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Publié le 16 Décembre 2011

Reza Pahlavi : «Il faut juger les crimes du régime iranien»

L'héritier du chah d'Iran, Reza ­Pahlavi, lance un appel solennel aux membres du Conseil de sécurité de l'ONU pour qu'ils décident de déférer le guide suprême de la République islamique devant la justice internationale pour être jugé de crimes contre l'humanité.



Pourquoi prenez-vous cette initiative?



Il s'agit de mettre en position de responsabilité ultime le soi-disant «guide suprême» qui a l'autorité finale en Iran, dans un contexte où les droits de l'homme sont devenus une question majeure. Tous les appareils de répression du régime dépendent directement de lui. C'est une façon d'attirer l'attention sur les crimes commis dans notre pays et d'amener la communauté internationale à faire pression sur le régime à ce sujet.



La plainte doit transiter par le Conseil de sécurité de l'ONU?



Oui, parce que l'Iran n'est pas signataire du traité de Rome qui a établi la Cour de justice internationale. Nous adoptons la procédure qui a été suivie dans le cas de Kadhafi. Les milliers de témoignages que nous avons recueillis désignent des crimes contre l'huma­nité commis par une politique systématique de répression notamment contre les minorités, contre les femmes et contre les prisonniers politiques.



Vous considérez que les pressions internationales sur Téhéran, qui se sont focalisées sur le nucléaire, n'ont pas assez porté sur les droits de l'homme?



Des sanctions ont été prises à propos du dossier nucléaire mais, pour nous Iraniens, ce sont les droits de l'homme qui sont le sujet central. C'est d'ailleurs le vrai talon d'Achille du régime qui, parce qu'il est de plus en plus isolé et de plus en plus illégitime, a recours à une répression de plus en plus brutale. J'en appelle donc à la communauté internationale pour qu'elle mette en œuvre ses obligations légales et morales.



Pourquoi avez-vous choisi ce moment précis pour lancer cet appel?



Si nous avons assisté à la chute de régimes totalitaires c'est grâce au soutien du monde libre. Les événements de 2009 (avec l'élection truquée d'Ahmadinejad à un second mandat) ont été pour de nombreux Iraniens l'ultime tentative de réforme. Mais l'occasion a été perdue par l'Administration américaine. C'est l'Iran de 2009 qui a inspiré le «printemps arabe» et je suis convaincu que c'est en Iran que les aspirations de tous ces peuples pourront aboutir.



Vous pensez que les Iraniens sont prêts à un changement de régime?



Comme l'Europe avec l'Inquisition, l'Iran traverse une phase de régime théocratique. Mais après l'Inquisition vient la Renaissance. Pour détacher du régime des éléments militaires et civils et les faire participer au changement, il faut mettre en place un scénario de réconciliation nationale et d'amnistie. Khamenei devra rendre des comptes un jour mais la plupart des cadres qui ont suivi ses ordres doivent disposer d'une issue. L'Iran est prêt à se retrouver dans une vision alternative démocratique et laïque. Mais ce qui manque c'est l'appui international.



Les sanctions et les menaces militaires ne sont pas pour vous un instrument suffisant?



Quand on parle d'une intervention militaire on évoque un scénario où tout le monde est perdant. Cela ne profite qu'au régime en rendant impossible toute défection. Cela ne fait que retarder la démocratie en Iran sans pour autant régler le problème du nucléaire puisque le régime en déduira qu'il a carte blanche. L'alternative consiste à aider directement l'opposition démocratique iranienne sans s'attacher exclusivement au dossier du nucléaire.



Photo (Reza Pahlavi) : D.R.



Source : le Figaro du 15 décembre 2011