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Publié le 23 Avril 2012

Lettre d’un otage condamné à mort

Le 23 avril 1942, Jacques Duchesne et Jean Oberlé choisissent de lire au cours de l’émission “Les Français parlent aux Français” la lettre d’un otage écrite à sa femme avant d’être fusillé par les Allemands.

C’aurait pu être un communiste. Les Allemands n’ont pas un vocabulaire très étendu: otage, ça veut dire Juif ou communiste ou les deux à la fois. En tout cas, c’était un Français

Ma chère femme et enfants,

 

Je vous écris ces quelques lignes pour vous faire savoir que je suis condamné à mort comme otage, par ordre de la Kommandantur. J’espère que tu t’occuperas des enfants. Il faut leur faire comprendre que leur père a été fusillé comme otage innocent, sans avoir rien fait de mal. J’espère que le jour où ils deviendront grands, ils t’aideront . Il ne faut pas m’oublier. Pensez toujours à moi.

 

Il faut que tu travailles pour élever les enfants. Après, ils travailleront de leur côté pour t’aider, car ce qui arrive est la volonté de Dieu. On ne peut pas faire autrement. Annonce cette triste nouvelle à toute la famille. Je ne suis pas seul, nous sommes plusieurs qui sommes condamnés à être exécutés demain matin venant de Drancy.

 

Reçois mes derniers baisers ainsi que mes chers enfants et toute la famille. Pense toujours à ton mari. Je t’embrasse fort pour la dernière fois et adieu pour toujours”.

 

Pour montrer le cynisme manifesté par la kommandantur de Paris, les deux chroniqueurs indiquent que le malheureux a été fusillé le 15 décembre 1942!  Que son épouse a reçu sa dernière lettre et instruction de retirer les effets d’habillement et les objets de valeur de son mari avant le 10 janvier 1942. Cette victime était un Juif, mais comme s’accordent à le reconnaitre les deux speakers: “C’aurait pu être un communiste. Les Allemands n’ont pas un vocabulaire très étendu: otage, ça veut dire Juif ou communiste ou les deux à la fois. En tout cas, c’était un Français”.

 

Duchesne et Oberlé insistent sur le fait que les Allemands continuent à exécuter des otages. Et de citer l’exemple du Calvados où après le déraillement du train Amiens-Cherbourg, trente communistes et Juifs ont été passés par les armes. Oberlé ajoute: ” Les fusillades, les déportations, les prisons, les camps de concentration, toutes ces horreurs vont encore augmenter. Si Laval imagine se rendre plus populaire, il se trompe”. Les deux chroniqueurs dénoncent cette attitude du gouvernement qui consiste à dire: il faut cesser le combat.

 

Tant qu’il y a des boches en France, le combat ne peut pas cesser. Jacques Duchesne conclut: ” Le seul fait que les Français résistent prouve que si le combat ne continue pas, la lutte contre l’envahisseur continue, par tous les moyens. En attendant qu’un jour, le vrai combat reprenne pour la libération du territoire”.