Tribune
|
Publié le 26 Décembre 2013

Les chrétiens d'Orient ont payé un lourd tribut aux révolutions arabes

Par Henri Tincq              

 

Après l’hémorragie de la dernière décennie en Irak, c’est en Égypte et en Syrie que la situation des minoritaires chrétiens s’est le plus dégradée. Victimes des Frères musulmans et des salafistes en Égypte, ils sont pris en otage en Syrie entre le régime Assad, qui prétend les défendre contre le terrorisme, et une rébellion où montent les clans djihadistes.

 

Dans cette terre d’Orient, où est né Jésus-Christ il y a deux mille ans, la présence des chrétiens se réduit comme peau de chagrin. Ils sont autour de douze millions, majoritairement en Égypte (8 millions) et au Liban (plus d’un million). L’exactitude des chiffres est loin d’être garantie, tant l’exode est massif depuis deux décennies et grande la précarité de ces communautés. 

Si leur nombre est aujourd’hui modeste, leur importance symbolique et politique est considérable sur cette terre où sont nés les trois monothéismes et que les conflits, depuis soixante ans, n’ont cessé d’éprouver et de déchirer.

 

Recevant le 21 novembre à Rome les patriarches orientaux catholiques, le pape François a déclaré: «Je ne me résigne pas à penser le Moyen-Orient sans chrétiens». Le 25 décembre 2013 sera pourtant un nouveau Noël tragique pour cette communauté des premiers héritiers du Christ, installée dans cette région bien avant l’islam (VIIe siècle), aujourd’hui meurtrie, marginalisée, prise en otage par des forces radicales. Deux ans après le début des révolutions arabes, auxquelles ils avaient participé et accroché leurs espoirs de liberté et de démocratie, les chrétiens vivent une situation d’échec. Leurs rêves de réforme et de pluralisme se sont envolés.

 

La principale hémorragie remonte à plus loin. En Irak, les chrétiens étaient plus d’un million, à majorité chaldéenne, avant les deux guerres du Golfe. Ils ne sont plus que 400.000 aujourd’hui. La plupart ont émigré en Amérique du Nord et du Sud et en Australie. Ceux qui sont restés, dans un pays toujours écartelé par les affrontements entre sunnites, chiites et kurdes, sont loin d’avoir retrouvé la sécurité. Les réfugiés ne sont pas revenus dans un Irak toujours aussi instable.

 

En Égypte, en deux ans de révolution, plus d’une centaine d’églises, écoles, centres sociaux et dispensaires, appartenant aux deux Églises coptes, orthodoxe (très largement majoritaire) et catholique, ont été saccagés. Avant 2011, les Coptes subissaient déjà des violences ponctuelles dans les villages ruraux de Haute-Egypte, infiltrés par les groupes islamistes, et en ville.

 

L’attentat à la bombe qui a frappé une église d’Alexandrie à la Saint-Sylvestre 2010, faisant des dizaines de victimes, avait même été un facteur de mobilisation avant la révolution de la place Tahrir au Caire qui a renversé le régime Moubarak. Au quotidien, les chrétiens sont victimes aussi de discrimination dans l’accès à la fonction publique, à l’armée, à l’université. La construction d’églises est soumise à des procédures longues et humiliantes… Lire la suite.