Lu dans la presse
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Publié le 5 Novembre 2020

France - Trois ans de prison pour harcèlement et injures antisémites

Un homme de 40 ans, déjà connu de la justice, était jugé ce mardi par le tribunal correctionnel de Strasbourg. Pendant deux mois, il avait harcelé une dizaine de personnes et diffusé des insultes antisémites sur Facebook.

Publié le 5 novembre dans Dernières nouvelles d'Alsace

« On ne se déplace que pour les dossiers emblématiques. Et c'est un dossier emblématique... », grimace un représentant du CRIF (conseil représentatif des institutions juives de France), appelé à témoigner mardi à la barre du tribunal correctionnel de Strasbourg. Le procès, dans lequel l'association a demandé 1 EUR symbolique, c'est celui d'un Lyonnais de 40 ans mis en cause pour avoir harcelé pendant deux mois plusieurs personnes et proféré des injures antisémites sur un compte Facebook ouvert sous pseudonyme.

Les faits sont tous liés, de près ou de loin, à une condamnation, en décembre 2018, par le tribunal correctionnel de Saverne. Ahllal Galoul avait été jugé pour avoir menacé de mort trois opératrices de régulation du Samu 67, qu'il tenait pour responsables du décès de Naomi Musenga, en 2017. À l'époque, il avait été condamné à 6 mois de prison ferme (DNA du 20 décembre 2018), une peine confirmée ensuite par la cour d'appel de Colmar. Mais à l'été, avant d'entrer en détention, il s'était engagé dans une spirale de harcèlement et insultes en ligne.

Dans sa ligne de mire, le président du tribunal correctionnel de Saverne et le procureur de la République qui avaient officié pendant son procès, ainsi que l'avocat de la partie civile. Aux insultes et menaces publiées sur Facebook s'ajoutent des diatribes antisémites, qu'il adresse également à une journaliste de 20 Minutes qui avait relayé sa condamnation. Ses messages sont accompagnés de références aux idéologues nazis du IIIe Reich. « Son livre de chevet, c'est Mein Kampf », s'étrangle le procureur de la République Alexandre Chevrier. Le maire de Saverne ainsi qu'un gendarme à la retraite et son fils ont aussi été harcelés par téléphone. « Des dizaines d'appels en numéro masqué », détaille Philippe Schneider, président du tribunal correctionnel de Strasbourg.

Le prévenu s'en prend également au gendarme qui avait mené l'enquête dans le cadre de son procès : il usurpe son identité à plusieurs reprises, harcèle par téléphone et par mail son épouse, leur fait savoir qu'il connaît le prénom de leur fils. Ce harcèlement a duré deux mois. « Depuis, mon client a demandé sa mutation pour que cet homme ne le retrouve pas », souligne Me Gaëlle Mootoosamy, qui représentait le gendarme harcelé.

« Qui d'autre que lui aurait pu écrire ces messages ? »

À la barre, le prévenu nie tout. Ce profil Facebook, ce n'est pas lui qui l'a créé. Il ne peut avancer de réponse quand le procureur lui signale que sur le compte en question ont été publiés des extraits du procès-verbal de son procès à Saverne. « Un procès-verbal auquel seuls le prévenu et la justice pouvaient avoir accès... », pointe le représentant du ministère public. « Qui d'autre que lui aurait pu écrire ces messages et harceler ces personnes ? », s'interroge Alexandre Chevrier. Il requiert deux ans de prison avec maintien en détention et un an de prison pour les faits qui relèvent de la loi sur la liberté de la presse (les propos injurieux appelant à la haine) à l'égard de cet homme « à la personnalité sombre et inquiétante ».

« Un homme seul, marginal »

Le profil du prévenu interroge en effet. Ancien sapeur-pompier de Paris, l'homme âgé de 40 ans n'a pas d'activité professionnelle, pas de compagne, pas d'enfant. Sur son profil Facebook, aucune interaction avec des amis. « Ce qui frappe dans ce dossier, c'est la solitude et l'isolement dans lesquels vit mon client », analyse l'avocate du prévenu Me Hasna Louze. « C'est un homme seul, désoeuvré, marginal. Il faudrait une peine juste pour lui permettre de se réinsérer », plaide-t-elle.

Invité à dire quelques mots en fin d'audience, le prévenu explique n'être « pas quelqu'un de dangereux » et être resté « fidèle aux valeurs transmises lorsqu'[il] était pompier ».

Reconnu coupable, Ahllal Galoul a été condamné à deux ans de prison avec maintien en détention, et devra payer 900 EUR de dommages et intérêts au gendarme harcelé ainsi qu'à son épouse. Pour les faits qui relèvent de la loi sur la liberté de la presse, l'homme a écopé d'un an de prison, et devra verser 1 EUR symbolique au CRIF. Il a été incarcéré à l'issue de l'audience.