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Publié le 1 Décembre 2015

Abdallah Zekri, Président de l'Observatoire National de l'Islamophobie, reçu au CRIF

La Commission pour les relations avec les Musulmans a reçu lle Président de l'Observatoire National contre l'Islamophobie.

Par Jean Corcos, Président de la Commission
 
Monsieur Abdallah Zekri, membre de la direction de la Fédération de la Grande Mosquée de Paris, exerce deux responsabilités au sein du Conseil Français du Culte Musulman (CFCM) : Secrétaire Général ; et Président de l'Observatoire National de l'Islamophobie, qui est une de ses instances. C'est à ce dernier titre qu'il a été notre invité.
 
M. Zekri a d'abord donné l'historique de cet Observatoire. En 2010, M. Hortefeux, alors Ministre de l'Intérieur, avait décidé la constitution d'une commission pour le suivi des actes anti musulmans. Cette commission devait être associée au CFCM, lui-même créé en 2003. Une mission parlementaire était aussi prévue, mais cela est resté sans suite. Au final, l'Observatoire a été créé en 2011, et son Président fut élu à ce moment là.
 
Les deux axes de travail sont : les contacts avec les Conseils régionaux du culte musulman (CRCM), qui donnent les informations ; après vérification de ces informations, remontée au Ministère de l'Intérieur. Les données publiées sont donc validées par les Autorités. 
 
Les chiffres enregistrés représentent uniquement les plaintes déposées dans les commissariats et gendarmeries, mais selon Monsieur Zekri, ils ne reflètent pas la réalité car de nombreux Musulmans ne souhaitent pas porter plainte, convaincus qu'il n'y aura aucune suite. De fait et en réponse à notre question, les choses n'avancent pratiquement jamais sur un plan juridique. A ce sujet, on note que lorsque le parquet classe des affaires "sans suite", il n'a pas à se justifier.
 
Notre invité nous a remis les statistiques pour les années 2013 et 2014, et celles concernant les premiers mois de 2015, avec en particulier la comparaison avec 2014. Les rapports sont envoyés trimestriellement au Ministère de l'Intérieur, et il n'y a pas de rapport annuel détaillé comme le fait le SPCJ pour les actes antisémites. D'une manière générale, les actes islamophobes sont en hausse à l'approche d'échéances électorales.
 
Les "actes anti-musulmans" sont répartis en deux catégories : actions (dégradations de lieux de cultes, tags, tentatives d'incendie, agressions de femmes portant un simple voile ou un foulard) ; et menaces. En 2013 étaient comptabilisés 62 actions et 164 menaces ; en 2014, 55 actions et 78 menaces, donc une nette baisse. Par contre, en 2015 et surtout au début de l'année suite aux attentats contre "Charlie Hebdo" et l'Hypercasher, on a vu une explosion des actes islamophobes : en 12 jours, 33 actions et 95 menaces ; parmi ces actions, c'était la première dois qu'étaient enregistrés des jets de grenade ou des tirs d'armes à feu, mais il y a eu aussi 5 agressions physiques et des dégradations de commerces. Pour rappel, notre réunion, programmée de longue date, a eu lieu quelques jours après les horribles attentats de Paris : Monsieur Zekri nous a dit qu'il avait été heureusement surpris du nombre relativement modéré d'actes islamophobes dans les jours qui ont suivi. 
 
Nous avons interrogé notre invité sur la difficulté de définir parfois des actes anti musulmans par rapport à des actes racistes : le caractère islamophobe est évident lorsque des lieux de cultes, ou des carrés musulmans, sont visés ; il est moins clair pour les agressions individuelles, le terme "musulmans" étant maintenant utilisé pour des populations jadis appelées "arabes". 
 
En ce qui concerne la médiatisation de ces actes, Monsieur Zekri a convenu qu'elle était insuffisante pour les actes "non dramatiques", mais que cela concerne à la fois les Juifs et les Musulmans. Nous avons aussi interrogé Monsieur Zekri sur les actes anti-musulmans perpétrés par des Juifs : il a convenu que leur nombre était extrêmement réduit, citant seulement deux affaires.
 
En ce qui concerne le CCIF (Collectif contre l'Islamophobie en France), Monsieur Zekri nous a confirmé qu'il n'était pas considéré comme un interlocuteur fiable par le Ministère de l'Intérieur, en raison de son mode d'enregistrement d'actes considérés par lui comme islamophobes (exemple : lois sur les signes religieux distinctifs, à l'Ecole ou dans le domaine public ; idem en ce qui concerne la discrimination à l'embauche, qui relève en fait du racisme). Cependant, le CCIF bénéficie à la fois d'aides extérieures importantes, et d'un bon réseau médiatique.
 
Notre invité constate et déplore la banalisation des propos et menaces sur Internet, et la mollesse des Autorités ces dernières années pour agir contre certains sites - la réponse étant que les hébergeurs de sites ou les réseaux sociaux en particulier sont de droit américain. Il s'est dit ouvert à des actions communes sur ce sujet, auprès des opérateurs (FaceBook, Tweeter en particulier), pour les inciter à filtrer, voire sanctionner, les propos racistes et antisémites.
 
Enfin, l'actualité dramatique des attentats du 13 novembre a, bien sûr, été évoquée. Monsieur Zekri a émis le souhait que la qualification de l'ensemble des Imams de France soit vérifiée par un audit général du CFCM, que les Mosquées salafistes soient fermées, et que certains "Imams auto-proclamés" et propageant la haine soient expulsés.