Actualités
|
Publié le 12 Décembre 2014

Discours d’Eliane Klein lors du dîner du CRIF Région Centre Orléans

« Mes pensées et ces quelques mots sont dédiés à Jonathan Sandler, 30 ans, à Arieh Sandler 5 ans Gabriel Sandler 4 ans, Myriam Monsonego, 8 ans,  assassinés à Toulouse et les 3 militaires français: Imad Ibn Zlaten, Mohamed Legoual et Abel Chemnouf assassinés à Toulouse et Montauban.

Au risque de jeter une ombre sur ce dîner convivial, je  rappelle ce qu'écrivait Charles Péguy dans "Notre jeunesse" en 1910, incitant chacun à dire "ce qu'il voit", et, plus difficile encore, à "voir ce qu'il voit".

J'ajoute, ce soir, à entendre ce qu'il entend, à lire ce qu'il lit".

Il y a en Europe, et en France, en particulier, un regain des discours racistes, mais aussi, une augmentation très importante et très préoccupante de la violence antisémite- en discours et en actes. Les actes antisémites ont doublé en France dans la dernière décennie. Nous sommes inquiets de voir ressurgir dans notre pays une part sombre que nous pensions effacée.

"La parole antisémite se délie, tristement révélée par "l'affaire Dieudonné", capable de produire et de diffuser à grande échelle des propos insultants, blessants et qui s'appliquent à susciter la haine de l'autre" (Enquête de Dominique Reynié).

L'antisémitisme des partisans du Front national n'a pas disparu, mais un nouvel antisémitisme se répand  dans notre pays: (cf. Jacques Tarnéro n°30 des Etudes du CRIF).

A ce propos, je fais mienne la déclaration de Robert Badinter exprimant son inquiétude face  au nouvel antisémitisme  qu'il nomme" l'antijudaïsme islamique".

"C'est la première fois, depuis la fin de l'occupation, que l'on entend hurler dans les rues de Paris (et d'autres villes de France)"dehors les Juifs". Enfant, j'ai vu, sur les murs des maisons, écrit à la craie, "mort à Blum, mort aux Juifs". Après la guerre, on n'osait plus tenir de tels propos. J'ai vécu, adolescent, la nuit de l'occupation. Je sais ce que signifie la haine des Juifs et le cri" dehors les Juifs". C'est la même haine des Juifs qui court comme un fil tragique tout au long de leur histoire".

Mais nous ne sommes pas dans les années trente (ni 40).

Il s'agit un "nouvel "antisémitisme  qui se nourrit des mêmes stéréotypes que  le "vieil" antisémitisme, comme la "théorie du complot", mais qui, en particulier depuis la conférence de Durban, en l'an 2000 , s'est propagé sur l'ensemble de la planète, grâce à Internet, aux réseaux sociaux et certains médias. Porté par l'islamisme radical, cet antisionisme-il faut dire son nom-  s'est développé par l'endoctrinement dans les prisons et certaines mosquées et a gagné des milieux extrémistes de tous bords.

  Comme l'a écrit Boualem Sansal:" le fond, le vrai, le seul qui les anime, c'est la haine incommensurable, dévorante, que ces gens (évoquant les islamistes) portent à Israël.

 En France, cette haine des Juifs se double d'une haine de la République et de ses institutions démocratiques.

Elle a mené au crime- assassinat d'Ilan Halimi, assassinat, de sang froid,  d'enfants juifs et de leur père à Toulouse, précédé de l'assassinat des militaires français à Montauban et Toulouse., puis , à Bruxelles, tuerie perpétrée au Musée Juif par un djihadiste français, embrigadé en prison par des islamistes radicaux, admirateur de M Mérah, il avait réussi à rejoindre Daesh en Syrie.

L'islamisme radical, incarné aujourd'hui par le Daesh-Etat islamique- est non seulement l'ennemi acharné des Musulmans qui ne" pensent pas comme eux", les régimes arabo-musulmans sont leur cible privilégiée- chaque djihadiste contribuant à diaboliser l'Islam-. Mais il est aussi l'ennemi  des minorités religieuses- les Yézidis persécutés, assassinés, les Chrétiens d'Orient humiliés, forcés à l'exil ou massacrés, il est l'ennemi des femmes- toutes les femmes:

Asia Bibi, Chrétienne pakistanaise, condamnée à mort pour blasphème, Reyhané Jabbari, Musulmane iranienne, exécutée à Téhéran, sont les symboles de l'oppression des femmes en pays islamique.

L'islamisme radical est l'ennemi des démocrates, l'ennemi de la culture, de la civilisation, de la vie, empruntant, dans son projet totalitaire, les techniques sophistiquées de la communication ("l'industrie du divertissement" A.F): Les jeux vidéos, la mise en scène de la violence extrême qui terrorise, la déshumanisation des êtres humains, l'anéantissement de populations entières en vue d'établir le Califat, une dictature islamique.

 On a longtemps cru que les candidats au djihad étaient des jeunes -souvent issus de l'immigration dont le mal-être, le déclassement, la frustration sociale en faisaient des proies faciles pour les recruteurs islamistes radicaux. Or, nous savons maintenant que des Français "de souche", des Français "moyens", des jeunes apparemment sans problème, à la recherche d'une identité de rechange,  subjugués par des images d'actes de terreur, rapidement convertis à l'islam ou plutôt, convertis à la radicalisation. Puis, armés, entrainés, pris en main par de véritables terroristes, partent par centaines faire le djihad en Syrie et en Irak. Environ plus d'un millier de Français impliqués dans le Djihad, CONSTITUE LE PLUS IMPORTANT CONTINGENT DE CETTE INTERNATIONALE DU CRIME.

Certains reviennent, prêts à continuer le Djihad en France - en Europe, comme des bombes à retardement potentielles.

Aujourd'hui, nous sommes un certain nombre de citoyens à évoquer et redouter le péril que font courir à notre pays toutes les atteintes aux valeurs universelles de la Démocratie dont je viens de citer quelques exemples. Il faut regarder cette réalité en face. Les foyers salafistes livrent une guerre idéologique dans notre pays: la radicalisation islamiste est une arme de destruction de nos valeurs démocratiques et de notre fondement républicain- la laïcité en particulier.

Le CRIF réfléchit à la manière de combattre ce fléau qui menace, non seulement les Juifs de France, mais la République elle -même. Je m'associe à ce combat qui concerne toute la société française.

Comme l'a déclaré le Juge Marc Trévidic : " La République doit demeurer ce socle commun et intangible qui éteint les feux du fanatisme".

Pour terminer, je reprends les termes de Christiane Taubira, à propos de Dieudonné, mais que l'on peut appliquer à tout ce qui concourt à déstabiliser la démocratie:

"La démocratie est fragile, mais elle ne peut se découvrir impuissante face aux périls qui la menacent intrinsèquement. Il faut donc descendre dans l'arène, disputer pied à pied... L'espace de vie commune, faire reculer cette barbarie, occuper le terrain par l'exigence et la convivialité." »

Maintenance

Le site du Crif est actuellement en maintenance