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Publié le 5 Juillet 2021

Commissions du Crif - Étude : Quels sont les troubles endocriniens sur les enfants des Survivants de la Shoah ?

L'AMIF mène, en étroite collaboration avec la Commission du Souvenir du Crif, une nouvelle étude sur l’impact du traumatisme de la Shoah chez les enfants de rescapés de la Shoah. "Quels sont les troubles endocriniens sur les enfants des Survivants de la Shoah ?" Découvrez cette étude à travers l'interview du Dr Muriel Vaislic, endocrinologue-diabétologue.

Propos recueillis par Bruno Halioua, président de la Commission du Souvenir du Crif et de l'AMIF.

L’impact du traumatisme de la Shoah chez les enfants dépend de nombreux facteurs étroitement intriqués : l’histoire familial, le pays de résidence, le milieu dans lequel a vécu le Survivant avant et après la Guerre, l'adaptation post-traumatique et la stratégie d’adaptation réparatrice adoptée par l’enfant de survivant consciemment ou inconsciemment pour compenser le vécu traumatique de ses parents.

Sous l’égide du professeur Yaël Danieli, un Groupe de Recherche de l'AMIF sur les Enfants des Survivants de la Shoah (GRAESS), coordonnée par Muriel Vaislic endocrinologue et par Patrick Bantman psychiatre en étroite collaboration avec Rachel Rimmer de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah et la commission du souvenir du Crif, a vu le jour, afin de mieux comprendre les conséquences du vécu traumatique de la Shoah chez les enfants de survivants de la Shoah en France.

Dans ce but, nous avons mis en place une grande étude et nous sollicitons un peu de temps à tous les enfants de Survivants pour répondre à ce questionnaire, strictement anonyme (Etude du Groupe De Recherche De l'AMIF sur les Enfants des Survivants de la Shoah [GRAESS] - AMIF - Association des Médecins Israélites de France). Les résultats de cette étude sont d’autant plus importants qu’ils nous permettront d’améliorer les connaissances sur la transmission transgénérationnelle du traumatisme de la Shoah chez tous les enfants de ces survivants qui ressentent "les cicatrices sans les blessures".

Vous êtes nés après 1945 ? Votre mère et/ou votre père ont subi des persécutions et/ou des restrictions de liberté liées aux législations antisémites durant la guerre 39-45 ? Ils vivaient en France, en Afrique du Nord, dans un pays occupé par les Nazis ou dans un pays dirigé par un régime ayant collaboré avec les Nazis ? Nous vous invitons à participer à cette étude strictement anonyme.

Pour répondre au Questionnaire, cliquez ici

 

Qu’ont montré les études déjà effectuées sur les survivants de la shoah ?

Dr Muriel Vaislic : La Shoah a entraîné un traumatisme extrême qui est unique dans sa violence et sa durée. Les survivants de la Shoah ont fait preuve d’une résilience remarquable. Les chercheurs se sont demandés comment s’est exprimé ce traumatisme et s’il y avait eu une transmission intergénérationnelle. Les travaux du Pr Rachel Yehuda et du Pr Yaël Danieli ont permis de mettre en évidence une vulnérabilité au stress plus importante des enfants des survivants de la Shoah et des différences en terme de séquelles selon le sexe des parents concernés.

Les enfants dont les pères avaient un état de stress post-traumatique ont plus de risques de souffrir de dépression. En revanche, les enfants de mères avec un état de stress post-traumatique ont un risque accru de stress post-traumatique. De plus, le Pr Yehuda a montré une inadaptation de la réponse endocrinologique au Stress à la fois chez les survivants de la Shoah et chez leurs enfants.

 

Quels sont les troubles Endocrinologiques observés ?

Dr Muriel Vaislic : Les glandes endocrines responsables du stress sont les glandes surrénales. En cas de stress aigu, le Système nerveux autonome stimule l’Adrénaline, sécrétée par la médullo surrénale, et l’axe hypothalamo-hypophysaire surrénalien. Cela aboutit à la sécrétion de CRH (Cortisol Releasing Hormone), au niveau de l’hypothalamus, qui part vers l’hypophyse pour stimuler l’ACTH, qui active le Cortisol.

Le retour à un taux basal, du Cortisol est permis par un système dit de rétro-contrôle. Mais en cas d’exposition chronique au stress, on retrouve une modification des mécanismes de régulation dans le sens d’une hyperactivité de cet axe avec pour conséquence une cortisolémie maintenue abaissée.

Les anomalies de la régulation de l’axe Hypothalamo-Hypophyso–Surrénalien semblent transmissibles à la descendance. On retrouve dans les travaux du Pr Yehuda, un taux de Cortisol plus bas chez les enfants des survivants de la Shoah qui souffrent d’un état de stress post-traumatique.

Ces constatations  pourraient en partie s’expliquer par des phénomènes épigénétiques permettant de transmettre l’effet de l’environnement sur l’expression génique  aux descendants, via des mécanismes biochimiques sur les protéines codants pour les gènes de régulation, de la réceptivité du cortisol (FKBP5 et NR3C1). En fait, on retrouve une hypersensibilité des récepteurs au cortisol.

De plus, cette hypersensibilité est probablement impliquée dans la co-morbidité cardio-vasculaire et expliquerait le risque cardio-vasculaire élevé de la population souffrant d’ état de stress post-traumatique.

Sur un autre plan, les études cliniques s’accordent pour retrouver une prévalence accrue de l’état de stress post-traumatique chez les patients ayant des troubles du comportement alimentaire (T.C.A). Le T.C.A, le plus fréquemment retrouvé est l’Hyperphagie boulimique c'est-à-dire l’ingestion de  très grosses quantité de nourriture en un temps record. C’est pourquoi nous avons ajouté au questionnaire initial quelques questions sur le comportement alimentaire.

 

Quel est le but de l’étude que vous avez mis en place ?

Dr Muriel Vaislic : Cette étude, première du genre en France, s’attache à déterminer les conséquences du vécu traumatique de la Shoah chez les enfants de Survivants par le biais du questionnaire dont ils trouveront le lien ci-après.

Sa diffusion doit être la plus large possible pour que l’étude soit significative. Les réponses sont parfaitement anonymisées. L’objectif est de réussir à prévenir et dépister ces troubles pour orienter au mieux ces patients sur le plan thérapeutique lorsqu’ils en ont besoin.

Pour répondre au Questionnaire, cliquez ici

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