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Publié le 22 Décembre 2005

Exil impossible. L’errance des Juifs du paquebot ‘St-Louis’ Par Diane Afoumado (*)

Il faut être reconnaissant à l’auteur d’avoir exhumé la triste odyssée du paquebot Saint-Louis qui, en été 1939, erra désespérément sur l’océan Atlantique avec, à son bord, près de 1000 Juifs fuyant l’étau nazi. Fleuron de la flotte allemande, le Saint-Louis, navire de luxe de la compagnie Hapag, quitta Hambourg le 13 mai 1939 à destination de La Havane, eldorado mirifique pour 937 Juifs en détresse, mais qui s’avéra, hélas, être un mirage pour ces boat people avant l’heure.


Diane Afoumado, avec patience et ténacité, s’est plongée dans les archives les plus diverses et les moins connues. Une évidence ressort de son travail minutieux : aux heures sombres de la traque aux Juifs, à la veille de la Seconde Guerre mondiale et alors que la Shoah était imminente, le monde entier a fermé les yeux. Personne n’a voulu de ces immigrés dont beaucoup avaient payé leur passage au prix fort et disposaient de visas et d’affidavits. En premier lieu Cuba, les États-Unis et le Canada.
Véritables damnés de la mer, errant de port en port, les réfugiés juifs du Saint-Louis, malgré les offres financières de plus en plus élevées faites aux éventuels pays d’accueil par les organisations juives, finiront par faire demi-tour en direction de l’Europe.
Après des semaines d’espérances vaines, les passagers seront répartis entre l’Angleterre, la France, la Belgique et la Hollande. Plusieurs centaines, hélas, ne trouveront là qu’un court répit. L’invasion hitlérienne les conduira vers les camps de la mort.
Deux belles figures émergent de cette tragique épopée : Gustav Schröder, le capitaine allemand, qui fera sienne la cause des passagers. Mort en 1959, il recevra à titre posthume la médaille des Justes de Yad Vashem. Morris C. Troper, directeur européen du Joint, qui se dépensera sans compter, des jours et des nuits entières pour tenter de trouver une terre d’asile pour les malheureux passagers.
Si le célèbre Exodus a laissé des traces profondes dans les mémoires et si le Saint-Louis, grâce au travail de Diane Afoumado, resurgit de l’oubli, l’auteur n’oublie pas de mentionner les centaines d’autres vaisseaux fantômes qui ont frappé aux portes de la planète pour débarquer leur cargaison de Juifs maudits et indésirables. Parmi eux, le Cairo, l’Usaramo, le Monte Olivia, l’Orbita, l’Orduna, l’Orinoco ou encore le Flandre.
La liste complète des passagers du Saint-Louis avec la mention de leur destination finale complète cet ouvrage remarquable qui fera date.
Jean-Pierre Allali
(*) Éditions L’Harmattan. Août 2005. 286 pages. 23€
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