Tribune
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Publié le 14 Mars 2014

Pourim : l’histoire qui se répète inexorablement

Tribune de Rav Claude David Zaffran publiée dans le Jérusalem Post Edition Française le 11 mars 2014

Chaque année, nous lisons la Meguila. Avons-nous retenu les leçons des événements qui se sont déroulés ?

Lorsque les Juifs apprirent que le roi avait donné les pleins pouvoirs à Aman, ils se rendirent compte de l’extrême gravité de la situation. Selon l’expression de nos sages dans le traité Meguila 14a : Le seul fait apparemment anodin que le roi ait retiré son anneau eut plus de poids que les mises en garde de 48 prophètes et 7  prophétesses, autant d’admonestations qui n’ont pas ramené le peuple sur le droit chemin, comme il est dit : « Ce fut pour les Juifs un grand deuil accompagné de jeûne, de pleurs et de lamentations » (Esther IV, 3). Mardochée avait d’ailleurs façonné une médaille faisant apparaître sur une face une couronne dorée, et sur  l’autre un cilice couvert de cendres. Ainsi voulait-il faire comprendre à son peuple que l’exil le plus confortable peut se transformer rapidement en un mortel guet-apens. À l’époque d’Esther et de Mardochée, on pouvait parler d’âge d’or pour les Juifs qui avaient obtenu des postes importants. Mardochée était chef du Sanhédrin,  siégeant au même titre qu’un Ministre au seuil du palais royal. 

Esther, fille d’Israël, fut proclamée reine. Tout aurait pu ainsi durer indéfiniment. Et c’est précisément lorsque l’avenir semblait sourire aux Juifs que tomba la sentence : anéantir, tuer, éliminer tout le peuple en un seul jour. Premier génocide annoncé de notre  Histoire. Le pharaon lui-même ne voulait supprimer que les garçons. Sanheriv ne désirait que les expulser de la terre d’Israël et Nabuchodonosor n’aspirait qu’à les exiler à Babylone. L’histoire d’Esther nous enseigne également que l’assimilation n’est pas un rempart à l’antisémitisme. Aman n’a pas fait de différence entre  Mardochée, grand érudit n’ayant pas caché son identité, et tel Juif ignorant, complètement assimilé. Tous restaient juifs aux yeux du tyran. Les nazis et leurs complices n’ont pas agi autrement. Rava, un des derniers rabbins de Babel, enseignait que nous ne disons pas le Hallel à Pourim car, en vivant en exil, nous continuons,  hélas, à demeurer les serviteurs d’Assuérus et personne ne peut nous garantir que demain Aman ne s’élève contre notre peuple pour nous anéantir. C’est pourquoi nous lisons la Meguila le soir et la répétons le lendemain, signe que l’Histoire peut se répéter. D’où la requête d’Esther à Mardochée : « Va rassembler tous les Juifs  présents à Suze et jeûnez à mon intention, ne mangez ni ne buvez pendant trois jours. Ensuite, je me présenterai au roi et si je dois périr, je périrai » (IV, 16)… Lire l’intégralité