Introduction de Jean-Pierre Allai
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Les événements tragiques qui ont traumatisé notre pays ces dernières années : Toulouse, Charlie Hebdo, Hyper Cacher, Bataclan et, plus récemment, le camion fou de la promenade des Anglais à Nice, nous amènent, légitimement, à nous poser la question : l’offensive islamique contre le monde occidental finira-t-elle par avoir raison d’une civilisation millénaire ou parviendra-t-on un jour à dominer et à terrasser ce fléau impitoyable ? En d’autre termes, et pour ce qui concerne la France : la culture en général et sa composante juive en particulier, pourront-elles survivre à cette offensive des tenants d’un obscurantisme dévoyé qu’on pensait à jamais disparu ?
Pour répondre à cette question essentielle, Sandrine Szwarc, historienne, enseignante à l’Institut Universitaire d’Etudes Juives Elie Wiesel et membre du Comité de Rédaction d’ Actualité Juive, commence par brosser un tableau de la situation culturelle de la communauté juive de France au lendemain de la Shoah. Cette communauté, qui a perdu 76 000 de ses membres, se resserre autour de la « yiddishkeit française ». Les titres de la presse yiddish, d’Unzer Wort à Die Naïe Presse en passant par Unzer Kiyoum et bien d’autres, traduisent le besoin impératif de maintenir une culture qui était le quotidien d’un monde englouti par la folie meurtrière du nazisme. C’est le temps du Cabaret Yiddish et du Centre Medem. C’est le temps aussi des controverses infinies entre sionistes, communistes et bundistes. L’arrivée massive, dans les années soixante, de Juifs d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, renforcera numériquement la communauté tout en apportant une touche de jasmin et de piment que porteront haut les Albert Memmi, Marco Koskas, Chochana Boukhobza et tant d’autres.
Il convient de rappeler, comme le fait l’auteur, que quatre prix Goncourt de littérature sont allés à des Juifs traitant de thèmes juifs : Roger Ikor (1955), Romain Gary (1956), André Schwarz-Bart (1959) et Anna Langfus (1962). Sans oublier Elsa Triolet (1944) et Maurice Druon (1948).
L’excellent travail de Sandrine Szwarc ne se limite pas à la littérature. Elle explore avec talent les autres formes de la culture juive : cinéma, théâtre, musique.
Pour ce qui est du cinéma, de la même façon qu’on ne compte plus les prix Nobel juifs depuis la création de cette distinction, on ne compte plus le nombre d’acteurs, de comédiens et de réalisateurs juifs en France. Qu’on songe à Anouk Aimée, Jean-Pierre Aumont, Charles Denner, André Charpak, Jean-Pierre Melville, Alex Joffe, ou Simone Signoret parmi des centaines d’autres.
La peinture c’est , bien sûr, l’Ecole de Paris et La Ruche, Zadkine, Kisling, Kikoïne, Mané Katz, Krémègne, Agam, le miniaturiste Devi Tuszynski et les autres.
Quant à la musique, si le style klezmer, désormais rejoint par la maalouf nord-africain, vient immédiatement à l’esprit, comment oublier que nombre de chanteurs et de compositeurs français ont été et continuent d’être des Juifs, de Barbara à Georges Moustaki en passant par Renée Lebas. Des chansons à thème juif comme « Tire l’aiguille » ou « Le métèque » font désormais partie du patrimoine national.
L’apport plus oriental, ce sont, notamment, Maurice El Médioni, Line Monty, Lili Boniche, Blond-Blond ou encore Salim Halali.
Dans le domaine plus classique, qu’on songe à Darius Milhaud, Louis Saguer, Manuel Rosenthal ou Marcel Mihalovici.
La création, sous la direction d’Hervé Roten, d’un Institut des Musiques Juives, garantit, par le biais des collections conservées et enrichie de manière continuelle, une pérennité du patrimoine musical juif de France.
Un chapitre aussi intéressant qu’original de l’étude de Sandrine Szwarc est consacré à l’impact de la culture israélienne sur les comportements du public français en général et juif en particulier. En littérature, les noms d’A.B. Yehoshua, de Yoram Kaniuk, d’Aharon Appelfeld, de David Grossmann d’Amoz Oz, de Zeruya Shalev ou d’Etgar Keret deviennent familiers au public francophone. Sans oublier Samuel Joseph Agnon, prix Nobel de littérature en 1966.
Le cinéma israélien, lui, a le vent en poupe. Amos Gitaï est omniprésent et « Rosa je t’aime », malgré le temps qui passe, demeure dans toutes les mémoires.
La musique qui nous vient d’Eretz Israël n’est pas en reste, notamment par le canal de l’Eurovision. Idan Rachel et Asaf Avidan ont depuis longtemps dépassé les frontières de leur pays.
L’étude est entrecoupée de commentaires intitulés « Perspectives » dus à des acteurs importants de la culture juive en France : le Grand rabbin Gilles Bernheim,le rabbin Jacky Milewski, Eliette Abecassis, Danielle Guerrier, Michael Sebban, Alain Granat, Michèle Kahn ainsi qu’ à des dessinateurs et des peintres comme Ranson, Kleinmann et Weisberg.
Alors, la culture juive a-t-elle un avenir en France ? Tout dépendra bien sûr, de l’existence même de la communauté juive. L’inquiétude des Juifs de France est réelle et les chiffres de l’alyah qui atteignent des records en 2015, donnent à réfléchir.
Il ne faut pas oublier néanmoins que les Juifs de France représentent plusieurs centaines de milliers d’âmes, que la communauté est bien structurée et que les vecteurs d’un développement culturel de qualité sont en place : réseau scolaire et universitaire, mouvements de jeunesse, musées, associations d’originaires…Et, bien entendu, un ensemble d’intellectuels que nombre de pays nous envient.
Quel avenir, donc ? Les opinions des intellectuels invités à donner leur avis en « perspectives » sont diverses. Pour Alain Granat, fondateur et directeur de JewPop, « Poser la question de l’avenir de la culture juive en France, c’est poser la question de l’avenir des Juifs de France à travers leur identité ». Car, comme dit le peintre Alain Kleinmann, « Tant qu’il y a des Juifs dans un pays, la culture juive existe ! ». Pessimiste, son confrère Richard Weisberg avoue que « personnellement, je ne crois pas, ce qui m’inspire une très grande tristesse, mais c’est ainsi…
Michèle Kahn estime, elle, que « l’avenir de la culture juive en France dépend de sa capacité d’échange avec les diverses cultures linguistiques et religieuses qui fleurissent notre patrie. »
Déléguée diocésaine pour les Relations avec le judaïsme à Saint-Denis, Danielle Guerrier est optimiste : « Oui, la culture juive a un avenir en France, et nous les Chrétiens, nous avons besoins de vous ! »
Laissons le dernier mot à Eliette Abécassis : « Pour l’avenir de la culture juive en France, il s’agit de trouver une façon de penser et d’être dans un pays gagné par la barbarie ».
Ce remarquable numéro des Etudes du CRIF, revue que dirige avec beaucoup de maîtrise et de conviction, Marc Knobel, est dédié à l’écrivain Raphaël Draï, de mémoire bénie et publié à la mémoire du regretté Hubert Allouche, président du CRIF Languedoc Roussillon.
Un grand bravo pour ce beau travail !
Note :
(*) Les Etudes du CRIF N°41. Juillet 2016. 64 pages. 10 euros.
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#Culture - Une exposition à Amiens réunit des fiches de la préfecture sur les Juifs en 1942
L’exposition “Être juif dans la Somme” est présentée jusqu’au 18 février à la bibliothèque universitaire du campus de la Citadelle, à Amiens.
La vie de 40 Juifs amiénois résumée sur des fiches ont ainsi été redécouvertes par l’historien américain David Rosenberg.
Les fiches d’identification présentées dans cette exposition comportent le nom, date de naissance, lieu de naissance des parents et conjoints, nom de tout enfant au-dessus de 15 ans. Au verso, figurent aussi les empreintes digitales.
Ces fiches créées en juin 1942 au commissariat central de police à Amiens, et dans les sous-préfectures et mairies pour le reste de la Somme, ont été centralisées à la préfecture de la Somme.
Pour David Rosenberg, ces fiches sont une réelle avancée pour la connaissance de l’histoire de la Shoah dans la Somme.
Source : https://bit.ly/2RPnOut
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#Shoah - Deux Justes toulousains honorés pour leur action durant la seconde Guerre mondiale
Les Toulousains Raymonde et Roger Fontaneau ont été officiellement honorés du titre de Juste parmi les nations, par Yad Vashem. Raymonde a également été élevée au grade de Chevalier de la Légion d'honneur.
En effet, en 1944, le couple Fontaneau a accueilli et sauvé de la déportation Rachel Sattinger et ses enfants Colette et Gérard. Des enfants, qui, sept décennies plus tard, ont décidé d'honorer l'acte de courage de leurs bienfaiteurs.
Cette cérémonie fut aussi l'occasion pour les intervenants de rappeler que l'antisémitisme est toujours d'actualité.
Source : http://bit.ly/2BuzoRo
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#Antisemitisme - Des arbres à la mémoire d’Ilan Halimi profanés
Alors que nous commémorons aujourd’hui les 13 ans jour pour jour du décès d’Ilan Halimi, la profanation est intervenue alors qu'une cérémonie d'hommage devait avoir lieu sur place.
Des arbres plantés en souvenir du jeune homme ont été sectionnés à Sainte-Geneviève-des-Bois, dans l'Essonne. La mairie annonce qu’elle va porter plainte. Christophe Castaner s’est rendu sur place.
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#Hommage - A la mémoire d’Ilan Halimi, 13 ans après nous nous souvenons
Après avoir été enlevé puis séquestré dans un immeuble de Bagneux pendant plus de trois semaines, Ilan Halimi sera retrouvé le 13 février 2006, nu, bâillonné et menotté, agonisant le long des voies ferrées du RER C, dans le département de l'Essonne. Il décédera lors de son transfert à l'hôpital.
Assassiné parce que Juif, le souvenir de Ilan Halimi restera éternellement dans les mémoires de chacun.
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#Communiqué #Crif - Le Crif appelle au sursaut national face à l'antisémitisme
Communiqué du Crif - 12 février 2019
La hausse de 74% des actes antisémites en 2018, annoncée par le Ministre de l'Intérieur, traduit une inquiétante libération de la haine anti-juive.
Portraits de Simone Veil profanés avec des croix gammées, bosquet à la mémoire d'Ilan Halimi vandalisé, tag JUDEN sur une vitrine de magasin à Paris ... les derniers jours témoignent à eux seuls de la banalisation et de la violence de l'antisémitisme dans la France de 2019.
Le Crif rappelle que ces statistiques n'incluent ni les actes n'ayant pas donné lieu à un dépôt de plainte, ni les propos antisémites sur Internet. Ils ne reflètent donc que très partiellement la réalité de « l'antisémitisme du quotidien » auquel font face les Français juifs.
Le Crif s'inquiète de la violence de l'antisémitisme sur les réseaux sociaux qui contribue à l'enracinement de l'antisémitisme et du conspirationnisme dans les mentalités des jeunes générations.
Pour le Crif, les plans généraux de lutte contre les haines semblent malheureusement inefficaces. Il convient désormais d'apporter des réponses ciblées à chacune des haines qui déchirent notre société.
Le Président du Crif Francis Kalifat appelle "à un sursaut national contre l'antisémitisme. Il rappelle qu'au-delà d'être une menace pour les Juifs, l'antisémitisme constitue un signal de l'affaiblissement démocratique de notre pays. A la veille de l'anniversaire de l'assassinat d'Ilan Halimi, le Crif espère un sursaut salutaire de la société française pour briser le mur d'indifférence qui entoure l'antisémitisme."
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#Terrorisme #Hommage - Le terrorisme a encore frappé. Le caractère terroriste du meurtre de la jeune Ori, une israélienne de 19 ans, a été confirmé. Le suspect, un Palestinien de Hébron, a été arrêté. La colère se mêle à notre peine. Nous adressons nos pensées émues à la famille, frappée par l'horreur du terrorisme.