Le billet de Nathalie Cohen-Beizermann - Cérémonie « Les Flammes » le 25 avril : des hommages très ciblés

02 Mai 2024 | 152 vue(s)
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Le RAP est un style de musique, apparu dans les ghettos afroaméricains dans les années 1970, fondé sur la récitation chantée de textes souvent révoltés et radicaux, scandés sur un rythme répétitif et sur une trame musicale composite.

Il a émergé en France dans les années 80, et on se rappelle qu’en 2020, Freeze Corleone a fait passer dans ses chansons, des messages clairement antisémites, qui lui ont valu de nombreuses condamnations. Le rappeur avait déclaré entre autres : « j’arrive déterminé comme Hitler dans les années 30, ou tous les jours RAF (rien à foutre NDLR) de la Shoah ».
Rappelons-nous aussi de Médine, invité aux dernières universités d’été de Europe Écologie les Verts (EELV) alors qu’il ciblait directement les Juifs dans plusieurs de ses chansons.
Il avait interpelé l’essayiste Rachel Khan, juive et petite-fille de déportés sur ses origines franco-gambiennes, Médine la décrivait comme une personne « dérivant chez les social traîtres et bouffant au sens propre à la table de l'extrême droite ». Le jeu de mots est « abject », avait tonné Clément Beaune, appelant La France Insoumise (LFI) et Marine Tondelier à « revenir à la raison » et à déprogrammer Médine. Mais c’était peine perdue.

 

Le 25 avril au Théâtre du Châtelet, s’est tenue la cérémonie des Flammes qui récompense les rappeurs français. Comme lors de la première édition en 2023,  c’est encore la chanteuse Aya Nakamura et le rappeur Gaeo qui ont remporté la flamme des artistes de l’année. La cérémonie était retransmise en direct sur W9 et sur Youtube. On y a retrouvé Medine qui a pris la parole pour rendre hommage à tous les enfants de Gaza morts sous les bombardements de l’armée israélienne. Quelle surprise aussi de voir l’activiste Assa Traoré remettre la flamme de l’engagement social et affirmer que « les personnes présentes étaient la voix vivante de ceux qui sont tombés, de ceux qui sont morts ».

Un oubli ?

La veille, le mercredi 24 avril, le rappeur iranien Toomai Salehi a été condamné à mort en Iran.
La nouvelle est tombée mercredi 24 avril 2024, occasionnant des réactions dans le monde entier, condamné à mort pour « corruption sur Terre » par le tribunal révolutionnaire d’Ispahan, ville du centre de l’Iran.
Sur la plateforme de streaming musical Spotify comme sur YouTube, son morceau le plus écouté est Soorakh Moosh (« Trou à rats »), sorti en 2021. Il y dénonce l’oppression mise en place par le régime iranien. En 2022, lorsque le mouvement de contestation Femme Vie Liberté prend forme, il fait partie des figures de la contestation. Dans une chanson début octobre, il appelle à la mobilisation pour une révolution,  se disant prêt à aller jusqu’à la mort. C’est au nom de cet engagement que les autorités iraniennes ont justifié sa condamnation à mort après une première arrestation en 2022 au cours de laquelle il avait déclaré avoir subi de nombreuses tortures durant sa détention.

Pas un mot à la cérémonie des Flammes. Toomai Salehi cochait pourtant toutes les cases pour recevoir un hommage : toutes les cases oui mais pas celle de parler de Gaza, pas celle de condamner Israël, pas celle de l’antisémitisme. Il appelle à la liberté pour les femmes iraniennes et pour son peuple tout entier, contre le régime des Mollahs. Donc qu’il pourrisse dans les prisons iraniennes et meure en silence.

Les flammes de l’antiracisme ont elles aussi rendue invisibles d’autres combats.

 

Nathalie Cohen-Beizermann, vice-Présidente du Crif  

 

 

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