Des violons rescapés d'Auschwitz pour une série de concerts en Israël

 
Publié sur Culturebox France Télévisions le 26 juillet 2016
 
Ils ont été abîmés par la neige, cachés dans les caves d'un ghetto, jetés d'un convoi ou ont permis de sauver pour quelques belles notes la vie de leurs propriétaires : 30 violons "rescapés" de la Shoah ont repris vie le temps d'une série de concerts en Israël.
 
Au moment de placer sous son menton le violon, brillant de laque sous les  projecteurs de l'auditorium bondé de Tel-Aviv en ce mois de juillet, le soliste Guy Braunstein a la main qui tremble. L'instrument qu'il tient était celui d'un violoniste de l'orchestre d'Auschwitz. Son propriétaire a été forcé de jouer des jours durant pour accompagner les marches vers le travail forcé, souvent antichambre de la mort pour les déportés les plus affaiblis. Dans l'auditorium pétrifié et silencieux, accompagné des musiciens de l'orchestre de chambre de Jérusalem, en quelques mouvements d'archet et sur un adagietto de Gustav Mahler, la complainte du "violon d'Auschwitz" met une partie du public en larmes.
        
"J'ai joué des milliers de concerts, mais jamais je n'ai eu l'émotion et le tremblement que j'ai eus en prenant en main ce violon d'Auschwitz, son odeur était différente, j'avais comme l'impression en jouant qu'on m'enfonçait un pieu dans le coeur, car je connaissais son histoire", explique Guy Braunstein. Il a fait carrière à l'orchestre Philharmonique de Berlin et participe pour  la deuxième fois à ces concerts baptisés "Violons de l'espoir" et dont l'un a également eu lieu durant ce mois en Galilée dans le nord d'Israël. 
     
"Pleurs, rires et pières"
 
"Le violon (d'Auschwitz) a joué devant des piles de corps humains. Ce qu'il a vu peut rendre fou", dit le luthier Amnon Weinstein, à l'initiative des concerts déjà organisés en Allemagne, aux Etats-Unis et en Turquie. L'Israélien de 76 ans, lui-même issu d'une famille de juifs lituaniens ayant échappé à la Shoah, a passé plus de 20 ans dans son atelier souterrain de  Tel-Aviv, dans l'odeur de vernis et de laque, à restaurer les violons souvent  récupérés dans un état déplorable.  "Ma mission c'est de mettre la main sur tout violon rescapé de la Shoah, de l'acquérir, de le réparer et d'en faire un violon capable d'être joué pour un  concert, je veux que ces violons soient joués, qu'ils fassent entendre ce  qu'ils ont à dire", dit M. Weinstein. "Car de ces violons sort un son très particulier, s'échappent des voix, des  pleurs, des rires et des prières", assure-t-il.
 
Sa collection compte aujourd'hui 60 pièces, des violons et des violoncelles. Chacun témoin et mémoire d'une histoire, souvent tragique, d'un Juif en Europe pendant la Shoah. La plupart ont été fabriqués dans des ateliers en Allemagne ou en Tchécoslovaquie et portent une étoile de David ou un nom inscrit à l'intérieur... Lire l'intégralité.