Tribune
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Publié le 24 Janvier 2013

Itinéraire de vie: Rabbin, guerrier et faiseur de paix

 

Propos recueillis par Liat Collins pour l’édition du Jérusalem Post du 23 janvier 2013.

 

Dans une interview exclusive, le Grand Rabbin émérite Shéar Yashouv Cohen évoque son existence et les événements de ces huit dernières décennies.

 

On pourrait dire que c’est en 1948 que Shéar Yashouv Cohen a été nommé Grand Rabbin pour la première fois. À l’époque, il a 20 ans et il est incarcéré en Jordanie, dans un camp de prisonniers de guerre. Le commandant du camp est venu personnellement dans sa tente pour l’informer qu’il sera désormais responsable des besoins religieux des quelque 600 détenus. Aujourd’hui, Shéar Yashouv Cohen n’a pas oublié la phrase alors entendue en arabe, et qu’il répète à présent dans cette même langue, qu’il parle couramment avec l’accent de Jérusalem. Une surprise de la part de ce rabbin en costume noir et à la barbe grise… qui nous en réserve beaucoup d’autres.

 

Nous nous rencontrons par une belle journée de novembre dans son modeste bureau du conseil religieux de Haïfa.

 

Depuis 1975 et jusqu’en 2011, Cohen a été le Grand Rabbin ashkénaze de la ville, et il est toujours considéré comme son Grand Rabbin émérite. « Si je n’avais pas été prisonnier de guerre, je ne serais jamais devenu Grand Rabbin », affirme-t-il.

 

C’est le maire adjoint de Haïfa, Yossef Blustein, emprisonné dans le même camp que lui, qui l’a en effet recommandé pour ce poste. Voir Cohen gérer la population très diversifiée du camp l’a impressionné. Car il y avait toutes sortes d’individus parmi les prisonniers de guerre qu’ils côtoyaient là-bas : membres de la très laïque Hashomer Hatzaïr, membres du Bné Akiva, ultra-orthodoxes de Breslev… « Avec toutes ces opinions différentes, ce n’était pas facile », reconnaît Cohen.

 

Bien qu’il vive et travaille à Haïfa, il se considère toujours comme un habitant de Jérusalem, où il a gardé un appartement. « J’y vais dès que j’ai une permission », confie-t- il, malicieux. Le titre de citoyen d’honneur de la ville de Haïfa, reçu à l’occasion de son 80e anniversaire, ne l’empêche pas de se présenter comme un « Ish Yeroushalayim ».

 

Au nom du grand-père et du prophète

 

Il faut dire que l’extraordinaire histoire de sa vie suit celle de la capitale de l’État juif. Sa biographie vient seulement d’être écrite – « ce n’est pas moi qui ai lancé cette idée », s’insurge-t-il, « et cela m’a même mis un peu en colère » –, mais son histoire a déjà inspiré beaucoup de monde.

 

Son nom complet est Eliyahou Yossef Shéar Yashouv Cohen – « les gens pensent, à tort, que Shéar Yashouv est un surnom ». Yossef est le nom de son grand-père, Shéar Yashouv exprime le désir de revenir à la fois sur la terre d’Israël et à la religion. Le nom de Eliyahou a été ajouté à la suite d’une grave maladie, contractée à l’âge de 3 ans.

 

Eliyahou, c’est le prophète Élie. Cohen fait remarquer que, le jour où ce nom lui a été donné, ses parents étaient loin de se douter qu’il deviendrait Grand Rabbin de Haïfa, la ville du prophète. Ils ont choisi « Élie » parce que ses premiers mots, avant Aba et Ima, ont été « ‘Yahou ‘Navi », lorsqu’il a chanté « Eliyahou Hanavi » après la Havdala, un samedi soir.

 

Les murs de son bureau sont ornés de photographies des plus grandes autorités rabbiniques de l’époque moderne, depuis le rabbin Avraham Itzhak Kook et son fils le rabbin Tzvi Yehouda Kook, avec lequel il était très ami, jusqu’au Rebbe de Loubavitch, qui, pour échapper au régime communiste, s’est caché chez le grand-père maternel de Shéar Yashouv Cohen. Il y a aussi, bien entendu, des photographies de son père, le rabbin David Cohen, « le Nazir de Jérusalem ».

 

Cohen est un descendant de 18e génération d’une famille de rabbins et de sommités de la Torah. Sa mère, Sarah Etkin, figurait parmi les fondateurs d’une organisation religieuse qui allait devenir le mouvement Emounah. Il a beau avoir 85 ans, sa voix se charge de respect et d’une indéniable affection lorsqu’il parle de ses parents.

 

Son père et sa mère, qui étaient cousins, ont été la première génération de la famille à monter en Israël. « Ils sont restés fiancés 12 ans avant de se marier sur la terre d’Israël », raconte-t-il. Ils se sont rencontrés en Russie, mais le père part étudier en Allemagne, où il se retrouve bloqué par la Première Guerre mondiale, puis à cause de la révolution russe. Il réussit finalement à fuir vers la Suisse, mais partir en Israël avant la création de l’État n’est pas si simple. C’est le rabbin Avraham Itzhak Kook (le grand Rav Kook) qui l’y aidera en l’invitant à participer à la transformation de sa Yeshiva de Jérusalem en une institution plus scolaire.

 

« Mes parents se sont restés fidèles pendant 12 ans ! », s’extasie Cohen. « Le mariage s’est tenu chez le Rav Kook, à Jérusalem. Et je pourrais dire que je suis moi-même né dans sa maison. »

 

Ni vin, ni viande, ni poisson

 

Les contraintes d’une courte interview nous empêchent de nous appesantir sur la signification du mot « nazir », que Maïmonide assimile à celui de « prophète ». Tout comme les « Nazirites » des temps bibliques, tels Samson et Samuel, le Nazir de Jérusalem et sa famille ne buvaient pas de vin, ne portaient pas de cuir, ne mangeaient pas de viande et ne se coupaient jamais les cheveux. « C’était une façon d’atteindre un plus haut degré de spiritualité », explique Cohen.

 

Il parsème la conversation de citations de la Torah et de rabbins allant des Tannaïm au talmudiste américain Joseph B. Soloveitchik, et semble également informé de ce qui se passe en dehors du monde religieux.

 

« Pour Harav Hanazir (son père), le judaïsme n’est pas fondé sur la vue, mais sur l’ouïe intérieure… Perfectionner notre oreille intérieure est l’un des plus hauts niveaux que l’on puisse atteindre et être un Nazirite (avec l’abstinence que cela implique) fait partie du processus de perfectionnement », affirme-t-il.

 

Shéar Yashouv Cohen a grandi sans jamais se couper les cheveux et en ne portant que des chaussures de toile.

 

Aujourd’hui encore, il ne boit ni vin ni jus de raisin et ne mange ni viande ni poisson, par respect pour la sainteté de la vie. Il n’a commencé à porter des chaussures en cuir qu’après avoir été blessé à la jambe.

 

Les changements dans sa pratique religieuse ne sont intervenus qu’avec la guerre d’Indépendance, lorsque le jeune Cohen devient membre de la Brit Hahashmonaïm (l’Alliance Hasmonéenne), « la branche religieuse du Beitar, affiliée au Lehi (Groupe Stern) et à l’IZL (Irgoun Zvaï Leumi) », explique-t-il. « Ce n’est pas très pratique de faire partie d’un mouvement clandestin lorsqu’on a les cheveux longs. »

Combiner études et armée : une Mitsva

 

A l’âge de 12 ans, en présence d’un Beit Din (tribunal rabbinique) particulier, composé de rabbins de Jérusalem qui se réunissent chez lui, il avait endossé le mode de vie nazirite, mais sans le « neder » (l’engagement). Il a 16 ans lorsqu’il quitte cette voie (là encore, en présence d’un tribunal spécial) pour entrer dans la résistance clandestine.

 

« On nous apprenait à combattre pour la terre d’Israël tout en recherchant l’unité. Le seul endroit où les 3 mouvements clandestins, la Haganah, le Lehi et l’IZL ont coopéré, c’est dans le quartier juif de la Vieille Ville de Jérusalem », raconte Cohen.

 

Lui-même fait partie de la Brigade Moriah, un groupe d’étudiants de Yeshiva qui se portent volontaires pour défendre le quartier juif. Leur chef appartient à la Haganah, et ses bras droits, au Lehi et à l’IZL.

 

Les Britanniques ayant fermé la Vieille Ville et le quartier juif, il faut trouver un moyen de s’introduire à l’intérieur des murailles. Cohen le fait en se dissimulant sous des couvertures, à l’arrière d’un camion d’approvisionnement.

 

Dans le quartier juif, ses camarades et lui sont chaleureusement accueillis. On leur fournit un appartement où ils étudient 8 heures par jour, montent la garde 8 heures et dorment le reste du temps. « On peut dire que c’était le modèle des Yeshivot hesder bien avant que ce système ne soit officiellement instauré », commente-t-il avec une évidente satisfaction.

 

Cohen a servi dans Tsahal pendant 7 ans et a atteint le rang de lieutenant-colonel. Il paraît presque nostalgique à l’évocation de l’époque où il était Grand Rabbin de l’armée de l’air et portait l’uniforme. « Pour moi, combiner études religieuses et service militaire, c’est accomplir une Mitsva de la Torah », affirme-t-il.

 

La question des femmes soldates lui apparaît, en revanche, comme « délicate » : selon lui, beaucoup de jeunes femmes ne sont pas faites pour la structure même du service et de l’autorité militaires. « Je suis en faveur du shirout léoumi (service civil), et je suis favorable au service militaire pour les jeunes femmes dont la personnalité s’y prête. » Il précise avec fierté que sa fille unique, Eliraz, a atteint le grade de capitaine dans Tsahal, où elle a servi dans le secteur de l’éducation. Quant à ses six petits-enfants, garçons et filles, ils ont tous accompli leur service militaire.

 

Grâce à une blessure à la jambe…

 

Naomi, la femme de Cohen, est née aux États-Unis. Elle aussi vient d’une famille illustre : c’est la fille du Dr Hayim Shimshon (Herbert S.) Goldstein, décisionnaire rabbinique et longtemps président, entre autres, de l’Union des communautés juives orthodoxes d’Amérique. C’est aussi la petite-fille du philanthrope Harry Fischel. Elle est docteur en philosophie et a enseigné dans les universités de Tel- Aviv, de Bar-Ilan et de Haïfa.

 

Au cours des combats dans la Vieille Ville, Cohen est gravement blessé à la jambe, ce qui va le contraindre à boiter à vie. C’est là aussi qu’il est fait prisonnier, avec d’autres combattants juifs, des employés de l’usine d’électricité de Naharaïm et des habitants du Goush Etzion, quand celui-ci tombe entre les mains de soldats jordaniens et des forces de la légion arabe. Il sera détenu comme prisonnier de guerre pendant sept mois, dans le camp désertique d’Um el-Jamal (la Mère du chameau). Sur un ordre exprès du roi de Jordanie Abdoullah Ier, il n’est fait aucun mal aux captifs.

 

Les prisonniers des Syriens ou des Égyptiens n’ont pas eu la même chance.

 

Plus tard, Cohen apprendra que sa nomination officielle comme rabbin du camp, réalisée sous les auspices de la Croix Rouge et qui lui donne droit à un certain confort, a été négociée par Moshé Dayan avec le souverain hachémite. Sa blessure à la jambe fait de lui l’un des premiers prisonniers à être relâchés.

 

Techniquement, Tsahal l’a enrôlé juste après sa capture, dans l’espoir que le statut de militaire le protège, selon la Convention de Genève.

 

À la signature du traité de paix avec la Jordanie, en octobre 1994, Itzhak Rabin invite Cohen à réciter des psaumes.

 

« J’ai choisi : “Je lèverai mes yeux vers les collines, d’où me viendra l’aide. L’aide me viendra du Dieu qui a créé le Ciel et la Terre…” » Plus tard, Rabin le présentera au roi Hussein, petit-fils d’Abdoullah.

 

Puis Cohen fera partie d’une délégation d’anciens prisonniers qui iront visiter le camp où ils ont été détenus. « Mais il n’en restait rien, à part les latrines. C’était la seule indication de l’emplacement du camp. »

 

« On peut être juif sans être “dati” »

 

En 1967, Cohen, alors conseiller municipal de Jérusalem affilié au Parti national religieux, est l’un des premiers civils à voir le Mur occidental et la Vieille Ville réunifiée. Accompagné par son père et par le rabbin Kook, il rejoint le rabbin Shlomo Goren, son beau-frère, le mari de sa soeur Tsefiya, alors aumônier en chef de Tsahal, qui deviendra grand rabbin ashkénaze d’Israël.

 

Ce sera sa seule et unique visite sur le mont du Temple libéré. Ce qui ne l’empêche pas de se déclarer favorable à la construction d’une synagogue sur l’esplanade, après avoir soigneusement déterminé à quel emplacement la loi juive permettrait de la bâtir.

 

Cohen n’aime pas les étiquettes du style « dati » (religieux), « hardal » (haredi-national religieux) ou « haredi » (ultraorthodoxe).

 

« On peut être juif sans être “dati” », affirmet- il. « On peut être juif sans respecter les commandements, ou en en respectant seulement quelques-uns. Il est très rare de trouver un Juif qui ne respecte aucun commandement », ajoute-t-il, citant la circoncision comme exemple : « Presque tous les petits garçons juifs sont circoncis ».

 

Lorsqu’il était Grand Rabbin de Haïfa, ville que l’on nommait Haïfa la rouge pour son orientation politique, il s’estimait responsable de tous les Juifs, y compris des laïcs, et oeuvrait à rapprocher les gens. « Dieu merci, je pense qu’à Haïfa, cela s’est plutôt bien passé », dit-il, modeste comme à son habitude.

 

Avec un tel itinéraire, Cohen ne pouvait que croiser l’histoire du Jerusalem Post. Ainsi, lorsqu’il étudiait à la Yeshiva, juste avant sa captivité, il logeait tout près des locaux de ce qui s’appelait alors le Palestine Post. Il se souvient très bien du bombardement nocturne de 1948.

 

Mais c’est surtout des 18 années passées au conseil municipal de Jérusalem qu’il a conservé des souvenirs, en particulier celui de Gershon Agron, fondateur-rédacteur en chef du journal, devenu maire de la ville par la suite.

 

« Nous avions souvent des points de vue opposés », reconnaît-il. Ainsi, Agron soutenait le projet de bâtir un centre de judaïsme libéral à Jérusalem, tandis que Cohen était contre. Des différences qui n’empêchent pas les deux hommes de rester en excellents termes. Car c’est précisément cette capacité à défendre ses opinions et ses principes, tout en s’efforçant de trouver un terrain d’entente et d’éviter les conflits, qui a fait la réputation de Cohen, y compris dans ses rapports avec le Vatican.

 

Le pape et le rabbin

 

Cohen dirige le Conseil pour le dialogue entre le Grand Rabbinat d’Israël et le Vatican et préside celui pour le dialogue entre judaïsme et islam. Il est aussi l’émissaire du Grand Rabbinat d’Israël dans les réunions interconfessionnelles et membre du Conseil des leaders religieux du monde pour l’Institut interconfessionnel Elijah.

 

« En octobre 2008, le pape m’a invité à venir parler de la Bible devant le synode », raconte-t-il. Pour le Vatican, c’est de l’Ancien Testament qu’il est question, mais Cohen, lui, parle de « la Bible » et de son rôle dans la religion et la liturgie juives. Malgré ce choix de vocabulaire, le synode lui a fait, estime-t-il, un très bon accueil.

 

Ces relations cordiales avec le Vatican traversent cependant une mauvaise passe quand on envisage de béatifier le pape Pie XII malgré son silence pendant la Shoah. Cohen et le Grand Rabbinat s’y opposent. Cohen reconnaît qu’il était en meilleurs termes avec le pape précédent, une déclaration qui peut surprendre, venant d’un rabbin né à Jérusalem. Cela ne l’a toutefois pas empêché de venir en visite officielle à Rome en mars dernier.

 

En 1991, il reçoit le prix de la Tolérance pour son action dans le dialogue interreligieux. Sa position de Grand Rabbin d’une ville à forte diversité religieuse l’a incité à entretenir de bonnes relations avec les Musulmans, les Chrétiens et les autres communautés. Pour lui, il s’agit là d’un impératif moral. Pour cela, il concentre son action sur des problèmes qui concernent toutes les religions : le déclin de la morale, la nécessité de faire la paix et de cesser de verser le sang. « Nous nous sommes entendus pour ne pas aborder les sujets qui divisent », explique-t-il. Ainsi, le Patriarche catholique grec Elias Shakur et lui-même ont conclu un accord : « Quand le messie arrivera », se sont-ils promis, « nous irons le voir ensemble et nous lui demanderons : “C’est la première fois que vous venez ici, ou la deuxième ?” »

 

La Mitsva la plus importante de toutes

 

Grâce à son diplôme de droit de l’Université hébraïque de Jérusalem et à sa grande expérience de la loi juive, Cohen est doyen de l’institut Harry Fischel pour la recherche en loi juive et du séminaire pour les rabbins et les juges rabbiniques.

 

Il paraît également tout naturel qu’il ait fondé l’institut Ariel, qu’il présente comme « une importante institution pour la formation des rabbins et des Dayanim (juges rabbiniques) ».

 

Un établissement qui, fait-il remarquer, a tout d’abord été contesté par les autorités ultra-orthodoxes. « Mais aujourd’hui », précise-t-il, « tout le monde comprend que c’est une chose positive et des centaines de rabbins et de juges y ont mené leurs études. » Il y a quelques années, la branche nord de cet institut s’est trouvée sous le feu des projecteurs. On lui reprochait une gestion impropre de l’un de ses cours réservés à la police et au personnel de sécurité. La responsabilité de Cohen n’a jamais été directement mise en cause, mais, lorsqu’il a pris sa retraite de ses fonctions de Grand Rabbin de Haïfa l’an dernier, certains ont affirmé qu’il s’agissait là d’un compromis pour ne pas avoir à répondre de certaines accusations. L’affaire est actuellement à l’étude dans les tribunaux. Quelle qu’en soit l’issue, il est clair que Cohen n’a aucun regret concernant son rôle dans la formation de la prochaine génération.

 

Quand on lui demande si, à son avis, la société israélienne a beaucoup changé, Cohen soupire : « Ce sentiment de mission historique qui nous a fait rêver pendant des centaines, voire des milliers d’années, a pratiquement disparu de l’expérience collective, contrairement à ce qui se passait juste avant la création de l’État, à l’époque des mouvements clandestins et juste après. La politique a quelque peu altéré la gloire du sionisme et du retour sur la terre d’Israël. » Il rappelle l’idée du Rav Kook, pour qui l’installation sur la terre était une valeur à la fois religieuse et sociale. « Je ne sais pas dans quelle mesure ces valeurs-là ont été préservées.

 

À mon avis, elles existent encore, mais elles ont perdu leur pouvoir formateur. » Au lendemain de la guerre d’Indépendance, Cohen a fait partie de la première délégation de Tsahal aux États-Unis, et on lui a alors demandé de se présenter en uniforme. Il se souvient avec beaucoup de fierté de l’impression produite sur la communauté juive qu’il rencontre là-bas. « Le vrai sionisme, c’est de venir sur la terre d’Israël et de s’y installer.

 

Pas seulement d’apporter son soutien à ceux qui y vivent », déclare-t-il.

 

Et ne venez pas lui dire que vous attendez la venue du messie pour le faire. Il vous répondra qu’il s’agit d’une mitsva (d’un commandement) qui concerne tous les temps, et pas seulement la venue du messie. « La mitsva d’installation sur la terre d’Israël est la plus importante de toutes… Que puis-je vous dire de plus ? »

 

Les 3 qualités du rabbin

 

 Il refuse de se laisser aller à des prédictions sur ce que seront les gros titres du Jerusalem Post dans 80 ans. « C’est très difficile à dire. Cela dépend beaucoup de la façon dont vont évoluer les relations avec ce qu’on appelle aujourd’hui “les Palestiniens”… Je ne suis pas contre la paix, mais je ne veux pas renoncer au droit historique du peuple d’Israël sur la terre d’Israël. Comment va-t-on résoudre ce problème, la quadrature du cercle, c’est impossible à dire. Les miracles – et les tragédies – qui se sont produits au siècle dernier ne sont pas terminés. Nous sommes encore au début du voyage. » Dans les archives du Jerusalem Post : un article écrit par Cohen en juin 1975, à l’époque de sa nomination à Haïfa.

 

Le titre ? « Le rabbin et les défis d’aujourd’hui ». Il explique notamment qu’un leader religieux doit « donner l’exemple ».

 

« Pour être un bon leader spirituel dans sa génération, un rabbin doit posséder trois qualités : la capacité d’éclairer, celle de se faire entendre, et la flamme de l’esprit. » Ces qualités, Cohen les possède encore aujourd’hui, et elles sont plus nécessaires que jamais.