionner les acteurs médiatiques sur leur expérience professionnelle, sur leur responsabilité, sociale et civique.

-le « civisme d’entreprise » aussi, est mis en perspective dans la Revue Civique. Qu’il s’agisse des enjeux de la responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE) ou du Développement durable, nous apprécions évoquer aussi ce point de rencontre important entre intérêts particuliers d’une communauté de vie qui se nomme l’entreprise et des sujets d’intérêt général, comme l’égalité des chances, la promotion de l’égalité hommes femmes, l’environnement ou encore la cause d’utilité publique qu’est l’insertion, la formation et l’emploi.

-l’Europe et la mondialisation : nous nous efforçons aussi, dans chaque numéro de la Revue Civique, d’ouvrir les fenêtres nationales en traitant des sujets européens. Les prochaines élections européennes vont nous rappeler que tous les grands sujets, politiques et civiques, ont en fait, même si nos hommes et femmes politiques ne le disent pas assez, une dimension européenne, voire mondiale. C’est pourquoi nous nous attachons à rappeler ces dimensions, à travers de contributeurs, qui sont autant (même plus) des acteurs de la société civile (personnalités culturelles, associatives, entrepreneuriales) qu’à des acteurs politiques.

Pourriez-vous nous présenter quelques-uns de vos partenaires et rédacteurs ?

Au-delà des partenaires intellectuels et éditoriaux cités, les Etudes du CRIF et le Collège des Bernardins, nous avons noué de nombreux liens d’échanges avec des structures très diverses, associatives notamment, qui participent en France à la promotion de l’esprit d’engagement positif pour la collectivité, comme « Unis-Cité », qui a importé des Etats-Unis le « service civique » des jeunes, promu par cette association, avant d’être porté par l’Etat et l’Agence du service civique. Les partenaires entreprises, qui soutiennent la Revue Civique, sont par exemple Véolia Environnement, le groupe ManPower, la SNCF, la banque Palatine (mobilisée pour les « ETI », entreprises à taille intermédiaire, notamment), la Croix-Rouge française sur les enjeux humanitaires, ou encore GDF-Suez et La France Mutualiste (qui œuvre dans le domaine de la Mémoire par exemple). Et la revue, qui est entourée d’un comité de parrainage, d’un conseil scientifique et d’un conseil éditorial, qui en garantit à la fois la pluralité et l’indépendance, est soutenue depuis 2010 par trois cabinets (les cabinets de conseils, Weave et Vertone, le cabinet d’avocats Wilhelm) et une agence de publicité et de communication (l’agence W) qui a apporté à la revue, en mécénat de compétence, un site Internet qui s’active d’ailleurs, depuis six mois environ : www.revuecivique.eu. Ce site nous permet, en complément d’articles ou entretiens que nous avons publiés dans la revue « papier », d’aborder aussi des sujets d’actualité sur « le vivre ensemble », la lutte contre le racisme et l’antisémitisme notamment, problème redevenu malheureusement de préoccupation par exemple avec l’affaire Dieudonné. Nous avons eu plaisir, et nous aurons honneur, à apporter notre pierre à l’édifice de vigilance et de combativité républicaine sur ce sujet.

En février 2010, vous aviez publié pour le 17ème numéro des Etudes du CRIF, un texte important : « Interculturalité et citoyenneté : ambiguïtés et devoirs d’initiatives. » Pourriez-vous nous rappeler ce dont il était question dans ce texte et les concepts et/ou idées phares que vous aviez proposé ?

Cette question de l’interculturalité – le lien entre les diverses sphères culturelles et religieuses et la place des « églises » dans la société  – est une question à la fois complexe et importante, spécifiquement peut-être pour un pays comme la France, attaché à la Laïcité, principe inscrit et protégé par notre Constitution.

Je pense, et je le rappelais dans ce numéro des Etudes du CRIF, que la France se distingue positivement de bien d’autres pays en délimitant assez strictement cette place des sphères religieuses dans la société et en séparant les « églises » de l’Etat, qui doit porter le principe d’impartialité en matière religieuse. Cela ne veut pas dire que l’Etat ou la France doive verser dans l’anticléricalisme, car la Laïcité n’est pas la négation du fait religieux, contrairement à ce que veulent faire croire les  fondamentalistes islamiques par exemple, qui n’ont de cesse de caricaturer la France et notre République en ce domaine.

L’Etat et la France ne sont bien sûr pas insensibles aux cultes, l’Etat se doit même d’organiser des relations positives avec les cultes, facilitant précisément la reconnaissance des principes de la République et une reconnaissance mutuelle des diverses obédiences, cultuelles ou spirituelles. Ma contribution aux Etudes du CRIF évoquait aussi les ambiguïtés et les dangers de ceux qui, aux franges radicales des religions et, pour parler clair, dans les courants radicaux d’un Islam prosélyte et militant, font de la croyance religieuse un moyen d’accentuer leur emprise sur la sphère sociale et les citoyens. J’en déduisais non seulement un principe, là encore, de vigilance républicaine, mais un « devoir d’initiatives », de la part des acteurs de la puissance publique, mais aussi de la part des acteurs de la société civile et de la part des responsables des cultes eux-mêmes qui sont très importants, aussi, pour émettre vers leurs « fidèles » des messages à la fois de respect des autres (y compris des non-croyants), mais aussi de respect des principes républicains et de lutte contre l’extrémisme. C’est pourquoi j’évoquais notamment les expériences positives permettant de former les Imams à la promotion des valeurs de la République (expérience menée, à titre expérimental depuis 2008 et pour un public malheureusement trop réduit en nombre de cadres cultuels religieux, par l’Institut catholique de Paris). Car je pense que les responsables religieux aussi, et du culte musulman aussi, doivent être portés par ce « devoir d’intervention », quand les intolérances intégristes sévissent et mettent à mal l’esprit de la République. Dans cet enjeu d’interculturalité, le segment de mot « inter » (le lien) est peut-être le plus important ; car faire lien, entre des univers religieux qui peuvent du fait des extrémistes entrer en guerre, c’est renforcer la paix civile et la cohésion sociale. En France, comme ailleurs en Europe (sans parler du reste du monde), nos valeurs démocratiques sont en jeu par cet impératif d’interculturalité : établir un front commun des religions (et des cercles de pensées non croyantes) est l’une des meilleures façons de faire face aux assauts des extrémismes religieux.

Dans la France des années 2014, qu’est-ce qui vous inquiète ?

Le syndrome du repli nationaliste, avec ses pires relents racistes et antisémites. En période de crise, on peut comprendre les inquiétudes, les souffrances même. Mais la France, comparée à un nombre considérable de pays sur notre planète, a aussi une chance inouïe et des atouts formidables. Les Français sont plus pessimistes sur leur avenir que les Afghans ! Est-ce normal ?

Ce qui m’inquiète fortement, encore beaucoup plus aujourd’hui qu’il y a encore six mois, c’est qu’une série d’ingrédients et de dérèglements sont réunis - crise économique et sociale, crise morale et culturelle (au sens perte de repères), crise politique et civique - et favorisent l’expansion de ce que j’appelle le « national-populisme tendance xénophobe », derrière lequel se cache (plus ou moins d’ailleurs, et de moins en moins…) les idéologues et démagogues de l’extrémisme, du racisme, de l’antisémitisme et du révisionnisme, qui colporte des violences, non seulement « intellectuelle » ou verbale, mais qui peuvent être physiques. La séquence Dieudonné, en fin d’année 2013 et début 2014, a été de ce point vue sidérante. 20 grandes salles de spectacle, dans nos bonnes villes de province, étaient prêtes à être remplies, attirées par un soi-disant humoriste devenu depuis des années le propagandiste de la haine. Le pire est que ces salles n’auraient pas été remplies totalement par des antisémites ou des révisionnistes, mais par des gens, nombreux, prêts à rire de l’immonde, sans le moindre respect, par exemple pour les victimes des crimes nazis ou leur famille, enfants ou petits-enfants.

Ce qui m’inquiète c’est que nous entrons dans une époque, où la mémoire vivante des victimes va s’éteindre et que les défenses immunitaires de la République faiblissent, aussi par l’extension d’une non-culture historique et d’une non-culture tout court. Comme l’a si bien dit Elie Wiesel, le contraire de l’amour, ce n’est pas forcément la haine, c’est l’indifférence. La montée du Front National en France (et de partis similaires en Europe) est inquiétante, car, même si nous ne sommes pas dans un contexte totalement comparable aux années 30, des positionnements ou des « idées » les plus archaïques, qu’on croyait d’un autre âge, reviennent en force à la surface du débat public, porté par le croisement de trois grandes crises évoquées : économique, culturelle et politique.

Y a-t-il des raisons d’espérer et de croire en la politique ?

Pour être franc, il faut vraiment se forcer ! L’espoir est peut-être que les défis de la crise, et même de l’extrémisme, qui menacent la cohésion sociale et nationale républicaine, provoquent à terme un sursaut, une évolution accélérée. Mais je pense que cette perspective peut aussi passer, on peut le craindre, par des moments très tendus et difficiles, y compris prochainement en 2014. Le climat est tel, l’instrumentalisation de toutes les protestations est telle aujourd’hui, qu’on peut malheureusement craindre des secousses dans l’édifice démocratique et républicain français. Par exemple à l’horizon des prochaines élections européennes, s’il se confirme, comme l’ont indiqué des études, que le FN devienne le premier parti de France, en nombre de voix exprimées, à ce scrutin à la proportionnelle intégrale (à un tour) qui peut, sur le sujet européen, syncrétiser toutes les protections et refléter tous les replis dits « identitaires ».

L’espoir réside donc dans un sursaut républicain, qui peut provenir autant d’une profonde refondation des partis de gouvernement (qui se réformerait aux idées, à l’avenir, à autre chose que leurs combinaisons ou combines habituelles) que des actions, de vigilance et d’engagements, d’acteurs de la société civile qui, de leur côté, peuvent, à la mesure de la crise du politique, prendre un rôle inattendu dans la restauration du lien civique, social et républicain. Mais c’est là un scénario optimiste.

La Revue Civique est maintenant partenaire des Etudes du CRIF. Comment imaginez-vous et ressentez-vous ce partenariat avec notre institution ?

L’échange de contenus, entre la Revue Civique et les Etudes du CRIF, me semble à la fois simple, naturel, et de première importance. Sur les enjeux de Mémoire, de rénovation de la démocratie, de vigilance contre tous les types d’intolérance et d’extrémisme, le lien d’échanges réguliers instauré me semble, au-delà des pages de la Revue Civique, de grande utilité publique. Ce partenariat procure  aussi en moi un sentiment de fierté. La communauté juive de France et la République ont été, dans l’histoire, intimement liée. Que le CRIF, né en 1944 dans les pires épreuves traversées par les Juifs et la République, ait noué 70 ans après un lien, intellectuel et éditorial, notamment avec la Revue Civique est pour moi – mais aussi les personnalités du comité de parrainage, du conseil scientifique et du conseil éditorial qui m’entourent – plus qu’une fierté en fait : ce lien partenarial est comme une mission, de grand honneur.