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Published on 22 May 2017

#Crif - Après l'interdiction de l'abattage rituel en Wallonie, le Crif a posé 3 questions à Yohan Benizri, président du CCOJB

Yohan Benizri, avocat au barreau de Bruxelles, préside le Comité de Coordination des Organisations Juives de Belgique (CCOJB) et a récemment été élu vice-président du Congrès Juif Mondial.

Pouvez-vous nous brosser un tableau des problématiques de la communauté juive de Belgique ?
 

Nous avons très largement les mêmes champs d’action que nos communautés soeurs, à savoir la promotion des valeurs et du modèle d’intégration juif dans la société civile en général, le devoir de mémoire et la lutte contre les attaques dont nous faisons malheureusement l’objet, parfois en tant que juif, parfois du fait de notre attachement à Israël, et parfois de manière collatérale. Très concrètement, nous agissons au niveau politique, médiatique et contentieux pour assurer la pérennité de notre communauté et la défense de nos valeurs. Cela passe notamment par un travail de coordination pour assurer notre sécurité, la défense contre l’antisémitisme sous toutes ses formes, une lutte incessante contre l’importation du conflit israélo-palestinien et un travail éducatif de chaque instant.
 

Nous entendons des nouvelles inquiétantes en ce qui concerne l’abattage rituel. Que se passe-t-il ?
 

Les régions, compétentes en la matière, ont adopté ou discutent actuellement de l’interdiction indirecte de l’abattage rituel en imposant l’étourdissement des animaux avant leur abattage en prétextant d’une considération d’ordre moral - le bien-être animal. Cette interdiction est très problématique pour la partie de la communauté juive qui mange casher mais elle suscite un émoi bien au-delà de ce groupe, chez tous ceux qui ont à coeur la protection raisonnable des libertés religieuses et le souci d’une loi bien faite. Non seulement cette interdiction est douteuse d’un point de vue juridique, mais aucun argument présenté en sa faveur ne résiste à l’analyse. Quant à la réponse classique selon laquelle l’importation de viande casher rend la mesure acceptable, elle est hypocrite par rapport au bien-être animal, et insuffisante au niveau juridique lorsque l’on voit ce qui se passe en Suisse et ailleurs en Europe.
 

Pourquoi n’est-ce pas acceptable d’interdire la shehita et qu’allez-vous faire ?
 

En premier lieu, il est insupportable pour la communauté juive d’être stigmatisée comme une communauté barbare dépourvue d'égard pour les animaux lorsque l’on sait ce que la tradition juive impose en termes de standards moraux quant au traitement des animaux. Mais, peut-être plus fondamentalement encore, l’interdiction de la shehita n’est ni nécessaire ni proportionnée à l’objectif poursuivi. Elle n’est au mieux qu’une mesure de façade qui a pour effet de dire à de nombreux juifs et musulmans qu’ils ne sont plus les bienvenus, alors même que le bien-être animal est bafoué pour d’innombrables raisons, notamment purement économiques. Dans le respect strict de la loi, qui caractérise le modèle d’intégration juif, nous nous opposerons donc à cette mesure. Nous étudions actuellement nos possibilités de recours et multiplions les contacts politiques à tous les niveaux. Il est probable que cette question fasse l’objet de multiples procédures, en ce compris au niveau européen.