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Publié le 17 Juillet 2015

Journée nationale à la Mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’Etat français et d’hommage aux Justes à Drancy

"La rafle du Vel d’hiv ce n’est pas la fin, ce n’est que le début. Le début d’une saison en enfer" 

Ariel Amar a représenté le CRIF, jeudi 16 juillet  2015 à Drancy. Ci-après son allocution.
 
"Il est dans la vie d’une nation, des moments qui blessent la mémoire, et l’idée que l’on se fait de son pays ».
C’est par ces mots simples et fondamentaux, qu’il y a 20 ans jour pour jour le Président de la République, Jacques Chirac, introduisait son discours historique prononcé à Paris. 
En prononçant ce discours, le chef de l’Etat a inscrit la mémoire des crimes de Vichy dans l’histoire de France. 
17 ans plus tard, en 2012, le président Hollande suit les pas de son prédécesseur et affirme : « La vérité c’est que le crime fut commis en France, par la France ».
 
Cette vérité est quantifiable ; en 2 jours, le 16 et le 17 juillet 1942 la police française frappait à la porte de 13 152 hommes, femmes et enfants, tous juifs. Ce fut la plus grande arrestation massive de juifs réalisée en France.
La rafle du Vel d’hiv fut suivie de bien d’autres rafles certaines effectuées dans une zone sud non occupée ou les juifs avaient l’impression que la France les protègerait du pire
En tout 80 000 juifs moururent dont un grand nombre pendant la terrible année 1942.
 
76 000  juifs de France moururent dans une déportation
3  000 moururent dans les camps organisés en France
et 1000 probablement furent fusillés dans notre pays
Ici, à Drancy furent envoyés les couples sans enfants et les célibataires.
 
Là bas, au Vel d’hiv,  ont été parquées les familles, pères mères et enfants, dans des conditions inhumaines avant d’être transférées à Beaune la Rolande et à Pithiviers.
La rafle du Vel d’hiv ce n’est pas la fin, ce n’est que le début. Le début d’une saison en enfer, particulièrement pour les enfants. Selon la directive de Vichy  « les enfants ne devaient pas partir dans les mêmes convois que leurs parents. »
 
Cette directive, comme les autres, fut respectée scrupuleusement. Près de 4000 enfants se sont retrouvés seuls dans le camp de Pithiviers ou de Beaune la Rolande au matin du 3 août, quand leurs mères leur ont été arrachées.
Ces enfants, que sont-ils devenus ? A de très rares exceptions près, ils ont été déportés à Auschwitz et aucun d’entre eux n’en est revenu. Aujourd’hui le CERCIL-le Centre d’études et de recherches sur les camps d’internements dans le Loiret et la déportation juive-préserve leur mémoire.
 
De cette mémoire, que reste-il notamment parmi les jeunes générations ? Quel enseignement retient-on de l’évènement ? Une récente étude conjointe de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah et Fondapol montre que :
88% des jeunes français interrogés considèrent la Shoah comme l’évènement le plus important survenu lors de la seconde guerre mondiale, 
92% des jeunes européens qualifient de génocide le massacre des juifs. 
 
Ces chiffres  nous disent en substance que l’évènement est enraciné au cœur de la mémoire de l’Europe et que son enseignement via le cursus scolaire en reste le moyen d’accès privilégié. 
 
Et pourtant, tous ces efforts considérables ne nous immunisent pas contre la montée de l’antisémitisme  nourrie par une détestation d’Israël où tous les amalgames, où la désinformation, et où la mauvaise foi  sont les catalyseurs qui aboutissent à la haine du juif, à la haine de l’autre.
A quoi servent alors ces commémorations ? 
 
La loi instaurant la  « commémoration de la journée nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et antisémites de l’état français et d’hommage aux justes de France »nous rappelle que s’il y eut des salauds, il y eut aussi des personnes admirables, policiers ou anonymes, et qu’il est de notre devoir de n’oublier ni les uns ni les autres et que tous ensemble nous devons tirer les leçons du passé, que nous savons quelle en est la dimension politique, morale et universelle.  
Les commémorations peuvent servir à faire réapparaitre des sentiments de responsabilité individuelle et collective.
 
Ces commémorations existent aussi parce qu’elles sont  le moment de dire son appartenance à la communauté nationale. 
C’est cet attachement qu’ont manifesté les français en participant massivement à la marche du 11 janvier. 4 millions de personnes pour pleurer l’assassinat de 17 concitoyens et dont je vais citer chaque nom :
 
Charb
Cabu
Wolinski
Tignous
Honoré
Bernard Maris
Michel Remaud
Elsa Cayat
Frédéric Boisseau 
Franck Brinsolaro
Ahmed Merabet
Musthapha Ourrad
Clarrissa Jean-Philippe
Yohan Cohen
YohavHattab
François Michel Saada
Philippe Braham
 
Comment notre pays va-t-il se relever d’un tel drame ? 
Comment se fait il que tant de jeunes sont fascinés par des idéologies aussi monstrueuses ?
De la stupeur à l’horreur, nous avons vu monter progressivement  et insidieusement en France l’influence de l’islamisme radical et avons payé le prix de sa violence aveugle et meurtrière et où les juifs ne sont désormais plus les seules cibles.
Nous savons que la volonté des pouvoirs publics, et au plus haut sommet de l’état, est sans faille et garantit notre sécurité à tous.
 
J’en profite pour rendre hommage à toutes les forces de police, à l’armée, aux CRS qui sont les vigies des lieux de vie où nous nous rendons.
Cette commémoration vient aussi nous rappeler nos devoirs et nous enjoint :
De poursuivre le combat de nos ainés pour défendre nos valeurs sociétales.
De gagner ce combat contre un tel fléau, oui, c’est possible, à une condition, c’est de rester unis et solidaires autour des valeurs républicaines à la manière du 11 janvier mais pas seulement le temps du 11 janvier 
et de clamer aussi haut et aussi fort que possible que cette vision du monde est une monstruosité que nous n’accepterons jamais.
 
Et comme l’a déclaré le premier ministre Manuel Valls « nous ne pouvons pas perdre cette guerre, parce que c’est notre société notre civilisation et nos valeurs que nous défendons »
Ce n’est pas une bande d’islamistes radicaux obscurantistes et totalitaires qui mettra à genou notre pays, qui nous imposera sa vision macabre de la société, ici en France rien ni personne ne nous empêchera d’être libres, 
Parce que ce pays est un des inventeurs de la démocratie moderne,  
Parce que ce pays fut un des premiers de l’Europe occidentale à accorder aux juifs une citoyenneté pleine et entière, 
Parce que ce pays est tout simplement le nôtre, que nous l’aimons et le préservons. 
Parce que ce pays, nous le bénissons et continueront, comme chaque shabbat, dans toutes les synagogues de prier pour la république et pour le peuple Français.
 
Je finirai par une citation d’Albert Einstein qui disait : « le monde est dangereux à vivre non pas tant à cause de ceux qui font le mal mais à cause de ceux qui voient et qui laissent faire ».
 
Il est donc de notre responsabilité à chacun de nous, élus et simples citoyens, nous tous, citoyens Français sans aucune exception chacun à son niveau de tout mettre en œuvre pour faire vivre et rayonner dans nos frontières et au-delà, le triptyque républicain : 
 
Liberté, Egalité, Fraternité."