A lire, à voir, à écouter
|
Publié le 10 Juin 2015

Hannah Szenes l'étoile foudroyée, par Martine Gozlan (*)

Une  biographie dynamique et bien documentée.

Une recension de Jean-Pierre Allali
C'est une  biographie dynamique et bien documentée que nous offre Martine Gozlan, celle de l'une des héroïnes juives les plus célèbres de tous les temps : Hannah Szenes, emportée à la fleur de l'âge, foudroyée, nous dit l'auteur, victime du régime fasciste hongrois alors sous la coupe du nazisme.
Pour construire son enquête, Martine Gozlan a puisé aux meilleures sources : les archives les plus diverses, tout d'abord, en Hongrie et en Israël, notamment, comme les rencontres avec les « derniers témoins », tel Malkiel Ben Tzvi, né en 1919, dernier survivant du kibboutz Sdot Yam à avoir connu Hannah Szenes, ce kibboutz où elle vécut avant de tenter le parachutage en Europe qui la mènera à sa fin tragique ou encore Eitan et David Senesh, les enfants de Gyuri, frère cadet tant aimé de Hannah.
Rien, au demeurant, ne prédisposait Hannah à devenir l'héroïne, l' icone, qu'elle est devenue.
Elle voit le jour le 17 juillet 1921 à Budapest dans un milieu juif bourgeois et intellectuel. Son père, Béla Szenes, auteur dramatique, était alors la coqueluche du Tout-Budapest et sa mère, Katarina, née Salzberger, dite Kató, issue d'une famille de petits commerçants aisés, était l'archétype de l'aristocrate juive tenant salon. Il faut rappeler qu'à l'époque, en 1926, un quart des habitants de la capitale hongroise sont juifs. Leur bel appartement du quartier de Rózsadomb, la « colline des roses », domine le Danube et, comme tous les Juifs du pays, ils sont engagés dans un processus d'intégration et de magyarisation amorcé par le décret d'émancipation des Juifs signé par l'empereur François-Joseph. C'est ainsi que le patronyme initial de la famille, Schlesinger, est devenu Szenes.
Hannah, Anikó pour les intimes, très tôt attirée par l'écriture, se verrait bien poétesse. L'arrivée d' Hitler au pouvoir en Allemagne, l'Anchluss de l'Autriche, le départ de Gyuri pour la France, l'attaque par Hitler de la Pologne, vont en décider autrement. Hannah se découvre une vocation sioniste irrépressible. Elle écrit : « Je suis devenue sioniste. Je sens désormais de façon consciente et forte que je suis juive et fière de l'être. Mon but est de partir en Palestine... ». La jeune fille, qui s'est mise à l'étude de l'hébreu,  est têtue et parvient à ses fins. C'est sur le Bessarabia, un bateau roumain, qu'elle gagne Haïfa. Dans ce qui n'est pas encore l'État d'Israël, elle va connaître des fortunes diverses avant de rejoindre le kibboutz de Sdot Yam, quartier général du Palyam, branche maritime du Palmach. C'est là que va germer en elle un projet fou qu'elle partagera avec quelques compagnons : se faire parachuter en Europe pour aller au secours des communautés juives en péril, notamment celle de Hongrie où Katarina se trouve toujours alors que les nazis ont envahi le pays. Mise sur pied avec le concours de l'armée anglaise, l'opération baptisée « Het », première lettre en hébreu du mot « Hadira », « Infiltration » va conduire Hannah et ses compagnons au Caire puis, de là, à Bari, en Italie d'où ils seront parachutés sur la Yougoslavie et réceptionnés par des partisans de Tito. Nous sommes en mars 1944. Le parachutage est réussi, mais, par la suite, les choses vont se gâter avec l'obstination d'Hannah et de certains de ses amis d'origine hongroise de gagner leur pays natal. Ils seront arrêtés. Hannah , qui reverra sa mère dans des conditions épouvantables sera soumise à des interrogatoires très violents et, le 7 novembre 1944, sera fusillée au prétexte d'être coupable de haute trahison. En 1950, son cercueil a quitté Budapest  pour le cimetière militaire du mont Herzl à Jérusalem.
Un cahier iconographique émouvant agrémente cet ouvrage de qualité dont on ne peut que recommander vivement la lecture.
Note :
(*) Éditions L'Archipel. Novembre 2014. 224 pages. 18,95 euros.
 

CRIF
Maintenance

Le site du Crif est actuellement en maintenance