Jean Pierre Allali

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Lectures de Jean-Pierre Allali - Les Juifs de France, par Robert Mauss

17 Mai 2023 | 149 vue(s)
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Les Juifs de France, par Robert Mauss (*)

 

Écrit par un journaliste né en 1958 au sein d’une famille juive assimilée, mais conscient et fier de ses racines, cet ouvrage se veut, d’une certaine manière, la continuation du fameux Juifs & Français d’Harris et Sédouy, paru chez Grasset en 1979. Depuis cette date, l’antisémitisme sur fond d’antisionisme s’est lourdement aggravé en France avec une composante islamiste de plus en plus prégnante. Robert Mauss est allé à la rencontre d’une vingtaine de citoyens juifs : les représentants, les acteurs, ceux qui témoignent et les Juifs de tous les jours.

L’ouvrage s’ouvre sur une interview de Francis Kalifat, premier Président du Crif d’origine nord-africaine pour qui « Tout n’est pas encore perdu mais il faut réagir vite. Les Français juifs doivent retrouver confiance dans la République », immédiatement suivie de celle du Grand rabbin de France, Haïm Korsia, un rabbin qui aime les avions et pour qui, en dépit des difficultés, « Il n’est jamais trop tard ». Voici également Paul Salmona qui dirige de main de maître le Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme (mahJ) et qui cherche par tous les moyens à s’échapper du « judaïsme lacrymal » car le judaïsme est vivant et a, devant lui un bel avenir. Pour Sammy Ghozlan, commissaire de police, chef d’orchestre et dirigeant du BNCVA, « l’avenir s’annonce sombre ». Pour Serge Klarsfeld, « L’extrême-droite est clairement moins antijuive depuis que Marine Le Pen a remplacé et chassé son père… » et « Le fondamentalisme musulman est puissant ».

Auteure du roman Les Manifestations, Nathalie Azoulay continue d’espérer, malgré tout, que les Juifs soient protégés par la République. Et voici, Georges Bensoussan, alias Emmanuel Brenner, « le prophète des Territoires Perdus », pour qui « le pays est à cran ». 

Pour être vraiment complet, la parole est même donnée à une frange infinitésimale de la communauté juive, celle des Juifs qui militent pour la disparition d’Israël avec Pierre Stambul, fondateur de l’Union des Juifs Français pour la Paix. Catholique de naissance et converti au judaïsme, spécialiste de l’extrême droite, Jean-Yves Camus considère qu’il « ne faut pas pleurer sur le beau temps jadis » et que « Les Juifs sont des gens qui travaillent sur les textes et non pas qui absorbent passivement des flux d’images derrière des écrans ».

Docteur en géopolitique, Frédéric Encel, dont une partie de la famille a été déportée, « constate la montée en puissance concomitante d’un discours islamiste et d’un discours relativiste, en particulier chez les Frères musulmans et les Indigénistes ainsi qu’à l’extrême-gauche ».

Son petit frère, Stéphane, raconte, entre autre, comment il a vécu la période de l’Intifada : « Très mal. Je me suis senti comme un étranger dans mon propre pays ».

Ils ont fait La vérité si je mens. Michel Munz et Gérard Bitton. Ils aiment évoquer le Sentier où « un choc d’univers que tout oppose a produit des histoires incroyables ». 

Juive de gauche, Brigitte Stora se demande, comme autrefois Rutebeuf : « Que sont mes amis devenus ? ».

Patrice Cacoub, originaire de Tunisie, professeur de médecine dont l’épouse a été agressée il y a quelques années,  ressent « aujourd’hui une atmosphère curieuse et très désagréable »

Rabbin du Blanc-Mesnil, Mosche Mechaly, dont la communauté s’étiole de manière dramatique, évoque la « double peine des Juifs de banlieue ».

Originaire de Pologne, né en 1930, Paul Lipsky, Popaul pour les amis, qui a échappé à la déportation, avoue, lui aussi, une certaine inquiétude.

Définis comme bourlingueurs, Catherine et Paul Taylor, qui vivent à Ménilmontant, considèrent qu’ils sont juifs de culture mais pas de religion.

L’ouvrage s’achève sur un dimanche à Nogent où vit une sympathique et dynamique communauté et sur un clin d’œil à Rachi de Troyes.

Un corpus de notes très conséquent complète des textes très intéressants.

 

Jean-Pierre Allali

 

(*) Éditions du Cerf, octobre 2021, 288 pages, 22 €

 

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