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Publié le 26 Avril 2017

#France - Le temps de la campagne présidentielle, qui est le nouveau président du FN ? Par Marc Knobel

L'annonce de l'attribution de la présidence par intérim à un lepéniste historique peut surprendre. Et pourtant, quoi de surprenant ?

Il va endosser désormais le costume de président du FN, le temps de la campagne, depuis l'annonce de Marine Le Pen, lundi soir, concernant son retrait de la présidence du FN, afin de se concentrer sur sa candidature au second tour de la présidentielle. Il s’appelle Jean-François Jalkh.

Ce n'est qu'en 2011 que Jean-François Jalkh se rapproche de l'actuelle présidente du parti, qu'il soutient lors du congrès de Tour - contre la candidature de Bruno Gollnish. L’actuel vice-président du FN en charge des affaires juridiques et des élections est pourtant un homme discret et il est peu connu du grand public. Mais, il est surtout un dirigeant incontournable du FN. Il n'a pas encore 18 ans lorsqu'il prend sa carte au parti, en 1974.

Voici comment Jean-François Jalkh décrit ses débuts dans la formation fondée par Jean-Marie Le Pen :

« Moi, j’ai rejoint le Front National à un moment donné où il était dans une crise très grave dont j’étais pas très conscient parce que n’étant pas très au fait des arcanes de l’extrême droite. Donc moi, j’étais un peu… complètement déconnecté par rapport à tout ça, […] et quand je suis arrivé, les gens d’Ordre Nouveau étaient déjà partis. Il y avait très, très peu de jeunes au FNJ (Front national de la jeunesse). Il y avait un quarteron de jeunes militants, je dirais, d’ailleurs, tous les jeunes étaient partis du Front National. Il n’y avait plus de jeunes à l’époque. C’était vraiment un mouvement complètement groupusculaire avec quelques jeunes. Mais, je dirais, l’essentiel des jeunes était parti avec les gens d’Ordre Nouveau au PFN (1) … En fait, le Front national de la Jeunesse n’était pas véritablement associé au Front National. C’était plutôt une fédération de jeunes où se retrouvaient les jeunes nationalistes et surtout à sa création les jeunes d’Ordre Nouveau en fait. Il n’y avait pas de structure Front national de la Jeunesse en tant que tel. Il y avait suffisamment de structures de jeunes en dehors du Front national de la Jeunesse où les jeunes se retrouvaient […] Or c’était une époque, aussi, où évidemment il y avait en plus de ça une concurrence entre différents jeunes, il y avait le GUD, il y avait le GAJ, etc. […]. Le GAJ à l’époque, c’est le Groupe Action Jeunesse qui était lié à un type qui s’appelait Malliarakis, Jean-Gilles Malliarakis et donc, ce qui s’est passé c’est que, donc, oui, il y avait aussi de la part des jeunes, toujours une pression pour des opérations activistes, pour des opérations politiques, un peu musclées, des choses comme ça, et alors, évidemment, c’est incompatible, avec une action, je dirais, politique responsable […]. Je vais dans le mouvement pour pouvoir plus m’amuser, plus que les débats, donc c’est pas, c’est pas du coup, toujours très, très facile. Alors c’est une époque aussi où l’on était très anticommuniste, très antisoviétique à l’époque. Il y a eu quelques manifestations un peu musclées, quelques interpellations, quelques soirées au poste, c’était un peu ça. Mais c’est vrai aussi que c’était assez formateur, ça donne de l’assurance, le culot aussi, que n’ont pas les gens qui ont un parcours plus conventionnel (2) »

Un proche de Jean-Marie Stirbois

Dans les années 80, Il se rend souvent à Dreux parce qu’il est un proche de Jean-Pierre Stirbois, alors secrétaire général du FN (depuis 1981) et député européen. Stirbois n’est pas n’importe qui. Pendant une dizaine d’années, il fut l'homme qui mit en place l'organisation du Front national et va faire entrer le parti d'extrême droite sur l'échiquier politique français. La carrière de Jean-François Jalkh prend un tournant en 1986, lorsqu’il est élu député, comme 34 autres représentants du parti, grâce à la proportionnelle instaurée par les socialistes.

Jean-François Jalkh à un rassemblement pour « célébrer » Pétain

Mais, ce proche et compagnon de route de Jean-Marie Le Pen se fait également remarquer dans la mouvance, lorsqu'il commémore en 1991, à ses côtés, la mort de Philippe Pétain, à l'église traditionnelle Saint-Nicolas-du-Chardonnet. Le Monde du 25 juillet 1991 commente ce rassemblement, en ces termes : « Près de deux cents personnes se sont rassemblées, mardi 23 juillet, dans l'église Saint-Nicolas du Chardonnet à Paris, pour célébrer le quarantième anniversaire de la mort du maréchal Pétain, à l'appel de l'association nationale " Pétain-Verdun ". Le président de l'association, M. Robert de Perier, un membre du bureau politique du Front national, M. Jean François Jalkh, ainsi que l'ancien chauffeur officiel du maréchal Pétain, ont assisté à cette cérémonie. Dans un message lu à l'assemblée, un évêque traditionaliste, Mgr Bernard Tissier de Mallerais, a appelé les participants " à continuer à œuvrer pour la restitution de l'honneur outragé de ce grand soldat ", et " à expier par [leur] prière et [leur] action le péché public commis par ses juges". »

C’est aussi en 1984, rapporte l’historienne Valérie Igounet dans son « Le Front national » (Seuil, 2014) qu’avec Roland Gaucher (ancien dirigeant des Jeunesses nationales populaires, émanation du Rassemblement national populaire (RNP) de l’ancien collaborationniste Marcel Déat sous l’Occupation) ; de Michel Collinot, lui-même proche de Jean-Pierre Stirbois, (qui militait au Mouvement jeune révolution (MJR) dans les années 1960) et de Jean-François Touzé, un autre proche de Stirbois, que Jean-François Jalkh est chargé de réaliser un journal militant.

Jean-François Jalkh, négationniste ?

Laurent de Boissieu, journaliste politique dans le quotidien La Croix, a posté ce 25 avril un tweet, où le nouveau président du FN semble nier l'utilisation, par les nazis, du Zyklon B pendant la seconde guerre mondiale. Le site Internet Arrêt sur images amené l’enquête. D'où vient cette citation, s’interroge Arrêt sur images ? De la revue universitaire Le Temps des Savoirs. Dans ce numéro publié en mars 2005, la politologue Magali Boumaza publie un article de près de 40 pages intitulé : "Une création illégitime ? Le Front national de la Jeunesse". C'est dans ce cadre que Jalkh est interrogé sur Robert Faurisson, et ses écrits négationnistes. Et qu'il déclare : « Moi il se fait que j’ai été amené à lire, par exemple, des ouvrages de gens qui sont des négationnistes ou des révisionnistes. Bon, ben moi, honnêtement, moi, je ne suis pas négationniste, mais je dis, moi, quelque chose qui m’a énormément surpris, dans les travaux d’un négationniste ou d’un révisionniste sérieux, ce qui justement m’a surpris c’est le sérieux et la rigueur, je dirais, de l’argumentation. Bon, même un type comme Faurisson, par exemple, qui est professeur à la faculté à Lyon, il est professeur de faculté, il est quand même prof 20, etc ».

Sur Twitter toujours, le journaliste de La Croix indique cependant avoir reçu un « appel » du nouveau président du FN, « qui nie avoir tenu de tels propos ». Admettons. Cependant, il convient à Jean-François Jalkh non pas simplement de démentir ou de nier des propos illicites, mais d’en apporter la preuve.

Jean-François Jalkh, mis en examen

Jean-François Jalkh est mis en examen le 19 mai 2015. Il est poursuivi en tant que secrétaire général de Jeanne, un micro parti dirigé par des personnalités proches de Marine Le Pen. Ce micro-parti fait lui-même l’objet d’une mise en examen en tant que personne morale. Il est le premier haut cadre du FN à être inquiété dans cette affaire.

Le vice-président du Front national est également visé par une plainte rappelle France Info du 25 avril 2017, pour avoir, avant les municipales de 2014, en tant que directeur des publications du parti, donné son aval à une brochure interne préconisant la "priorité nationale" dans l'attribution de logements sociaux. Dans ce cadre, son immunité parlementaire a été levée par le Parlement européen en novembre 2016.

« Le visage hideux » du FN

Avec lucidité, mardi 24 avril, sur Twitter, le président LR de la région Hauts-de-France, qui a battu Marine Le Pen avec l’aide de la gauche aux régionales, s’est « étonné » de cette nomination de Jean-François Jalkh, révélateur selon lui du « hideux visage » du FN :

« La nomination de @JFJalkh à la présidence du #FN montre le hideux visage de ce parti. Comment s'abstenir au 2nd tour de la présidentielle ? »

Note :

    1 - Cité par Bernard Schalscha, « Jean-François Jalkh, le vrai visage du FN », La règle du jeu, 25 avril 2017.

    2 - Idem.

A lire aussi : Jean-François Jalkh, un compagnon de route de Jean-Marie Le Pen aux manettes du FN

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