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Publié le 11 Février 2008

Devine qui n’est pas venu à la Synagogue ?

Question : Michel Serfaty, vous êtes co-président de l’Amitié Judéo-Musulmane de France et vous étiez à Rome, le mercredi 23 janvier 2008, pour assister à la première visite des organisations islamiques de Rome en la Grande Synagogue de Rome. Cette visite était annoncée. Pourtant, elle n’a pas eu lieu. Pourriez-vous revenir sur cet incident et ses conséquences ?


MS : En effet, nous avons été invités par le Grand Rabbin de Rome Riccardo Diseigni à prendre part à cette cérémonie officielle de rencontre des deux communautés religieuses. L’importance de cette évènement résidait dans le fait que pour la première fois les représentants officiels de l’islam italien rendaient visite à leurs concitoyens juifs d’une part, dans le fait que cette visite rappelai pour beaucoup, celle de Jean Paul II à la synagogue de Rome en 1970, qui inaugurait l’ère de réconciliation entre juifs et chrétiens. Comme en témoigne l’intérêt de la presse pour l’évènement, la rencontre avec l’Islam répondait à la visite effectuée ces derniers mois par le Grand Rabbin Diseigni aux représentants musulmans donnant lieu à croire en une réconciliation entre juifs et musulmans. Malheureusement nous avons été déçus d’apprendre soudainement l’annulation de cette cérémonie par les musulmans, vingt quatre heures auparavant. En réponse aux questions de la presse nationale et de parlementaires italiens dont un musulman, nous avons pu donner en exemple le modèle français de dialogue entre juifs et musulmans en particulier avec les responsables de la Mosquée de Paris.
Question : Comment expliquez vous ce couac ?
MS : La presse italienne qui avait interrogé Monsieur Merwane, secrétaire général de l’Union des organisations islamiques italiennes, avait bien rapporté qu’il s’agissait d’une décision venue de l’extérieur refusant d’en préciser l’origine. Dès notre retour en France, nos amis de la Mosquée de Paris ont annoncé qu’il s’agissait d’une décision d’une Organisation musulmane installée à Londres. Mais, je n’en sais pas plus.
Question : Est-ce qu’en France, les organisations musulmanes ont été accueillies à la Grande Synagogue de Paris ?
MS : Les responsables de Mosquée de Paris ont été accueillis à de nombreuses occasions à la Grande Synagogue de Paris et au Consistoire de Paris. En 2002, dès l’installation de la Commission du Consistoire pour les relations avec les autres religions – la C.R.A.R. – nous avions organisé une rencontre de près de trente hauts dignitaires de l’Islam avec le Conseil du Consistoire. Le Dr Dalil Boubakeur a été accueilli dès son élection à la Présidence du Conseil français du culte musulman – C.F.C.M. - par le Grand Rabbin David Messas, le Président Moïse Cohen et le Conseil du Consistoire en 2003. Il a été reçu à nouveau jeudi 24 janvier dernier accompagné du Dr Djelloul Seddiki, secrétaire général de la Mosquée de Paris par le Grand Rabbin de Paris, le Président Joël Mergui et moi-même précisément pour lancer de nouveaux chantiers.
Question : Vous consacrez une folle énergie pour promouvoir la reconnaissance, l’estime et le dialogue entre Juifs et musulmans. Ne serait-ce pas une tâche impossible ou un leurre ? Vous n’êtes pas découragé ?
MS : Je reste confiant parce que je crois en l’amitié avec les Musulmans. La tâche n’est certes pas facile. Elle demande un fort investissement, à la mesure de l’importance de la communauté musulmane de France et de sa diversité. Toute initiative de caractère pédagogique et/ou sociale en direction de l’islam aboutit fréquemment à un résultat positif et encourageant. Et ce qui incite également à l’optimisme, c’est le nombre croissant d’initiatives de rapprochement des deux populations à travers la France voire l’Europe. Je crains même de voir s’installer un esprit de concurrence entre différentes associations qui se laisseraient tenter de vouloir montrer qu’elles font mieux que les autres. Cette évolution me pousse à lancer des appels aux uns et aux autres afin de nous rapprocher pour mieux coordonner nos initiatives
Question : Quels sont vos prochains projets ?
MS : Nous prévoyons de continuer d’agir selon les stratégies mises en œuvre jusqu’à présent et d’innover par de nouvelles stratégies. Nous travaillons activement à la préparation du « Tour d’Europe de l’Amitié » en mai et juin prochain grâce au « Bus de l’Amitié judéo-musulmane ».
Nous poursuivons notre travail de terrain hebdomadaire sur toute l’Ile France : rencontre avec les MJC, les maisons de quartiers, les écoles, les mairies, etc. Une grande journée du dialogue judéo-musulman sera bientôt organisée en Ile de France. La nouvelle activité réside dans le lancement prochain des premiers séminaires de formation des cadres associatifs et des enseignants, juifs et musulmans, à la lutte contre les stéréotypes et les préjugés racistes, anti-musulmans et antisémites. Enfin, nous pensons devoir ne plus refuser de répondre favorablement à des demandes émanant de plusieurs de nos interlocuteurs musulmans : associer à nos activités des organismes juifs et arabes du Moyen Orient, Israël et pays arabes. Compte tenu du caractère sensible de telles initiatives, nous préférons avancer prudemment.
Propos recueillis par Marc Knobel

Photo: Alain Azria