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Publié le 31 Décembre 2010

Yigal Palmor : «Le Hamas a choisi le chemin de la guerre»

Yigal Palmor, vous avez vécu en Belgique durant votre jeunesse, et êtes maintenant porte-parole des Affaires étrangères israéliennes. A Gaza, les gens parlent tous du siège comme d’une punition collective…




Je ne puis commenter des impressions subjectives. Israël ne s’en prend pas à la population mais au gouvernement de facto du Hamas en place depuis son coup sanglant de juin 2007. Ce mouvement a choisi le chemin de la guerre contre nous, contre l’Egypte et même contre l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas. Cette situation n’est pas le résultat de la volonté israélienne et le siège découle des choix du Hamas.



Pourtant la communauté internationale, à commencer par l’Union européenne, vous demande de lever ce siège « immédiatement », elle se trompe ?



Il existe certes une différence d’analyse entre nous et les Européens. Car ces derniers ne portent pas la même responsabilité ; il est aisé de prêcher l’ouverture depuis Bruxelles, mais nous sommes responsables de la sécurité de nos citoyens, dont ceux qui vivent près de la bande de Gaza. On peut aussi se demander pourquoi les Européens ne réclament pas la même levée de siège à l’Egypte, qui a aussi une frontière fermée avec Gaza…



Après la mésaventure du Mavi Marmara le 31 mai et les 9 militants turcs tués, Israël a assoupli le siège, mais on constate que les mesures annoncées prennent beaucoup de temps à se concrétiser, l’Unrwa, l’agence de l’ONU pour les réfugiés, par exemple, se plaint que seuls les plans pour 6 écoles sur 100 à construire ont été approuvés par Israël…



Je m’inscris en faux contre les allégations de l’Unrwa. Le FMI a constaté une croissance de 16% à Gaza pour les six premiers mois de 2010.



Oui mais c’est en comparaison avec la période la plus noire, exceptionnelle, celle qui suivit la guerre de 2008-2009…



Sans doute viennent-ils de loin et je ne dis pas que Gaza devient Singapour, mais dire que rien ne bouge relève de la mauvaise foi. D’ailleurs, on annonce que les tunnels entre Gaza et l’Egypte commencent même à servir pour l’exportation !



Les Gazaouis se plaignent amèrement de l’interdiction des matériaux de construction (ciment, fer…).



Cette interdiction concerne en effet le secteur privé car il y a trop de risque que ces matériaux aboutissent dans les mains du Hamas, qui les utiliserait pour des constructions militaires, des bunkers, etc. En revanche, l’importation de ces marchandises est permise dans le cadre de projets d’institutions internationales.



L’image d’Israël souffre notamment parce que ce pays refuse de geler la construction dans les colonies juives dans les territoires occupés avant la reprise des négociations…



Nous savons que cette image s’est détériorée. Je dirais deux choses : d’abord, formellement, selon aucun accord signé avec l’Autorité palestinienne, Israël ne s’est engagé à arrêter la construction dans les implantations, ce point figurant avec d’autres comme le sort de Jérusalem ou la question des réfugiés au menu des négociations. Pourquoi extraire ce point et en faire une condition préalable ? Israël pourrait en faire autant et compliquer tout davantage.



Vous critiquez Washington, qui insiste sur ce point aussi ?



Cela concerne tous ceux qui croient bon de faire valoir cette condition préalable. Mon second point se rapporte à la bonne volonté israélienne, mise en doute par votre question. Nous avons fait un grand geste, sans recevoir de contrepartie, quand nous avons évacué la bande de Gaza en 2005, cela ne nous a pas apporté le calme, au contraire.



Mais l’évacuation n’a pas été coordonnée avec Abbas, certains disent qu’Israël a presque donné les clés au Hamas…



Nous nous attendions à plus de volonté du côté de l’Autorité palestinienne pour faire avancer les choses. Lors de la campagne électorale qui suivit, en mars 2006, le Premier ministre d’alors, Ehoud Olmert, promouvait la continuation des retraits. C’est vrai que la victoire électorale du Hamas, en janvier de la même année, est venue brouiller les cartes.



Revenons au gel de la colonisation…



Eh bien ! Lors du gel que nous avons fait respecter entre novembre 2009 et septembre 2010, il n’y a pas eu de contrepartie palestinienne ou arabe, comme le réclamaient les Américains. On demande toujours plus à Israël de manière unilatérale.



Des dizaines de rabbins ont aussi terni l’image d’Israël tout récemment en signant un appel pour que les Israéliens juifs ne louent pas ou ne vendent pas d’appartement à des Israéliens arabes…



En effet et c’est une honte absolue ! Cet appel a été catégoriquement rejeté pour toutes les autorités de l’Etat et par les plus grands rabbins. Cela dit, cet épisode n’est pas du tout représentatif de la population israélienne.



Un sondage vient pourtant de montrer une majorité de sondés d’accord avec les rabbins racistes…



Les vrais sondages ce sont les élections et, que je sache, nous n’avons pas une majorité de parlementaires qui correspondrait par exemple au Vlaams Belang ou au Front national…



Propos recueillis par Baudouin Loos. Entretien publié dans le Soir du 30 décembre 2010



Photo : D.R.