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Publié le 9 Novembre 2011

L'évolution du programme nucléaire iranien depuis 1953

Dès 1953, un programme nucléaire iranien est développé par le shah Mohammad Reza Pahlavi avec l'aide des Etats-Unis, dont le président Eisenhower a lancé en 1953 le programme "Atomes contre paix". Un programme qui donnera lieu à la création, en 1957, de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).


Devenue membre de l'AIEA, le 16 septembre 1959, l'Iran signe, en juillet 1968, le traité de non-prolifération nucléaire (TNP), adopté par les Nations unies le 12 juin 1968 et devenu effectif le 5 mars 1970. Toutefois, l'Iran, de même qu'Israël et le Pakistan dans la région, n'ont pas paraphé le texte qui impose à ses signataires des restrictions en matière de recherches dans le domaine de l'armement nucléaire.
Lors de son accession au pouvoir, le 1er avril 1979, au terme de la Révolution islamique, l'ayatollah Ruhollah Khomeiny gèle le programme nucléaire iranien. Durant la guerre entre l'Iran et l'Irak, de 1984 à 1987, le réacteur nucléaire de Bouchehr, bombardé à six reprises, est intégralement détruit. La montée en puissance militaire d'Israël va amener l'Iran, la Syrie et la Libye à s'accorder sur la nécessité de développer un armement nucléaire en 1985.
La relance du programme nucléaire iranien
Septembre 2002. La première unité de la centrale nucléaire iranienne, située sur le site historique de Bouchehr, dans le sud-ouest du pays, est lancée.
12 septembre 2002. Alireza Jafarzadeh, porte-parole du Conseil national de la résistance en Iran (CNRI, un groupe dissident iranien), révèle l'existence de deux sites nucléaires inconnus : une installation d'enrichissement de l'uranium à Natanz et une installation à l'eau lourde à Arak.
Décembre 2002. Des images satellite des installations nucléaires de Natanz et Arak sont diffusées sur la télévision américaine. Les Etats-Unis accusent Téhéran de mettre au point "des armes de destruction massive". Téhéran donne son accord à une inspection des installations par les agents de l'AIEA.
Août 2003. La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni (dit UE-3) proposent à l'Iran des négociations sur le nucléaire.
21 octobre 2003. Les ministres des affaires étrangères de l'UE-3 et le gouvernement iranien signent la déclaration de Téhéran. Téhéran accepte d'appliquer le protocole additionnel au TNP, qui permet des inspections inopinées de l'AIEA, et le signe en décembre.
Juin 2004. Mohammed ElBaradei, directeur de l'AIEA depuis 1997, estime que la coopération iranienne avec ses agents sur place a été "moins que satisfaisante". Il remet en cause les conclusions précédentes des agents de l'AIEA, selon lesquelles il n'y aurait pas de preuve sur l'existence d'un programme de développement d'une bombe atomique par l'Iran.
14 novembre 2004. Sous la pression de l'UE-3, le responsable iranien des négociations sur le nucléaire annonce une suspension temporaire et volontaire de son programme d'enrichissement d'uranium, bien qu'il ne soit pas en violation du TNP.
Ahmadinejad et la ligne dure
24 juin 2005. Mahmoud Ahmadinejad remporte l'élection présidentielle. Il adopte une ligne diplomatique dure sur la question nucléaire.
Août 2005. L'Iran reprend des activités nucléaires dans son usine de conversion d'uranium d'Ispahan, dans le centre du pays.
Septembre 2005. Le président Ahmadinejad affirme à la tribune de l'ONU que l'Iran a le droit de développer un programme nucléaire civil.
4 février 2006. L'AIEA décide de transmettre le dossier nucléaire iranien au Conseil de sécurité de l'ONU, après que l'Iran a levé des scellés posés par l'agence sur des centres de recherche nucléaire. En réaction, l'Iran renonce à appliquer le protocole additionnel du TNP, signé en décembre 2003.
29 mars 2006. Le Conseil de sécurité de l'ONU exige de l'Iran qu'il cesse ses activités d'enrichissement d'uranium avant le 28 avril. Exigences auxquelles ne se plie pas le régime iranien : Mahmoud Ahmadinejad annonce le 11 avril que "l'Iran a rejoint les pays nucléaires", après avoir procédé à son premier enrichissement d'uranium à 3,5 %, permettant de produire du combustible nucléaire.
3 mai 2006. Paris et Londres déposent un projet de résolution au Conseil de sécurité de l'ONU, demandant formellement à l'Iran de suspendre son programme d'enrichissement. Ce projet se réfère au chapitre VII de la charte de l'ONU qui peut ouvrir ultérieurement la voie à d'éventuelles sanctions voire à une intervention militaire.
8 mai 2006. Pour la première fois depuis la révolution islamique, le président iranien s'adresse à son homologue américain, dans une lettre, pour proposer de "nouveaux moyens" de régler les tensions.
31 mai 2006. Un tournant majeur est initié dans la politique américaine vis-à-vis de l'Iran : Washington propose de participer directement aux négociations sur le programme nucléaire iranien aux côtés des Européens, à condition que Téhéran suspende son enrichissement de l'uranium.
6 juin 2006. Le chef de la diplomatie européenne, Javier Solana, fait une offre à l'Iran, dont les détails sont gardés secrets. Le groupe des six propose d'aider l'Iran à construire des réacteurs à eau légère et de lui accorder des avantages commerciaux s'il suspend l'enrichissement de l'uranium, sans évoquer de sanctions.
Le temps des sanctions
31 juillet 2006. La résolution 1696 du Conseil de sécurité de l'ONU est adoptée par 14 voix contre une au Conseil de sécurité de l'ONU. Elle exige que l'Iran "suspende toutes les activités liées à l'enrichissement" d'uranium avant le 31 août, menaçant la République islamique de sanctions économiques et diplomatiques au titre de l'article 41 du chapitre VII de la Charte.
Décembre 2006. Une première série de sanctions économiques est votée à l'unanimité par le Conseil de sécurité de l'ONU, sous la résolution 1767.
24 mars 2007. L'arsenal de sanctions économiques contre l'Iran est renforcé avec l'adoption de la résolution 1747 qui porte sur l'armement et les relations financières du gouvernement iranien avec d'autres Etats ou institutions financières internationales.
30 mars 2007. L'Iran informe officiellement l'AIEA de la suspension de l'application de la disposition des arrangements subsidiaires à l'accord de garanties qui, depuis 2003, l'obligeait à déclarer les installations nouvelles dès la décision de construction.
9 avril 2007. Le président Ahmadinejad annonce officiellement que le programme d'enrichissement est entré "dans sa phase industrielle". Le président de l'Organisation de l'énergie atomique iranienne réaffirme l'objectif d'installation de 50 000 centrifugeuses à Natanz.
25 octobre 2007. Les Etats-Unis adoptent de nouvelles sanctions contre l'Iran, visant les Gardiens de la révolution, l'unité d'élite Al-Qods et les trois principales banques du pays.
7 novembre 2007. Mahmoud Ahmadinejad affirme que l'Iran a atteint le cap des 3 000 centrifugeuses, ce qui lui permet théoriquement d'obtenir suffisamment d'uranium enrichi nécessaire à la fabrication d'une bombe atomique.
3 décembre 2007. Dans un rapport, seize agences de renseignement américaines disent considérer avec "un haut degré de confiance" que "l'Iran a arrêté son programme d'armement nucléaire à la fin 2003".
22 février 2008. L'AIEA expose dans le détail des éléments pouvant indiquer que le programme nucléaire iranien a "une possible dimension militaire".
3 mars 2008. Un nouvel arsenal de sanctions économiques et commerciales est adopté par le Conseil de sécurité de l'ONU.
Reprise des négociations avec le groupe 5+1
14 juin 2008. Les cinq membres du Conseil de sécurité (Etats-Unis, Russie, Chine, France et Grande-Bretagne) et l'Allemagne, dit le groupe des 5+1, fait une nouvelle offre de coopération à l'Iran. En échange de la suspension de l'enrichissement d'uranium, elles "reconnaissent le droit de l'Iran à développer la recherche, la production et l'utilisation de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques".
19 février 2009. L'AIEA estime que l'Iran a franchi une nouvelle étape en se dotant d'une quantité suffisante d'uranium faiblement enrichi pour fabriquer, s'il le souhaite, de la matière fissile pour une arme nucléaire.
9 avril 2009. L'Iran lance la construction à Ispahan de la première usine de fabrication de combustible nucléaire et annonce avoir installé 7 000 centrifugeuses dans son usine d'enrichissement de Natanz.
9 septembre 2009. Téhéran transmet un texte de "propositions" au groupe des 5+1, qui annonce la tenue d'une réunion sur le dossier nucléaire le 1er octobre.
25-28 septembre 2009. L'Iran reconnaît disposer d'un site secret d'enrichissement d'uranium à Qom, dans la région de Fordo, au centre du pays. Une révélation qui provoque un tollé international et renforce les convictions américaines sur l'existence d'un programme de développement de la bombe atomique.
1er octobre 2009. Rencontre entre le groupe des 5+1 et l'Iran à Genève pour relancer, après 14 mois d'interruption, les négociations sur le programme nucléaire.
4 octobre 2009. Dans une analyse confidentielle, révélée par le New York Times, l'AIEA estime que l'Iran a acquis "suffisamment de connaissances pour pouvoir élaborer et fabriquer" une bombe atomique "fonctionnelle".
21 octobre 2009. Les Etats-Unis, la Russie et la France proposent à l'Iran un accord prévoyant l'enrichissement de l'uranium iranien à l'étranger.
18 novembre 2009. Après plusieurs prises de position contradictoires, le chef de la diplomatie iranienne, Manouchehr Mottaki, annonce le refus de l'Iran de transférer à l'étranger son uranium faiblement enrichi.
27 novembre 2009. L'AIEA prend une résolution condamnant l'Iran pour son programme nucléaire et demandant la "suspension" de la construction du site nucléaire de Fordo, près de Qom.
2 décembre 2009. Téhéran annonce son intention de produire de l'uranium enrichi à 20 %, qu'il estime nécessaire pour son programme nucléaire, et à construire dix nouvelles usines d'enrichissement.
3 janvier 2010. Sous la menace de nouvelles sanctions, Téhéran donne au groupe des 5+1 un "ultimatum" d'un mois pour accepter un échange d'uranium selon ses propres termes, faute de quoi il produira lui-même l'uranium nécessaire pour son réacteur.
10 janvier 2010. Le commandant des forces américaines en Irak et en Afghanistan, David Petraeus, dévoile que des plans militaires, incluant des "bombardements" sur les installations nucléaires iraniennes, ont été mis au point par Washington.
12 janvier 2010. Un scientifique nucléaire est tué par l'explosion d'une bombe à Téhéran. L'attentat est attribué par l'Iran à Israël et aux Etats-Unis.
2 février 2010. Dans un discours télévisé, le président Ahmadinejad affirme que l'Iran n'a "aucun problème" avec l'idée d'un programme d'enrichissement de l'uranium à hauteur de 20 % à l’étranger.
Enrichissement À 20 %
7 février 2010. L’Iran commence à enrichir de l’uranium à 20 %, après l'échec d'un projet d'échange d'uranium iranien faiblement enrichi (3,5 %) contre du combustible enrichi à 20 % par la Russie et la France. La France et les Etats-Unis appellent le Conseil de sécurité de l'ONU à prendre de nouvelles sanctions contre l'Iran.
18 février 2010. Un nouveau rapport de l'AIEA pointe la possibilité de la mise au point d'une ogive nucléaire par l'Iran. Téhéran réfute ces accusations et accuse l'agence de se soumettre aux pressions des pays occidentaux.
1er mars 2010. Le président russe, Dmitri Medvedev, se dit prêt à accepter de nouvelles sanctions contre l’Iran qui seraient "ciblées" et ne "vis[eraient pas] les populations".
31 mars 2010. C'est au tour de la Chine, autre membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, d'accepter le principe de nouvelles sanctions.
17 mai 2010. L’Iran, la Turquie et le Brésil concluent un accord sur le nucléaire, prévoyant le transfert d'uranium faiblement enrichi en Turquie, en échange de combustible destiné à son réacteur médical de Téhéran.
31 mai 2010. L'AIEA révèle que l'Iran a produit au moins 5,7 kilos d'uranium enrichi à 20 %, destiné à son réacteur nucléaire de recherche selon l'Iran.
9 juin 2010. Une quatrième série de sanctions est votée par le Conseil de sécurité de l'ONU, sous la résolution 1929. En juillet, des sanctions sont également votées par les Etats-Unis et l'Union européenne.
21 août 2010. Téhéran lance le chargement de la première centrale nucléaire iranienne construite par la Russie à Bouchehr.
Novembre 2010. A la suite d'un virus informatique, Stuxnet, l'Iran a dû suspendre un moment ses activités d'enrichissement d'uranium, révèle l'AIEA. Un chercheur en physique nucléaire est tué et un autre est blessé dans un double attentat à la voiture piégée à Téhéran. L'Iran accuse "le Mossad et la CIA".
Échec des négociations et escalade
22 janvier 2011. Les discussions entre le groupe des 5+1 et l'Iran achoppent à Istanbul.
23 et 24 mai 2011. Des sanctions renforcées sont votées par l'Union européenne et les Etats-Unis.
24 juillet 2001. Un scientifique iranien est tué à Téhéran. Cet acte est dénoncé par le président du Parlement iranien comme un "acte terroriste américano-sioniste".
2 septembre 2011. L'AIEA fait état d'informations quant à une possible dimension militaire du programme iranien. Elle indique que depuis février 2007, le pays a produit 4 543 kg d'uranium faiblement enrichi à Natanz.
22 septembre 2011. Téhéran se dit prêt à stopper l'enrichissement à 20 % si l'Occident lui en fournit. Washington y voit des "promesses vides".
6 novembre 2011. Le président israélien Shimon Pérès avertit que "la possibilité d'une attaque militaire contre l'Iran est plus proche qu'une option diplomatique".
8 novembre 2011. Publication d'un nouveau rapport de l'AIEA, évoquant de "sérieuses inquiétudes concernant une possible dimension militaire du programme nucléaire" de Téhéran.
Photo : D.R.
Source : le Monde du 9 novembre 2011
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