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Publié le 10 Avril 2014

Alexandre Arcady : « Je ne voulais pas qu'on oublie Ilan »

Propos recueillis par Nicole Clodi, interview publiée dans la Dépêche le 10 avril 2014

Alexandre Arcady et Pascal Elbé sont venus hier à Toulouse présenter le film «24 jours, la vérité sur l'affaire Ilan Halimi». Ce jeune homme torturé et tué en 2006, à Paris, parce qu'il était juif. Le film — bouleversant et d'utilité publique — sortira sur les écrans le 30 avril.

Qu'est-ce qui vous a décidé à raconter l'affaire Ilan Halimi ?

Alexandre Arcady : En temps que citoyen et cinéaste, je continue à faire des films en rapport avec le monde qui nous entoure. En 2006, après la mort d'Ilan Halimi, je ne pouvais que me poser cette terrible question : notre pays est-il malade à ce point ? Pour moi, faire ce film est alors devenu une nécessité : je ne voulais pas qu'on oublie Ilan, je voulais aussi lancer un cri d'alarme, et dire : on en est là. … Mais il m'a fallu attendre le témoignage de Ruth Halimi, la mère d'Ilan, avec le livre qu'elle a publié, pour trouver le chemin à prendre…

… Pourquoi a-t-on nié si longtemps le caractère antisémite de l'affaire ?

Alexandre Arcady : La police, bernée par Fofana, a d'abord considéré que c'était un acte «simplement» crapuleux. Je connais les policiers qui ont mené l'enquête : cela les hante encore. Il y avait le contexte : c'était après les émeutes de l'été 2005, il y avait eu la fausse alerte à l'agression antisémite f par la jeune fille du RER et dans le souci de ne pas jeter de l'huile sur le feu et «stigmatiser» une communauté, les autorités ne voulaient pas parler d'antisémitisme…

… Ressentez-vous, tous les deux, un antisémitisme, en France ?

Pascal Elbé : Je trouve la France dans une situation alarmante. Les chiffres des actes antisémites sont consternants et sur cette question en Europe, nous sommes en tête de gondole… Tout le débat sur l'affaire Dieudonné a montré la gravité de la situation. On a laissé dire, des années ce prédicateur qui prône la mort des juifs et encore on a débattu sur «sa liberté de parole»… Dieudonné a créé un comité de soutien pour la libération de Fofana, c'est dire… Et là, sur ce film qui ne raconte pas autre chose que l'histoire d'un gamin qui s'est fait torturer et le silence assourdissant des 500 familles de la cité qui l'ont entendu hurler sa souffrance 24 jours durant sans rien dire, on trouve encore sur les réseaux sociaux des gens qui viennent faire des commentaires nauséabonds.

Alexandre Arcady : C'est un fait l'antisémitisme est là. On a raté l'intégration de toute une population immigrée et cet échec-là on ne veut pas le reconnaître. Nous sommes dans une situation de fracture absolue. «Liberté de parole» : ça suffit de laisser dire les choses, à un moment, il faut s'exprimer et dire «non». Quand on s'attaque aux Juifs, on s'attaque à soi-même. C'est toute la France qui est malade.

Pascal Elbé: Et j'ajouterai : quand on dit «que l'affaire Halimi c'est juste le fait de crétins», je dis non. Ce sont des crétins, des barbares qui n'ont aucun respect de la vie — ils n'ont d'ailleurs jamais exprimé le moindre regret. Mais ils ne sont pas que ça : ils sont le monstrueux produit d'un nuage toxique, d'une idéologie toxique qu'on a laissée se répandre sur nous, sans rien dire… Lire l’intégralité.

Source: http://www.ladepeche.fr/article/2014/04/10/1860598-alexandre-arcady-presente-film-choc-affaire-ilan-halimi.html

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