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Publié le 22 Juin 2011

L'ONU et l'alibi de la Syrie

Vu d'ici, la question se pose. Pourquoi la communauté internationale - enfin, occidentale - s'est-elle empressée d'intervenir en Libye alors qu'elle laisse la situation syrienne dégénérer (1300 morts environ)?




L'idée des « deux poids, deux mesures » ne compte guère dans le mystérieux monde de la diplomatie et de la géopolitique.



Le droit d'ingérence humanitaire, en vogue depuis quinze ans -Bosnie et Rwanda - atteint ses (belles) limites. Enfin, la puissance de l'OTAN n'est pas infinie (75 % du budget supportés par les États-Unis).



La Syrie n'est pas n'importe quel client mené par un simple dictateur sanguinaire, défendu par une armée obsolète. La Russie, qui s'appelait encore l'URSS, en a fait un allié sûr (base dans le port de Tartous) et un généreux acheteur de son armement. L'Iran est un autre soutien sans failles, dont le nom à peine prononcé incite à la méfiance.



Tout ce qui touche à la Syrie peut entraîner des déflagrations régionales redoutables. En conflit avec Israël au sujet du plateau du Golan (annexé en 1980), la patrie de Bachar el-Assad est un support du Hezbollah libanais et du Hamas palestinien (des leaders résident à Damas). En cas de guerre, des contre-feux dangereux pourraient propager très loin l'incendie.



À l'inverse, la rébellion serait mise à profit par les dissidents kurdes du nord du pays (d'où l'inquiétude de la Turquie), par des tribus jordaniennes au sud. Laissons là le romantisme révolutionnaire pour invoquer prosaïquement le sacré sac de nœuds.



La France et la Grande-Bretagne s'échinent depuis deux mois à rédiger une résolution des Nations unies contre le pouvoir syrien. La Russie, on a vu pourquoi, menace d'un veto en Conseil de sécurité. Vladimir Poutine, sous le nez de François Fillon hier à Paris, a jeté : « L'intervention dans les affaires d'un État souverain est sans perspectives. » Un texte évoquerait désormais : « La seule solution actuelle en Syrie passe par un processus politique élargi et dirigé par des Syriens ». Assad peut jouer la montre.



La Chine est opposée au droit d'ingérence, de peur qu'un jour son heure ne sonne. L'Inde, le Brésil et l'Afrique du Sud se sentent floués depuis la résolution 1973 sur la Libye (abstentions chinoises et russes). L'hypocrisie est partagée : comment protéger les populations civiles sans éjecter Kadhafi?



C'est toute la complexité du « machin qu'on appelle ONU », selon l'expression du général de Gaulle, prononcée en 1960 en pleine crise algérienne : « Les Nations unies n'ont aucun droit à intervenir dans une affaire qui est de la compétence de la France.



» Le monde a bien changé depuis le règne du « Grand Charles ». Enfin, pas tant que ça si l'on cite cet extrait de ses mémoires : « À la différence de ce que Roosevelt pensait et ce que Churchill laissait supposer, de ce que Staline faisait semblant de croire, je ne m'exagérais pas la valeur des Nations unies. »



Vladimir Poutine, sous le nez de François Fillon hier à Paris : « L'intervention dans les affaires d'un État souverain est sans perspectives. »



Photo: D.R.



Source : la Voix du Nord



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